Vers une renaissance de la pratique de la révision de vie à la lumière de l'Évangile, selon une méthode née avec la JOC, voir, juger, agir

Publié le par Michel Durand

La JOC au Cercle Ouvrier à Herve.

La JOC au Cercle Ouvrier à Herve.

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En me plongeant dans quelques archives, j’ai trouvé cet article et j’en propose la lecture (à mettre en lien avec les propos sur le cléricalisme) 

L'Action catholique spécialisée.

Quand est née l'Action catholique ?

Dans la seconde moitié du XIXe siècle, les bouleversements entraînés par la révolution industrielle amènent des laïcs catholiques à s'interroger sur le rôle de l'Église dans la société. Ils trouveront une impulsion dans la première encyclique traitant des questions sociales : Rerum novarum, de Léon XIII (1891). Alors que l'Association catholique de la jeunesse française (ACJF) est fondée en 1886 par Albert de Mun, Pie X est le premier pape à employer l'expression « action catholique » en 1903. Pie XI définira la mission propre du laïcat dans l'Église (encyclique Ubi arcano Dei, 1922). La Jeunesse ouvrière chrétienne (JOC) apparaît en France en 1927 (elle était née deux ans plus tôt en Belgique), et ouvre la voie à une Action catholique spécialisée, dont la consigne sera d'aller à la « reconquête » de ces milieux assez loin de l'Église. L'idée est que « le semblable doit être évangélisé par le semblable ». La Jeunesse agricole chrétienne (JAC) naît en 1929 et jouera un rôle décisif lors des grandes mutations paysannes d'après-guerre, devenant Mouvement rural de jeunesse chrétienne (MRJC) en 1964. Suivent la Jeunesse étudiante chrétienne (JEC), la Jeunesse maritime chrétienne (JMC), la Jeunesse indépendante chrétienne (JIC), et enfin les Cœurs vaillants et âmes vaillantes (devenus l'Action catholique des enfants). Ces associations donneront naissance à des mouvements de jeunesse féminine autonome comme la Jeunesse indépendante chrétienne féminine (JICF), d'où est née en 1941 l'Action catholique des milieux indépendants (ACI).

En France, les évêques regroupent en 1931 l'ensemble de ces mouvements sous l'appellation d'Action catholique française, et mettent en place la doctrine du « mandat », selon laquelle les mouvements sont chargés par l'épiscopat d'une mission, sous réserve de ne pas sortir du cadre apostolique fixé, et dont les aumôniers sont les garants. Les militants devenus adultes fondent la Ligue ouvrière chrétienne (qui deviendra l'Action catholique ouvrière), la Ligue agricole catholique (qui conduira au CMR). « L'Action catholique constitue probablement la phase décisive de l'installation des laïcs catholiques au sein de la cité des hommes », écrit Pierre Pierrard dans Un siècle de l'Église de France (DDB).

Comment l'Église l'a-t-elle accompagnée ?

L'Action catholique a trouvé dans Vatican II une reconnaissance des intuitions qu'elle a mises en œuvre. La constitution conciliaire Lumen gentium sur l'Église (1964) affirme que les dons de l'Esprit sont donnés à tous. Le décret Apostolicam actuositatem (1965) rappelle la nécessité de l'apostolat des laïcs. En France, la politisation de certains mouvements qui prônent la transformation des structures de la société va dans les années 1960 être source de conflits avec l'autorité ecclésiale. Mais auparavant, souligne Bruno Chenu dans Dieu au XXIe siècle (Bayard), « l'Action catholique aura remis en valeur le sacerdoce commun des baptisés et repensé l'autonomie du temporel par rapport au spirituel. Les catholiques ne désertent plus leurs responsabilités en matières sociale et politique. Ils se situent en partenaires loyaux, et cependant originaux, car inspirés par l'Évangile. » L'approfondissement de la vocation des laïcs va conduire à reconnaître leur autonomie propre. En 1975, les évêques français renoncent à la doctrine du mandat. Le nouveau Code de droit canonique (1983) reconnaît l'autonomie des associations de fidèles. Jean-Paul II, dans l'exhortation Christifideles laici (décembre 1988) développe l'enracinement de la vocation des laïcs dans le baptême et la confirmation, et souligne la dimension séculière de cette vocation.

Quelles sont les raisons de son affaiblissement ?

Dans les années 1960-1970, la politisation de certains mouvements et les conflits de génération se sont conjugués dans une crise qui a vidé les mouvements de leurs militants. Le modèle de l'Action catholique spécialisée par milieux sociaux est de surcroît mis en question par le progrès technique et l'élévation des niveaux de vie qui vont dans le sens d'une société de classe moyenne. La montée de l'individualisme va également jouer un rôle dans la disparition de ce qui était alors, selon l'historien Denis Pelletier, des « mouvements de masse ». À quoi il faut ajouter la sécularisation accélérée de la société, une foi qui ne peut plus être présupposée, un processus d'« exculturation » (Danièle Hervieu-Léger) qui ne cesse de s'accélérer. L'Action catholique spécialisée s'est efforcée de s'adapter, notamment en se préoccupant des liens avec l'Église - nombreux sont les militants devenus coopérateurs de la pastorale - et en mettant davantage l'accent - à l'heure du « retour du spirituel » - sur la méditation de la Parole de Dieu, la prière, la célébration.

Qu'ont en commun les mouvements ?

En 1988, lors du colloque qui a réuni Action catholique spécialisée et théologiens, les mouvements ont, au-delà de leurs différences, donné comme première caractéristique « un parti pris d'espérance », soutenu par une démarche qui est le patrimoine commun des mouvements : la pratique de la relecture ou « révision de vie » à la lumière de l'Évangile, selon une méthode née en même temps que la JOC, qui a évolué mais qui se résume ainsi : « voir, juger, agir » dans la foi et à sa lumière. La vie en équipe offre une manière de vivre en Église qui structure les militants et permet une expérience de partenariat prêtres-laïcs dans la mission. L'Action catholique, rappelait en février 2007 le P. Jean Quris, secrétaire général adjoint de l'épiscopat, a par ailleurs une spiritualité qui lui est propre : « spiritualité de l'incarnation, de la présence au monde, du dialogue, s'appuyant sur la pédagogie même de Dieu se révélant à travers l'histoire et les cultures d'Israël, et de la création ».

Martine de SAUTO

29/11/2008

Publié dans Eglise, Témoignage, évangile

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