L'attente de Dieu reconnu, en Christ, comme Père de tous les hommes engage à l’action concrète, chemin des théologies vers l’harmonie

Publié le par Michel Durand

Jésus enseignant, Catacombe, Rome vers IVe siècle

Jésus enseignant, Catacombe, Rome vers IVe siècle

Homélie 22 janvier 2017 - Temple de la rue Lanterne

- Lecture du prophète Isaïe : 8. 23 à 9. 3 : "Sur ceux qui habitaient le pays de l’ombre, une grande lumière a resplendi."
- Psaume 26 : "Le Seigneur est ma lumière et mon salut."
- Lecture de le lettre de saint Paul aux Corinthiens : 1 Cor : 1. 10 à 17 : "Est-ce au nom de Paul que vous avez été baptisés ?"
- Évangile selon saint Matthieu : 4. 12 à 23 : "Toi le carrefour des païens."

Je souhaite situer cet évangile selon Matthieu au chapitre 4, dans son contexte historique.
Jésus est en train d’apprendre l’arrestation de Jean le baptiste

« Ayant appris que Jean avait été livré, Jésus se retira en Galilée ».

Plus loin, au chapitre 14, nous apprenons que c’est Hérode qui voulut l’arrestation de Jean le baptiseur et qu’il se trouva dans l’obligation de l’exécuter. On lui coupa la tête.
Distinguons entre les Hérode. Le Grand et l’Antipas.
Il s’agit, ici, d’Hérode Antipas, le fils d’Hérode le Grand. Hérode le Grand est celui dont on parle à propos de la visite des mages auprès de Jésus alors qu’il était tétrarque (roi) de Judée, résidant à Jérusalem.
Hérode Antipas est prince de Galilée. Son palais, là où Salomé se mit à danser pour le plaisir de son père et de ses invités (Mt 14), semble se trouver en Galilée, peut-être à Nazareth (Nazara).
J’imagine, car je n’en ai pas trouvé la preuve, que le baptême de Jésus par Jean dans le Jourdain fut plutôt proche de Jérusalem.
Jésus, après son baptême par Jean dans le Jourdain s’était isolé dans le désert pour une quarantaine de jours, donc à l’est du Jourdain, me semble-t-il. Puis, il était revenu en Galilée, vraisemblablement à Nazareth, la terre de ses pères, sa patrie. Là où, apparemment, réside Hérode Antipas.
Sentant venir un danger suite à l’arrestation du prophète Jean, Jésus quitta sa maison, sa ville pour se rendre à Capharnaüm situé à l’est, au bord du lac de Guennésareth encore appelée mer de Galilée.

L’évangéliste Matthieu, au chapitre 21, désigne en Jésus le prophète de Nazareth en Galilée. Alors qu’il entre dans Jérusalem à la veille de sa condamnation, les foules le désignaient en disant :

« C’est le prophète Jésus de Nazareth en Galilée » (Mt 21,11).

Revenons au début de la vie publique de Jésus.
Il se retire. Il se voit dans l’obligation d’abandonner cette génération mauvaise et adultère réclamant un signe.

« Ainsi vous savez interpréter l’aspect du ciel, et les signes des temps, vous n’en êtes pas capables ! Génération mauvaise et adultère qui réclame un signe ! En fait de signe, il ne lui en sera pas donné d’autres que le signe de Jonas. » Il les planta là et partit » (Mt 16, 4).

Il abandonne ses compatriotes comme il abandonne ses ennemis ou Jérusalem. Ainsi, après l’événement des vendeurs chassés du temple :

« Puis il les planta là et sortit de la ville pour se rendre à Béthanie, où il passa la nuit » (Mt 21,17).

Dans le passage qui nous concerne ce jour, Jésus part dans les territoires de Zabulon et de Nephtali.

« Il se retira en Galilée. Il quitta Nazareth et vint habiter à Capharnaüm… »

Tournons-nous maintenant vers le prophète Isaïe.

Après avoir couvert de honte le pays de Zabulon et le pays de Nephtali, Le Seigneur a couvert de gloire la route de la mer, le pays au-delà du Jourdain, la Galilée des Nations.
« Vers l’an moins 700, les régions de la Nephtalie et de Zabulon étaient sous le joug des Assériens. La plupart de ces personnes vivaient dans les ténèbres, puisqu’elles étaient devenues aveugles par la faute des hommes. (En effet), les vainqueurs de la guerre laissaient la vie aux vaincus, mais ils leur crevaient les yeux. Dans ce contexte, le prophète Isaïe annonce qu’un jour, lors du retour à la liberté, la lumière se fera sur le pays» (cf A. Sansfaçon).

« Mais ensuite le Seigneur a couvert de gloire la route de la mer (le pays) au-delà du Jourdain et (la Galilée) le district des nations (carrefour des païens).

Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu une grande lumière. Sur ceux qui habitaient le pays de l’ombre, une lumière a resplendi » (Is 8, 23 – 9, 1).

Matthieu reprend la prophétie d’Isaïe et l’applique à Jésus. Celui-ci annonce que le royaume des cieux est proche. Les signes de délivrance vont se multiplier :

« Jésus, parcourant toute la Galilée, enseignait dans leurs synagogues, proclamait la Bonne Nouvelle du Royaume, guérissait toute maladie et toute infirmité dans le peuple » (Mt 4, 23).

