Droit de l'Homme et de jeux olympiques

Publié le par Michel Durand

Quand François Cheng nous parle de la Chine.

Ce sont des artistes-peintres qui m'ont parlé de Maurice Zundel et m'ont fait découvrir la beauté de sa spiritualité. Avec eux j'ai découvert les « crucifixions de Dunkerque », émouvante exposition et livre très profond qui montrent comment des artistes contemporains expriment Dieu, le Christ. J'en reparlerai.

Ce sont des amoureux du beau qui m'ont fait lire « Cinq méditations sur la beauté » de François Cheng. Également, grande émotion et bonne connaissance directe de l'auteur. Sincérité.

J'ai été heureux de lire ce livre avant son roman « Le dit de Tian-yi », car on retrouve la part personnelle de l'auteur à travers la fiction du roman. L'entretien de F. Cheng par Dominique Bari, dans "l'Humanité", dit tout ce qui convient de dire à ce propos.

Mais si j'écris ceci, présentement, c'est tout simplement pour présenter « Le Dit de Tian-yi », première édition en 1998, dont la lecture me semble de grande actualité alors que l'on parle de Droit de l'Homme et de jeux olympiques.

Voici un extrait :

Un après-midi, à l'heure où tous ont droit à une sieste, n'ayant nulle envie de dormir, Haolang m'entraîne, ainsi que Lao Ding, vers le petit bois qui se trouve au-delà de la zone des potagers. C'est une étendue clairsemée de bouleaux où certains aiment à venir jouir d'un peu d'ombre et de la brise. À cette heure-là, il n'y a personne.

Haolang, visiblement, a bu. Il est dans un état second, causé par l'ivresse et par la rage intérieure qui l'étouffe. Une fois dans le bois, il pousse quelques cris qui le soulagent un peu. Puis, silencieux, il s'appuie, prostré, contre un arbre. Au bout d'un moment, Lao Ding se met à parler d'une voix résolue qui tranche avec son ton paisible habituel.

«De tout ce qui nous est arrivé, demandons pardon.

- Demandons pardon ? dit l'homme révolté.

- Demandons pardon et pardonnons à ceux qui nous ont fait du mal.

- Pardonner ?...

- Oui, pardonner. Je crois bien que c'est la seule arme que nous possédions ; c'est notre seule arme contre l'absurde. Chacun de nous a vécu des choses terribles. Nous voilà tous les trois réunis. Nous savons que nous ne pouvons pas agir comme ceux qui nous ont fait du mal. Avec le pardon, nous pouvons rompre l'enchaînement des haines et des vengeances. Nous pouvons prouver que le Souffle intègre persiste dans l'Univers... »

On sent qu'il a encore énormément à dire. Trop peut-être pour qu'il puisse continuer immédiatement, mais les quelques mots qu'il vient de prononcer suffisent pour déclencher la parole chez Haolang.

« Pardon... Rompre l'enchaînement des haines et des vengeances... Parlons-en, avant qu'il ne soit trop tard. C'était pour me faire pardonner, n'est-ce pas, que je suis parti rejoindre les communistes, laissant Yumei, seule, là... » Sa voix s'étrangle. Mais il ne cède pas. Son masque se durcit tandis qu'il fait effort pour se reprendre. «Notre groupe clandestin était composé d'une quinzaine de personnes, dix-sept plus exactement, guidé par un membre du Parti. Avant d'atteindre la zone libérée, au nord du Hubei, nous devions traverser une région particulièrement dangereuse. Six jours de marche, interrompue par des alertes. Nous nous cachions dans des grottes, ou dans quelques villages "sûrs". Nous étions tellement fatigués que nous dormions en marchant. Quand la fusillade a éclaté dans le bois la dernière nuit, nous ne savions pas ce qui nous arrivait. Tirés brutalement du sommeil, nous croyions à une mauvaise plaisanterie. Évidemment, nous avons été trahis. Le traître, on le trouvera un jour. Il subira le châtiment : défiguré, pendu. Pour l'instant, au fond du bois, sous la clarté lunaire, c'était la débandade. Une balle m'a traversé le mollet et, par-dessus le marché, en courant, je me suis tordu la cheville. J'ai eu la force de me traîner près d'un arbre. Sentant un fossé sous mes pieds, je m'y suis allongé et je me suis couvert de feuilles mortes. Combien de fois, des pas accompagnés de vociférations s'approchaient, s'éloignaient, se rapprochaient, me passaient dessus ? Je ne respirais plus. Je me serais cru mort, n'étaient le sang qui collait mon pantalon à ma peau et la douleur qui commençait à devenir atroce. Douleur atroce ? ...


Pardonner...


Il y a, semble-t-il, une arme puissante dans la force du pardon.

Comment la mettre à l'action ? Nous avons tous eu  à expérimenter cette nécessité.



Publié dans Politique

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