Guy de Fatto. Musicien de métier : un jour j’ai trouvé l’Amour. Prêtre du Prado, dans l’éternité de l’Amour divin depuis le 5 novembre 2016

Publié le par Michel Durand

Guy de Fatto. Musicien de métier : un jour j’ai trouvé l’Amour. Prêtre du Prado, dans l’éternité de l’Amour divin depuis le 5 novembre 2016

Peu de temps avant d’entrer dans l’éternité en présence de Dieu, Guy de Fatto a souhaité célébré l’eucharistie un vendredi soir à la chapelle du Prado. J’ai trop attendu avant de vous donner à communier avec cet événement. Enfin le voici. Merci à l’auteur de cet enregistrement.

Du quotidien La Croix, le 28/ 01/ 2009
A 84 ans, le père Guy de Fatto n’a rien perdu de sa créativité.

L'hiver, saison des souvenirs. Lyon grelotte, la nuit s'épaissit. Un troquet, à deux pas de la place Carnot. Cheveux gris en bataille, sourcil broussailleux que perce un regard intense, le P. Guy de Fatto réchauffe ses doigts autour d'une tasse de chocolat fumant. Ces doigts ravinés par le temps, modelés comme une vieille roche, sont aussi précieux que légendaires : ils ont accompagné les plus grands jazzmen d'après-guerre, de Claude Bolling à Kenny Clarke, en passant par Sidney Bechet dont il fut l'un des premiers complices en Europe.

Aujourd'hui âgé de 84 ans, il se fait plus discret. Mais certains n'ont pas oublié l'histoire de ce contrebassiste incontournable des années 1940 et 1950, devenu au fil des années une figure singulière du paysage ecclésial français. Bon pied bon œil, il ne faut pas le pousser beaucoup pour le voir ouvrir sa boîte à souvenirs.

À Saint-Germain-des-Prés, il confesse avoir vécu la Bohème « avec un B majuscule ». Comme ce jour où, cherchant un toit, on le recommanda auprès de Boris Vian. L'auteur de L'Écume des jours l'hébergera pendant un an. « Un gars très mystérieux », se souvient-il de celui qui partageait sa passion pour Duke Ellington. Dans les caves où il se produit, comme « La Rose rouge », il côtoie Juliette Gréco, Yves Robert, les Frères Jacques... Et quand il ne joue pas, il assouvit son autre passion pour le 7e art, fréquentant les salles obscures jusqu'à deux ou trois fois par jour.

Un soir de 1953, cette frénésie finit par l'épuiser. Le swing n'y est plus. Il a 28 ans. Anéanti par une rupture amoureuse, il dit avoir fait alors l'expérience fulgurante d'un « baptême dans l'Esprit ». Subitement, lui, l'incroyant, décide d'entrer en religion ! Ni une, ni deux. Stupeur dans son entourage. Les années passent. Après onze ans d'une formation rocambolesque au séminaire - « Je plains mes supérieurs ! » note-t-il avec humour -, le voilà ordonné prêtre du Prado, à Lyon. Dès lors, le P. de Fatto se consacrera à l'annonce de la foi à travers la musique et le spectacle.

Aumônier d'artistes en 1966, fondateur à Paris du centre Philippe-Néri destiné à promouvoir la prière par le chant, il a animé plus de 5 000 veillées « inspirées des mystères du Moyen Âge », dans toute la francophonie. L'homme fut par ailleurs à l'origine d'audacieuses « recherches liturgiques gospélisantes ». On lui doit encore l'organisation de messes mémorables dans des théâtres ou des cirques. Et sa discographie a été féconde, avec 100 000 disques écoulés. « Sur 15 enregistrements et en vingt ans, cela reste modeste », relativise-t-il.

Loin de toute nostalgie, le P. de Fatto parle du passé et du présent avec la même ferveur : « Je ne cesse de faire fructifier le don de parole qui m'a été fait. Je continue à voyager pour animer des messes, des baptêmes et des enterrements. » En 2007, il concélébrait à Lyon les funérailles de l'animateur Jacques Martin. Installé à la maison de retraite pradosienne Alfred-Ancel, il partage son quotidien avec 11 autres prêtres et admet préférer désormais le silence au tumulte des salles de spectacle : « Je me tais et je laisse Dieu me parler. » L'Église d'aujourd'hui ? « Elle se renouvelle en passant par la croix, observe-t-il. Pour ressusciter, c'est le chemin normal. »

Et n'allez pas croire sa fibre créatrice remisée : il vient d'enregistrer un disque émouvant (1) où il retrace son parcours sous la forme d'un conte parsemé d'extraits musicaux. Un nouveau livre est également en cours d'écriture, pour prolonger un premier témoignage publié en 1983 (2). « Cette pêche invraisemblable, c'est le Seigneur qui me la donne, confie-t-il. À mon âge, il m'arrive d'interpeller Dieu : "C'est quand tu veux !" Non pas que je sois pressé, mais après avoir tant vécu, je commence à fatiguer dans ce monde de fous. Je n'aurais jamais cru vivre aussi longtemps. Alors si je peux encore servir, que le Seigneur dispose de moi ! »

(1) Une contrebasse pour Dieu, 15 €, sur commande : 04.78.72.21.28.
(2) Aux rythmes de Dieu (Cerf, 1983).

MAIGRE François-Xavier

Publié dans Eglise, Témoignage

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