Le désir de luxe étant à son comble avec la recherche de bien-être, de confort, le chrétien doit témoigner d’une vie simple et sobre

Publié le par Michel Durand

Michel Delannoy et la famille pradosienne avec François, audience du 7 avril 2018

Michel Delannoy et la famille pradosienne avec François, audience du 7 avril 2018

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Aujourd’hui parler de sobriété est dans l’air du temps ; cela fait chic ; c’est tendance. Ainsi pour parler de la pauvreté selon l’Évangile, afin d’être assuré d’une meilleure écoute, il arrive que nous employons le mot « sobre ». Parler de l’invitation à être sobre, cela passe mieux que pauvre afin d’indiquer l’appel de tous à la pauvreté selon l’Évangile.

Notons qu’être sobre, pauvre par désir c’est totalement différent d’être pauvre par obligation. L’approche d’un mode de vie simple et sobre d’une personne qui sans vivre dans l‘abondance ne se trouve pas dans le besoin, sera totalement différente de qui est pauvre par obligation (la misère). Pour le riche, il est certainement plus facile de se contenter du nécessaire.

Le choix de la pauvreté pour qui est économiquement pauvre plonge des racines dans un engagement mystique, spirituel hautement branché sur la perception de Jésus, homme et Dieu. Mais je dis cela bien trop rapidement. Au lieu de m’exprimer, je devrais laisser la parole aux saints et saintes selon l’Évangile de l’Église du Christ.

Je place ces quelques lignes, issues de ma médiation matinale, en tête d’une étude (à poursuivre) faite ces derniers jours pour mener en parallèle l’appel à la pauvreté vu par Antoine Chevrier et l’encyclique de François Laudato si. Antoine Chevrier dans son Véritable disciple, s’adresse aux prêtres, du XIXe siècle. Son enseignement concerne également toute personne du XXIe.

 

Laudato si N° 10 - Simplicité

Saint François d’Assise

Je ne veux pas poursuivre cette Encyclique sans recourir à un beau modèle capable de nous motiver. J’ai pris son nom comme guide et inspiration au moment de mon élection en tant qu’Évêque de Rome. Je crois que François est l’exemple par excellence de la protection de ce qui est faible et d’une écologie intégrale, vécue avec joie et authenticité. C’est le saint patron de tous ceux qui étudient et travaillent autour de l’écologie, aimé aussi par beaucoup de personnes qui ne sont pas chrétiennes. Il a manifesté une attention particulière envers la création de Dieu ainsi qu’envers les pauvres et les abandonnés. Il aimait et était aimé pour sa joie, pour son généreux engagement et pour son cœur universel. C’était un mystique et un pèlerin qui vivait avec simplicité et dans une merveilleuse harmonie avec Dieu, avec les autres, avec la nature et avec lui-même. En lui, on voit jusqu’à quel point sont inséparables la préoccupation pour la nature, la justice envers les pauvres, l’engagement pour la société et la paix intérieure.

 

N° 11.

à propos de St François

Son témoignage nous montre aussi qu’une écologie intégrale requiert une ouverture à des catégories qui transcendent le langage des mathématiques ou de la biologie, et nous orientent vers l’essence de l’humain. Tout comme cela arrive quand nous tombons amoureux d’une personne, chaque fois qu’il regardait le soleil, la lune ou les animaux même les plus petits, sa réaction était de chanter, en incorporant dans sa louange les autres créatures. Il entrait en communication avec toute la création, et il prêchait même aux fleurs « en les invitant à louer le Seigneur, comme si elles étaient dotées de raison ».[19] Sa réaction était bien plus qu’une valorisation intellectuelle ou qu’un calcul économique, parce que pour lui, n’importe quelle créature était une sœur, unie à lui par des liens d’affection. Voilà pourquoi il se sentait appelé à protéger tout ce qui existe. Son disciple saint Bonaventure rapportait que, « considérant que toutes les choses ont une origine commune, il se sentait rempli d’une tendresse encore plus grande et il appelait les créatures, aussi petites soient-elles, du nom de frère ou de sœur ».[20] Cette conviction ne peut être considérée avec mépris comme un romantisme irrationnel, car elle a des conséquences sur les opinions qui déterminent notre comportement. Si nous nous approchons de la nature et de l’environnement sans cette ouverture à l’étonnement et à l’émerveillement, si nous ne parlons plus le langage de la fraternité et de la beauté dans notre relation avec le monde, nos attitudes seront celles du dominateur, du consommateur ou du pur exploiteur de ressources, incapable de fixer des limites à ses intérêts immédiats. En revanche, si nous nous sentons intimement unis à tout ce qui existe, la sobriété et le souci de protection jailliront spontanément. La pauvreté et l’austérité de saint François n’étaient pas un ascétisme purement extérieur, mais quelque chose de plus radical : un renoncement à transformer la réalité en pur objet d'usage et de domination.

 

Véritable disciple p. 174

C’est renoncer au culte de son corps.

Saint Paul nous dit qu’il faut vêtir son corps avec modestie et sobriété et non avec des frisures et des parements d’or et de pierreries ou d’habits somptueux. (1 Tm 2,9)

Saint Pierre le recommande aussi dans ses épîtres : ne mettez point votre ornement à vous parer au dehors par la frisure des cheveux, les enrichissements d’or ou d’argent et la beauté des habits ; mais cherchez à parer l’homme caché dans le cœur, par la pureté incorruptible d’un esprit plein de douceur et de paix, ce qui est un riche et magnifique ornement devant Dieu. (1 P 3,3)

Nous devons donc retrancher de notre extérieur toute parure inutile et nous occuper bien plus à parer l’homme intérieur qu’on ne voit pas, qu’à parer l’homme extérieur qui se voit.

