Accueillir nos frères ici. Vivre ensemble les migrations aujourd'hui. Comprendre les migrations

Publié le par Michel Durand

Reuters/Reuters - Les organisation humanitaires estime que quelque 11.000 migrants et réfugiés - un nombre en forte augmentation - sont bloqués à Idomeni, petit village grec à la frontière avec la Macédoine, qui a fermé sa frontière. La situation pourrait rapidement échapper à tout contrôle s'ils continuent à affluer, selon elles. /Photo prise le 2 mars 2016/REUTERS/Marko Djurica

Reuters/Reuters - Les organisation humanitaires estime que quelque 11.000 migrants et réfugiés - un nombre en forte augmentation - sont bloqués à Idomeni, petit village grec à la frontière avec la Macédoine, qui a fermé sa frontière. La situation pourrait rapidement échapper à tout contrôle s'ils continuent à affluer, selon elles. /Photo prise le 2 mars 2016/REUTERS/Marko Djurica

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Ce sont des thèmes de débat vécu dans l’église de La Talaudière. Avec ces titres, je n’ai plus le droit de dire que l’Eglise se désintéresse du problème actuel sur les « Migrants ». Pourtant, je demeure inquiet de voir, devant l’ampleur du problème, les faibles mobilisations. Je me demande si je suis assez présent aux problèmes et je m’interroge sur l’éternel faible impact des cercles de silence. Certes, aujourd’hui plus que les années précédentes, les personnes que l’on rencontre dans la distribution des tracts expliquant la raison d’être de cette manifestation silencieuse, se montrent sensibles aux arguments que l’on présente. Mais, il faudrait beaucoup plus. Quand l’Europe se dit chrétienne, elle devrait être (aux moins eux, les disciples du Christ) présente aux frontières pour accueillir tous ceux et celles qui se voient dans l’obligation de fuir les dangers de leur pays.

Nous avons voté pour l’Europe. Quelle Europe ? Celle de l’enrichissement personnel. L’Europe de la libre circulation des marchandises pour des profits financiers. L’Europe du Capital. Pas une Europe Humaine. Sociale et solidaire. Fraternelle.

J’ai reçu aujourd’hui deux textes qui abordent cet aspect de la question européenne. Comme, pris par plusieurs réunions (justement pour aborder les problèmes des Migrations) je n’ai pas beaucoup de temps libre, je vous les propose à la lecture.

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Le Comité catholique contre la faim el pour le développement (CCFD) organise une soirée débat sur les migrations mondiales, ce mercredi à l'Arena, à 20 heures. Sommes-nous prêts à partager ? C'est un peu le fil rouge de cette soirée. Les migrations appartiennent à l'histoire de l'humanité. De tout temps, des hommes et des femmes ont choisi l'exil pour fuir le danger ou la misère.

Saisir les phénomènes migratoires en 2016 : réchauffement climatique, guerres intérieures...

Aujourd'hui, les migrations sont au centre d'enjeux et de surenchères, qui posent la question de l'ouverture à l'autre, surtout quand ce dernier appelle au secours. En 2016, la majorité des migrations touchent des personnes qui fuient leur pays sous la contrainte : réchauffement climatique, incapacité de nourrir une famille sur ses propres terres, persécution d'un régime dictatorial, guerres intérieures ou extérieures...

Au début des années 70, alors qu'un contrôle plus strict de l'immigration se met en place chez nous, le CCFD-Terre Solidaire devient la seule ONG française de solidarité internationale à se doter d'un programme spécifique dédié aux immigrés. Sous la pression des événements, l'équipe locale du CCFD-Terre solidaire a décidé de placer son action de carême sous le signe de la solidarité et de la fraternité avec les migrants. Comprendre l'arrivée des migrants et réfugiés en Europe, accueil ou rejet ?

