Algérie, migrants avec ou «sans papiers». Ils vivent de vrais galères

Publié le par Michel Durand

Pendant mon séjour à Béni Isguen, j’ai vu de nombreux migrants subsahariens.

Je viens de recevoir une lettre d’un prêtre du Prado qui a choisi l’Algérie pour prendre sa retraite. Il a été appelé par la direction de la prison pour être aumônier auprès des africains chrétiens.

« Pour moi ce qui est très nouveau c’est la demande que l’on m’a fait de devenir aumônier de la prison de Mostaganem. Il y a en effet dans cette prison des subsahariens chrétiens qui ont fait la demande de voir un prêtre, et je ne pouvais pas refuser étant seul prêtre sur ce secteur ».

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Palais de justice de Mostaganem

 

De son courrier, j’extrais trois passages qui parlent du problème des dit « sans papiers » :

 

"Je vois donc pour le moment une dizaine de subsahariens qui sont tous des migrants, et la liste va s’allonger parce que je viens d’apprendre que de nouveaux subsahariens ont été arrêtés et affectés dans la prison de Mostaganem. Ils ont fui leur pays soit à cause de la famine ou de la guerre et ils sont, tous ces migrants, dans la grande ville d’Oran. On évalue à  2000 camerounais ceux qui sont dans cette vaste banlieue  et beaucoup d’autres de diverses nationalités que l’on pourrait appeler « sans papiers » et qui vivent de vrais galères. Alors il n’est pas surprenant qu’ils puissent parfois se retrouver en prison. Je les vois tous les 15 jours et nous prenons toujours un long temps de partage des nouvelles, puis un temps pour nourrir leur foi avec une page d’évangile. J’admire leur courage et leur foi. Je dois aussi faire l’agent de liaison entre eux et leurs familles. Ainsi l’un d’eux est du Nigéria et aujourd’hui j’ai eu un entretien par téléphone avec sa famille dont il n’avait pas de nouvelles, car ces détenus ne peuvent ni téléphoner ni à plus forte raison adresser de message par internet.

 

Tout récemment  j’ai rencontré un jeune avocat qui a défendu un des 10 dont je viens de vous parler. Il est venu me voir tout à fait consterné :   « Procès bâclé ; j’ai la conviction que mon client est innocent, mais c’est un « black » et il fallait un coupable. »  Il en a pris pour 10 ans ! Puis  tout à l’heure coup de tél en provenance de Tamanrasset : 3 parmi ceux que je connais ont eu une remise de peine (5 ou 6 jours à attendre dans cette ville avant qu’on les dépose à la frontière du Mali) mais ils sont là sans rien, sans argent, sans toit ! Je viens de leur envoyer des unités de téléphone qui vont leur permettre de se nourrir.

 

.  Ici les jeunes sans emploi sont nombreux et dans beaucoup de familles il y a eu des tentatives pour partir en petit bateau et joindre l’Espagne. On les appelle les « Harragas » et si certains arrivent à gagner l’Europe, un bon nombre soit sont arrêtés par les polices de  la mer, soit périssent en cours de leur voyage (il y a de redoutables tempêtes sur la méditerranée) Presque chaque semaine des corps sont retrouvés par les marins pêcheurs. Mes jeunes amis sont très  préoccupés par toutes ces tentatives de départ et ils sont souvent scandalisés de voir que quelques uns avant le départ divorcent abandonnant femmes et enfants pour être plus libre une fois en Europe en vue d’un mariage qui facilitera leur insertion et l’obtention des papiers."


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