Nous devons retrancher tout ornement extérieur tels que bagues, fleurs, pendants d’oreilles, chaînes d’or ou d’argent, boucles, montre en or, pierrerie, quand même ces objets viendraient de la famille.

Nous devons avoir aucun ornement extérieur, pas même de dévotion excepté le crucifix.

Nous devons retrancher de nos habits tout ce qui sent le luxe, l’élégance, l’étiquette, le fin, la recherche, l’arrangement, la propreté excessive, tels que le linge fin, repassé, cols, manchettes, souliers vernis, franges, etc. tout ce qui plaît, est joli, gracieux, aimable, qui flatte le regard.

Nous devons éviter de prendre un soin trop grand de notre corps, de nos chaussures, de notre visage, de nos mains, de nos ongles, de notre peau.(…)

Combien ce culte du corps est opposé à l’esprit évangélique !

Perte de temps, occupation de soi, oubli de Dieu et de ses devoirs ; plus on pense à soi, moins on pense à Dieu et aux autres.

Le véritable ornement du corps est la pureté et la modestie.

Dans le monde, on s’occupe beaucoup du corps.

Les saints s’en occupaient peu : saint Benoît, saint Hilarion, saint François, Benoît Labre.

Quand on cherche Dieu et son prochain, on n’a pas le temps de s’occuper de son corps.

 

Se contenter du nécessaire

Antoine Chevrier, le Véritable disciple, p. 290…

Voilà un article très important : il comprend tout l'ensemble de la vie évangélique.

C'est ce que Notre Seigneur recommande à Marthe quand [il était] dans sa maison ; elle se plaignait de ce que sa sœur Marie ne lui aidait pas à préparer le repas ; et Jésus la reprend en lui disant : "Marthe, Marthe, vous vous troublez et vous vous embarrassez dans le soin de beaucoup de choses ; or, une seule est nécessaire : Marie a choisi la meilleure part qui ne lui sera pas ôtée" (Lc.10/41-42), lui faisant entendre par là qu'il ne faut pas tant se tourmenter pour les choses de la terre, mais qu'il faut plutôt s'occuper des choses du ciel ; mais que, pour les choses terrestres, il faut se contenter du strict nécessaire. "Unum necessarium". (Lc.10/42)

C'est encore ce que saint Paul nous dit clairement quand, écrivant à son cher fils Timothée, il lui dit : "Nous n'avons rien apporté en ce monde et il est certain que nous ne pouvons non plus rien en emporter ; ayant donc de quoi nous nourrir et de quoi nous vêtir, nous devons être contents". (I Tm.6/7-8)

Pour nous conformer donc à cet enseignement de Notre Seigneur et de saint Paul, nous devons nous contenter du nécessaire.

Ce nécessaire se rapporte au logement, à la nourriture et au vêtement.

Nécessaire dans le logement.

L'étable de Bethléem à la naissance de Jésus Christ ne pouvait être un logement plus pauvre. La maison de Nazareth, telle qu'on la voit encore à Lorette (? voir note), était pauvre.

Pendant sa vie publique, Notre Seigneur n'avait souvent d'autre logement que la solitude des montagnes, le jardin des oliviers ; et il dit que "les renards ont leurs tanières, les oiseaux ont leurs nids mais le Fils de l'homme n'a pas où reposer sa tête". (Lc 9,58, Mt 8,20).

Saint Paul dit qu'il n'a point d'habitation permanente. "Non habemus hic manentem civitatem sed futuram inquirimus". (He 13,14)

Pour entrer dans cet esprit de pauvreté de Notre Seigneur, nous retrancherons de notre logement tout ce qui sent le luxe, la vanité,  le superflu, l'inutile.

Nous n'admettrons dans nos chambres ni tapisserie, ni boiserie, ni glace, ni fauteuil, ni marbre, ni dorure, ni peinture, ni aucun ornement qui puisse plaire à l'œil ou au goût ou contenter la vanité, l'amour-propre ou le bien-être. Tout doit respirer la simplicité, la pauvreté et la souffrance de l'étable ; murs grossiers ou crépis au mortier;
deux ou trois chaises en paille grise ou en bois ;
une table, un bureau en bois simple, sans ornement ;
un crucifix en bois peint ;
un prie-Dieu simple qui pourrait servir de placard au besoin ; 
un placard simple s'il est nécessaire ou quelques chevilles de bois recouvertes d'un rideau ou même encore sans rideau ; 
un lit composé de deux tréteaux supportant trois planches de sapin,
une paillasse, un ou deux draps, un traversin ; mais jamais une étoffe de soie ou travaillée ; on peut y assujettir à la tête une petite traverse en bois pour soutenir le traversin ; on peut mettre une couverture sur la paillasse, si on en a besoin ; en cas de maladie, on peut avoir un matelas ;
quelques images, cadre de bois simple sans couleur ni vitre, ni peinture ;
quelques rayons sur la table, pour mettre les livres et les cahiers ;
s'il est nécessaire, des rideaux en lustrine verte ou bleue aux croisées ;

Il faut qu'en entrant dans notre chambre on y trouve et on y respire la pauvreté, la simplicité et la souffrance.

Il faut retrancher tout ce qui sent le bourgeois, le bien-être, la commodité ; il ne faut pas qu'en entrant chez nous on puisse dire : il est bien ; ce n'est pas mal ; il faut qu'on puisse dire : il souffre.

Aujourd'hui où le luxe est à son comble, que tout le monde recherche le bien-être, la commodité, le confortable, il faut que le prêtre, au contraire, recherche la pauvreté et la souffrance, afin qu'il puisse être un exemple au milieu du monde.

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