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L’Europe à l’épreuve de ses valeurs fondatrices

Chronique hebdomadaire de Bernard Ginisty du 2 mars 2016

Les vagues de réfugiés qui viennent s’échouer sur les frontières reconstruites à la hâte par les pays européens sont en train de miner l’Europe. En laissant s’effondrer la libre circulation entre les pays qui la composent, l’Union européenne risque sa propre désintégration. L’abdication des politiques devant la « main invisible » du marché qui devait peu à peu conduire à une régulation des rapports humains devient de plus en plus intenable. Cette crise nous oblige donc à nous interroger sur le socle sur lequel peut s’exercer une citoyenneté européenne.

Vaclav Havel (1936-2011), dissident devenu président de la République tchèque, a été un très rare responsable politique de premier plan à avoir affirmé la nécessité pour l’Europe de prendre conscience de son enracinement éthique et spirituel. Pour lui, l’Europe ne sera faite ni par les technocrates, ni les gouvernements seuls, mais par les citoyens européens. C’est autour de l’idée de responsabilité universelle, non pas cette fois sous la forme des croisades, de la colonisation, ou de l’imposition d’un modèle culturel unique, que l’Europe peut trouver sa raison d’être.

Le 3 mars 1999, le Sénat français recevait le président Vaclav Havel. Dans son discours sur la « vocation de l’Europe », il évoquait la figure du philosophe Emmanuel Levinas : « Il y a quatre ans mourut un Juif lituanien, qui avait fait ses études en Allemagne pour devenir un célèbre philosophe français. Il s’appelait Emmanuel Levinas. Selon son enseignement, conforme à l’esprit des plus anciennes traditions européennes, en l’occurrence sans doute juive, c’est au moment où nous regardons le visage de l’autre que naît le sentiment de responsabilité de ce monde. J’estime que c’est justement cette tradition spirituelle que l’Europe devrait se rappeler aujourd’hui. Elle découvrira l’existence de l’autre, tant dans l’espace qui l’entoure qu’aux quatre coins du monde; et la responsabilité fondamentale qu’elle entend assumer ne prendra plus le visage présomptueux d’un conquérant, mais celui, humble, de qui prend la croix du monde sur son dos. Et si quelqu’un assimilait cette responsabilité à une forme inédite de l’orgueil messianique, alors, il ne nous resterait plus qu’à faire appel à notre conscience» (1).

Vaclav Havel fut d’abord un écrivain auteur d’une œuvre théâtrale dans le courant littéraire du « théâtre de l’absurde » et avait bien conscience de ce qui peut apparaître de « ridicule donquichottesque » dans son propos. Face à ceux qui souriaient de son idéalisme, il faisait appel à son expérience d’homme de théâtre et de dissident dans la société tchèque normalisée par les troupes soviétiques : « Je me dis qu’ayant pu – avec une poignée d’amis, mais entouré d’un océan d’indifférence – me cogner la tête contre les murs pendant des années en répétant la vérité sur le totalitarisme communiste, il n’y a pas de raison pour que je cesse de me cogner la tête contre les murs en parlant inlassablement, en dépit des sourires indulgents, de la responsabilité et de la morale face à notre marasme social, et je ne vois pas pourquoi je devrais considérer, plus qu’avant, que cette bataille est perdue d’avance» » (2).

Pour lui, « la tâche fondamentale consiste à faire front à l'automatisme irrationnel du pouvoir anonyme, impersonnel et inhumain des idéologies, des systèmes, des appareils, des bureaucraties, des langues artificielles et des slogans politiques, (…) à ne pas avoir honte d'être capable d'amour, d'amitié, de solidarité, de compassion et de tolérance, mais au contraire à rappeler de leur exil dans le domaine privé ces dimensions fondamentales de notre humanité et à les accueillir comme les seuls vrais points de départ d'une communauté humaine qui aurait un sens ” (3).

 

(1) SENAT : Compte-rendu analytique officiel de la réception solennelle de M. Vaclav Havel, Président de la République tchèque le 3 mars 1999.

(2) Vaclav HAVEL : Méditations d’été, éditions de l’aube, 1992, page 134

(3) Vaclav HAVEL : Essais politiques, éditions Calmann-Lévy, 1989, page 243.

 

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Publié dans Politique

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