L’homme est le lieu du don de lui-même de Dieu : celui-ci se donne à l'homme, et son don de lui-même est grâce, don de l'Esprit Saint

Publié le par Michel Durand

L’homme est le lieu du don de lui-même de Dieu : celui-ci se donne à l'homme, et son don de lui-même est grâce, don de l'Esprit Saint

 

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Alors que je continue à saisir les pages de mon journal d’adolescent (voir ici  et  ici ) en me disant qu’il m’est vraiment utile de constater les constantes dans un choix de vie, j’ai entrepris la lecture d’un ouvrage en christologie que des amis m’ont communiqué après avoir rencontré, chez eux, l’auteur. Michel Castro.

Michel Castro, Initiation au mystère de Jésus, Salvator, 2020, p. 117-121.

 

 

Je lis ces pages avec plaisir, car je les prends comme un résumé de toute la question, au cours des siècles, du problème du Christ, Verbe de Dieu fait chair, mort et ressuscité. Je constate que les auteurs cités dates tous d’après 1970, année où j’ai terminé mes études en théologie avant de les reprendre, par deux ans, au début des années 80. Mais, l’orientation de celles-ci tournait plutôt autour de la théologie morale, théologie pratique que des questions fondamentales concertant le mystère du Christ : deux natures, une personne. J’ai donc, en quelques pages, repris ces complexes explications qui nous placent au cœur du mystère. Et, ayant terminé le livre (179 pages), je me dis qu’il faudrait le reprendre en dialogue avec d’autres lecteurs pour bien assimiler les méandres des explications. Bref, j’aurais bien aimé avoir lu cet ouvrage au moment de passer mes examens où nous étions interrogés sur l’ensemble du programme théologique.

 

Le passage que je souhaite citer aujourd’hui, illustre, à mon avis, ce que je transcrivais dernièrement de mon journal l’adolescent. Il en apporte une justification théologique s’il était nécessaire d’en chercher quelque justification.

 

La protestation de Karl Rahner

Le point de départ de Rahner n'est pas la seule autorité de la parole de Dieu, mais les aspirations qui habitent le cœur de l'homme. Le théologien cherche à monter comment, dans son existence, l'homme est orienté vers un avenir de gratuité et de mystère : l'homme est à l'écoute du Verbe, c'est-à-dire d'une parole qui lui serait dite dans l'histoire de ce monde. Or la foi chrétienne annonce qu'une telle parole s'est révélée dans l'histoire humaine, en Jésus-Christ : en lui, Dieu vient à la rencontre des hommes, il s'autocommunique à eux pour leur salut, et répond ainsi à leur attente.

L'homme, soutient Rahner, est ouvert à l'infini : il peut le vérifier dans son désir infini de connaître et de vouloir. Cette ouverture est en même temps ouverture au mystère qui le porte, et finalement à Dieu ; son désir infini est fondamentalement désir de Dieu. « Avec cette expérience transcendantale, est donné pour ainsi dire un savoir anonyme et non thématique de Dieu. » (Karl Rahner, Traité fondamental de la foi. Introduction au christianisme, Centurion, Paris, 1983, p. 34.

L’homme est, en effet, le lieu du don de lui-même de Dieu : celui-ci se donne lui-même à l'homme, et ici-bas, son don de lui-même est grâce, don de l'Esprit Saint.

 

« Le mouvement transcendantal de l'esprit, ordonné au mystère absolu dans la connaissance et la liberté, est porté par Dieu lui-même en son autocommunication de telle sorte que ce mouvement a son terme et son origine, non pas dans le mystère sacré comme but éternellement lointain et qui ne serait jamais atteignable qu'asymptotiquement, mais dans le Dieu d'absolues proximité et immédiateté » (Ibid., p. 154).

Pour Rahner, l'homme est donc, comme nous l'avons dit précédemment, fondamentalement ouvert à la transcendance, capable de recevoir le don de Dieu, pleinement accompli comme homme dans la réception de ce don. « Le devenir-homme de Dieu, de ce point de vue, est le cas unique et suprême de l'accomplissement essentiel de la réalité humaine. » (Ibid., p. 247)

On assiste ici à une revalorisation de l'anthropologique en christologie, au risque que l'autocommunication divine corresponde trop bien aux attentes de l'homme, à son imagination et à son désir.

 

Dieu nous sauve en Jésus-Christ

« Dieu nous sauve en Jésus-Christ » (Joseph Doré, « Salut-rédemption », dans Dictionnaire des religions, op. cit., p. 1518) : tel est le résumé de la foi chrétienne en matière de salut.

Celui-ci est grâce : il procède de l'initiative, de la bienveillance et de la miséricorde gratuites de Dieu. Mais il correspond à notre vœu et à notre être profond, parce que le Dieu sauveur qui nous ordonne à un accomplissement gratuit de notre être est aussi le Dieu créateur qui nous donne l'être.

Le salut n'est donc pas une dévalorisation, un abandon, une destruction ou un anéantissement de l'humain dont rien n'est étranger au salut. Dieu n'impose pas le salut, mais il le propose à notre acceptation active : c'est l'alliance. Et nous pouvons refuser celle-ci : c'est le péché qui est « autosuffisance par rapport à la proposition divine, et autopréférence dans l'accomplissement des tâches historiques au milieu du monde et au sein de la société » Ibid., p. 1520).

Jésus nous sauve par son enseignement : il annonce le royaume, c'est-à-dire notre salut comme rencontre et communion définitive avec Dieu. Il nous sauve par son destin : parce que Dieu le ressuscite d'entre les morts, nous pouvons espérer le salut. Il nous sauve par sa médiation : Dieu envoie son Fils pour nous signifier que les chemins de son salut demeurent ouverts.

Le salut que le Christ propose au monde de la part de Dieu nous atteint de trois manières. Il s'agit d'abord de vivre comme Jésus a vécu parmi nous : dans l'amour et le service d'autrui (Mt 7,21 ; Mt 25). Il s'agit ensuite de croire que Dieu sauve par le Christ, et donc que Jésus est sauveur (Mt 1, 21 ; 1 Tm 4, 10 ; Jn 4, 42) ; cette foi implique un comportement éthique conséquent et une traduction rituelle : « Bref, si c'est la foi qui sauve et si elle ne va pas sans les œuvres, elle ne va pas non plus sans les sacrements de la foi. (Ibid., p. 1521). » Il s'agit enfin de constituer l'Église : corps du Christ, elle atteste au monde que Dieu continue d'opérer parmi nous l'œuvre qu'il a accomplie en Jésus-Christ ; l'Église est sacrement du salut.

Celui-ci est proposition d'un sens à la vie : celle-ci ne va pas au néant, mais à la vie, parce qu'elle va à Dieu par-delà la mort. Au nom et à cause du Christ, le salut annonce la résurrection des morts et la vie éternelle : il est une profusion de vie, destinée à vivifier la corporalité de l'homme, et à transformer le cosmos. Il est « pardon des péchés, restauration de l'alliance avec Dieu, rétablissement de la communication avec lui » (Ibid., p. 1522). Il est finalement « communion de vie avec Dieu, avec le Dieu qui est à la fois Père de la vie, Fils incarné-mort-ressuscité et Esprit vivifiant ». Il est grâce, grâce pour nous, grâce pour le monde.

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M
Bonjour Michel!<br /> Merci pour la recension de mon livre sur ton blog. <br /> Fraternellement, <br /> Michel
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