Je redécouvre le désir de sortir des murs de l’Église afin de donner à voir et entendre une communauté qui sente bon, soit belle, moderne

Publié le par Michel Durand

Je redécouvre le désir de sortir des murs de l’Église afin de donner à voir et entendre une communauté qui sente bon, soit belle, moderne

Dans la relecture de mon « journal d’adolescence » je note les constantes, les appels qui reviennent, les choix de vie récurrents que je saisis comme étant la preuve de la réalité d’une vocation.

À quoi, ou vers quoi, vers qui, je me sens appelé ?

Il me semble pouvoir affirmer, aujourd’hui, que, dés l’origine, l’appel est celui qui consiste à agir au milieu du monde tel qu’il est, monde éloigné ou ignorant de l’Évangile, avec le désir de lui faire aimer l’Église. Or, l’Église, quand il la regarde, ce monde la voit attaché au passé, à une tradition désuète.

Telle est l’image que je garde des chrétiens de ma petite ville. Ils formaient un groupe de pratiquants de la messe du dimanche que l’on pouvait reconnaitre par les vêtements : col claudine pour les petites filles et culotte courte pour les garçons arrivant jusqu’au genoux avec des chandails bleu marine. Dans le langage d’aujourd’hui, je parlerai des catholiques versaillais venant à la messe en 4X4 pour véhiculer une famille nombreuse.

Comment rejoindre ces gens ? Comment leur rendre aimable l’Église ?

À mon avis, ce n’est pas en restant à l’intérieur de l’église. Je parle ici du bâtiment. Ce n’est pas en restant à l’intérieur de cet édifice, surtout quand on entretient la tendance qui consiste à se réfugier dans la sacristie. Or, n’est-ce pas cette tendance qui domine de siècle en siècle ? On veut se maintenir bien au chaud dans une confortable rencontre cultuelle animée par un prêtre animateur, aidé de laïcs dévoués. Dimension pyramidale de l’Église. De plus en plus, je pense que la formation ecclésiastique que, prêtres, nous avons reçus, ne peut que nous maintenir dans le cléricalisme, que cela soit celui des clercs ou des laïcs baptisés obéissants.

Agissant dans la cadre de la Pastorale des réalités du tourisme et des loisirs, il m’arrivait souvent de dire que les paroisses devaient être plus largement missionnaire. Et on me répondait que les paroisses étant par essence missionnaire, tout allait très bien ; il n’y avait rien à changer. La mission passe de fait par l’accueil des gens qui demandent un mariage, une sépulture, un baptême d’enfant etc…

Oui, dans les faits les gens viennent à l’Église pour demander un sacrement, une prière de sépulture. Même s’ils ne sont pas des habitués de l’Évangile, ils gardent une image pratique de l’Assemblée chrétienne et ils vont savoir ce qu’il fait dire, ou ne pas dire, pour obtenir une réponse positive à leur demande.

Mais ceux qui ont un regard foncièrement négatif de l’Église, vont-ils venir à la maison paroissiale ? Je ne le pense pas. Ou s’il vienne, par exemple, parce que dans le couple l’un y tient beaucoup, quelle approche auront-ils de l’Évangile, du Christ ? Me vient ici le souvenir de la « cure » de mon enfance. Je n’aimais pas y aller pour le catéchisme parce que cela sentait mauvais, cela sentait le renfermé ou, comme l’on disait : « la vielle fille qui se néglige ».

Alors, dans ma vocation, je redécouvre le désir de sortir des murs de l’église afin de pouvoir donner à voir et entendre une communauté qui sente bon, qui soit belle, moderne et qui présente bien. Que l’on sorte des sacristies qui sentent le renfermé, que l’on prenne les modes d’être du monde actuel et que l’on se place, au moins, sur les parvis en regardant ce qui se vit sur les places.

Ecrire cela me fait repenser à l’attitude d’Antoine Chevrier quittant le ministère paroissiale de l’église Saint-André parce que les paroissiens et le curé ne supportaient pas le bruit que les jeunes réunis par lui pouvait faire. Antoine obtient de l’évêque la permission de vivre au milieu des personnes qui avaient bien besoin de découvrir, l’Évangile, le Christ ce que la vie paroissiale ne permettait pas. Il est bon de relire* ce trait de la vie du fondateur du Prado.

Mais tout ce que j’écris en ce lieu n’a aucune originalité. L’évêque de Rome, François, parle, de mille et une façon, de l’appel à se rendre aux frontières.

Sortir de l’église, aller au milieu du monde pour donner à voir et à entendre le visage heureux du Christ, de l’´Eglise.

 

 

* Jeune vicaire tout juste nommé à la paroisse St André : deux événements impliquant la jeunesse ont préparé son départ de cette paroisse au bout de six ans, pour rejoindre une initiative lancée par un laïc (« la Cité de l’Enfant Jésus », de Camille Rambaud) :

1) La gifle d’un enfant par le curé BARJOT :

« C’était à la fin du Carême, au moment de la prière du soir. Quelques-uns des enfants, restés en dehors de l’église, s’oublièrent jusqu’à jeter le trouble dans le lieu saint. Un prêtre sortit – il s’agit de Mr BARJOT – pour faire cesser les perturbateurs qui s’enfuient ; mais l’un d’eux, le plus âgé et peut-être le moins coupable parce qu’il ne prit pas la fuite avec ses camarades, paya pour les autres et fut souffleté. Le père de l’enfant s’emporta contre l’auteur de l’injure reçue. L’enfant ne fit pas sa première communion, un autre enfant vint au monde dans la même famille, on ne le présenta pas au baptême. Une démarche conciliante auprès de ces pauvres gens trop susceptibles, une parole miséricordieuse de la part de celui à qui avait échappé ce mouvement aurait peut-être tout arrangé. L’abbé Chevrier pria, supplia pour l’obtenir, ce fut en vain. Un jour qu’il insistait et rappelait doucement que la mission du prêtre est toute de patience et de mansuétude, on lui répondit qu’il était un imbécile. » (Déposition de Jean-Claude Perrichon au procès de canonisation, cité par Olivier De Berranger, in « Antoine Chevrier, dis-nous ton secret », page 42).

 

2) Une initiative pour les jeunes, brisée par le même curé BARJOT :

Antoine Chevrier avait lancé une petite chorale pour les jeunes gens, la « société St-Louis-de- Gonzague ». Tout en étant très réaliste, il avait mis beaucoup d’espoir dans cette initiative en direction des jeunes : « Je désirerais enrôler tous les jeunes gens de Saint-André, mais cela n’est guère possible.

Cependant j’en compte aujourd’hui vingt qui seront fidèles et qui je l’espère serviront de noyau pour les autres. »

Or, « l’expérience fut de courte durée. Les anciens de la paroisse auront-ils pris ombrage de cet engagement de jeunes aux premières lignes ? Se seront-ils plaint à M. le Curé ? Ou plus simplement, ce dernier n’aura-t-il rien toléré qui change les habitudes ? Toujours est-il qu’en pleine Fête-Dieu de cette année-là, alors que les membres de la société St-Jean-Louis-de Gonzague commençaient à former le chœur principal de la procession en plein air, Mr BARJOT ordonna leur dispersion ! » (O. De Berranger, id. p.42)

On voit bien à travers ces deux faits, quel était le souci du Père Chevrier envers la jeunesse du quartier lorsqu’il était jeune vicaire en paroisse.

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