 

Puisque nous avons en mémoire tous les évènements sociaux et politiques du monde entier, des liens se tissent spontanément entre le vécu au quotidien et les paroles révélées entendues au cours de cette assemblée. Ainsi, au milieu de la rédaction de cette homélie, une amie m’a téléphoné pour me demander des adresses de personnes sachant comment recevoir et héberger une famille irakienne en fuite de son pays. Les gouvernements forts qui gèrent le monde ne peuvent être ignorés dans leurs pratiques notamment face à la réalité des migrations et, écoutant l’appel à suivre Jésus guérissant toute infirmité dans le peuple, nous ne pouvons boucher nos oreilles aux diverses sollicitations. La vie avec le Christ ne sépare jamais le domaine de la prière de celui de l’engagement dans le monde. Pour l’Église du Christ, la charité, le soin d’autrui, n’est pas une option.

Saint Ignace d’Antioche le dit ainsi dans une lettre aux Éphésiens : « Ayez donc soin de vous réunir plus fréquemment pour rendre à Dieu Actions de grâces et louange. Car quand vous vous rassemblez souvent, les puissances de Satan sont abattues et son œuvre de ruine détruite par la concorde de votre foi. Rien n’est meilleur que la paix qui réduit à rien toute guerre que nous font les puissances célestes et terrestres.
Rien de tout cela ne vous est caché, si vous avez parfaitement pour Jésus-Christ la foi et la charité, qui sont le commencement et la fin de la vie : le commencement, c’est la foi, et la fin, la charité (cf. 1 Tm 1, 5). Les deux réunies, c’est Dieu, et tout le reste qui conduit à la perfection de l’homme ne fait que suivre. Nul, s’il professe la foi, ne pèche ; nul, s’il possède la charité, ne hait. "On connaît l’arbre à ses fruits" (Mt. 12, 33) : ainsi, ceux qui font profession d’être du Christ se feront reconnaître à leurs œuvres. Car maintenant l’œuvre qui nous est demandée n’est pas simple profession de foi, mais d’être trouvés jusqu’à la fin dans la pratique de la foi ».
Gardons bien en tête les obscurités qui envahissent le monde entier. Résistons devant les prétentions des princes des finances qui jouent les anti Robin des bois, ceux qui prennent aux pauvres pour donner aux riches ; expressions que j’ai récemment entendues dans les sphères politiques.
Dans nos ténèbres, dans les absurdes obscurités et les dramatiques guerres qu’entretiennent les hommes qui imposent leur pourvoir, par le Christ, avec le Christ, en Lui, la grande délivrance est arrivée. La lumière jaillit de nos actions, car les parents éveillent leurs enfants à la prière et à l’engagement, non pas par de simples enseignements, mais par des actes conformes à leurs paroles. Ils font et ils expliquent. La lumière jaillit, car les personnes en difficulté sont aidées. Les migrants accueillis, hébergés et sympathiquement accompagnés. Par Jésus ressuscité, les hommes sont réconciliés avec Dieu. Captifs des ténèbres, ils retrouvent la lumière.
Les actes que nous posons pour qu’ils en soient ainsi, nous les accomplissons avec tous, croyants ou non en la Résurrection du Christ, en la réalité du royaume. Il en va ainsi des cercles de silence qui compta un mercredi plus de 600 personnes parce qu’il n’était pas ,humainement, recevable qu’un élu puisse déclarer que l’Europe n’avait pas mission à accueillir des étrangers. Et je voudrais souligner ici que les démarches chrétiennes œcuméniques agissant dans le sens de la proximité aux personnes en difficultés ont toute leur importance. C’est par le concret du quotidien que les réflexions théologiques et ecclésiales trouveront la voie de l’harmonie.

(Partie non prononcée au temple – feuille égarée ?)
Oui, nous retrouvons la lumière, car nous voyons en Jésus l’unique vrai libérateur et établissons en lui notre trésor. C’est lui qui nous plonge dans l’eau du baptême, tête sous l’eau, pour que, lavés de tout mal, nous nous relevions dans sa force et établissions chez lui notre principale demeure. Ce n’est que dans le bain de sa lumière vécu au jour le jour que nous pourrons franchir le Jourdain et, convertis, pénétrer dans une terre qui n’est pas celle d’un peuple particulier, mais de toute l’humanité même celle qui ne reconnaît pas le Père universel en Dieu.

« J’ai demandé une chose au Seigneur, la seule que je cherche : habiter la maison du Seigneur tous les jours de ma vie. »

Je n’ai pas encore parlé de l’appel des premiers apôtres.

« Comme il marchait le long de la mer de Galilée, il vit deux frères, Simon, appelé Pierre, et son frère André, qui jetaient leurs filets dans la mer ».

À la suite des apôtres, acceptons l’invitation de Jésus à la conversion permanente :

« Convertissez-vous, car le Royaume des cieux est proche ».

Et reconnaissons que cette mise à la suite du Christ ne nous enferme pas dans nos lieux de prières, mais nous ouvre en permanence les portes exposées à tout vent.

 

Publié dans Eglise, évangile

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