Être prêtre selon Jésus Christ, ce n’est pas seulement être au service des sacrements diffusés dans le cadre paroissial

Publié le par Michel Durand

L’actualité de mon courrier me donne l’occasion d’une réflexion sur le ministère du prêtre. Cela a commencé avec l’homélie du dimanche 15 juillet et se prolonge avec divers textes permettant de comparer la position du prêtre au XIXe et au XXIe en passant certes par le XXe, Nous assistons aujourd’hui à un nouveau sacramentalisme de la part de certains jeunes prêtres. Tout ce dont Antoine Chevrier ce serait défendu.


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Si, à son époque, il fallait sortir d’un visage sacerdotal trempé dans la spiritualité développée, par exemple, chez un saint curé d’Ars, aujourd’hui, toujours au nom de l’Evangile, il faut résister à son retour.


Comment cela se fait-il qu’on en soit là ? Plus que jamais au paravent, je comprends pourquoi, le fondateur du Prado parlait du « prêtre selon l’Evangile, le véritable disciple de notre Seigneur Jésus Christ ».

En 20012 !

Et pourtant, comme me l’a dit jeudi 19 juillet un confrère du Prado, il y a eu Vatican II. Avec ce concile, nous avons beaucoup d’arguments pour bien résister à une vision sacrale du sacerdoce ; mais comment « ces messieurs peuvent-ils ne pas comprendre » que le concile de Trente a été assumé dans celui du Vatican ? que ce concile est pastoral, plus que dogmatique ce dont l’Eglise a essentiellement besoin désormais. Être prêtre selon Jésus Christ, ce n’est pas seulement être au service des sacrements diffusés dans le cadre paroissial (territoire). Il y a mission presbytérale dans toute forme de proximité non pour que les ouvriers obéissent mieux à leur patron, mais pour qu’ils vivent heureux, épanouis. Nous nous rappelons cette phrase d’Antoine Chevrier ayant avec l’accord de l’évêque quitté le ministère paroissial à Saint-André et travaillant à la toute nouvelle maison du Prado, salle de bal devenue lieu de formation humaine et spirituelle, voire religieuse dans le christianisme. « Ces messieurs ne peuvent deviner le motif qui nous fait agir et ne voient pas non plus la nécessité d'un nouveau prêtre au Prado. Ce ne sera que par une circonstance providentielle que nous pourrons habiter ensemble, mais arrive que pourra, Dieu est toujours notre Maître, il saura bien trouver le moyen de tout réunir quand il lui plaira ».

Gardien des bonnes mœurs ?

Tourné vers le sanctuaire, le prêtre au XIXe siècle demeurait marqué par une théologie développée dans une mentalité monarchique de l’Ancien Régime. Le curé de paroisse devait assumer les fonctions de gardien de la bonne morale. Il était, pensait-on, préférable que les paroissiens se rendent à l’église plutôt qu’au café, car ainsi, ils se maintenaient en état d’accomplir leurs tâches d’ouvriers sous-payées.

 

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A ce propos, n’oublions pas que N. Sarkozy développa des idées semblables, qui, heureusement, ne furent pas vraiment reçues. Avec Napoléon III, on disait qu’un curé ça vaut au moins trois gendarmes. Et nous voilà à la racine du pourquoi des églises de Saint Bernard et du Bon Pasteur sur les pentes de la Croix-Rousse à Lyon (lire ci-dessous).

Un texte que je viens de recevoir développe cette perspective.

Demain, je présenterai un article que l’auteur souhaite abondamment diffusé. Il sera un complément ecclésiologique de cette brève histoire du Bon Pasteur dans le quartier des Canuts sur les pentes de la Croix Rousse à Lyon.

Avant de laisser la parole à Claude Vigoureux, il me faut préciser que je viens de recevoir des personnes qui se lamentent que la Mairie de Lyon n’assume pas ses responsabilités face à un patrimoine qui leur fait aimablement prêté au bénéfice de l’école des Beaux Arts et que, curé, les Beaux Arts n’étant plus ici, j’aurais bien aimé utilisé avec la participation des habitants pour en faire un centre cultuel et culturel. On me fit alors savoir que selon la loi, ce ne pouvait être utilisé qu’à usage cultuel. Pour l’instant, le vide laisse place aux squatts et aux dégradations conséquentes. Désormais les beaux vitraux du XIXe et du XXe sont menacés de l’intérieur de destruction.


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Article donné en septembre 2011 à « Mosaïques », bulletin de liaison du secteur pastoral de Beaujeu (Rhône) par Claude Vigoureux.

Une personnalité beaujolaise oubliée : Mgr ]ean-Baptiste-Irénée CALLOT (1814-1875)

Quel rapport existe-t-il entre le Beaujolais et l'Algérie ? Avant 1962, « Le vin! » pouvait-on répondre, puisque les vignes de la plaine de la Mitidja fournissaient abondamment le marché français... Il existe un autre lien, méconnu1, d'ordre historique et spirituel, en la personne d'un enfant de Beaujeu, devenu prêtre du diocèse de Lyon, avant d'accéder à l'évêché d'Oran dont il fut le premier titulaire.

Jean (Baptiste Irénée) Callot naquit à Beaujeu le 23 novembre 1814, fils de Benoît, marchand de vins, et d'Elisabeth Saint-Maurice. Le baptême eut lieu le lendemain en l'église Saint-Nicolas, ses parrains et marraines étant le maire de la commune des Etoux et son épouse, Jean et Marie Claitte2. Après de brillantes études aux séminaires de Saint-Jean et d'Alix, puis à l'institution des Chartreux de Lyon, il fut ordonné prêtre en 1838. Devenu professeur de théologie et de droit canon aux Chartreux, sous la direction de l'abbé Mioland (qui devait devenir archevêque de Toulouse), l'abbé Callot développa en parallèle un zèle pastoral, confessant, visitant les pauvres et les malades, réorganisant des œuvres pieuses (dont l'accompagnement moral et spirituel des ramoneurs savoyards). Lors du concile provincial de Toulouse (1850), il fut l'un des conseillers écoutés des évêques.

Six ans plus tard, il quittait l'enseignement pour l'apostolat, toujours à Lyon, devenant curé de la paroisse nouvelle du Bon-Pasteur, dans le quartier ouvrier de la Croix-Rousse. Son dévouement et son activisme lui gagnèrent les cœurs de ses paroissiens, qui lui offrirent sa crosse d'évêque. Car le 22 septembre 1867, il était sacré évêque d'Oran, l'empereur Napoléon III ayant créé dans les possessions françaises d'Algérie deux nouveaux évêchés, Oran et Constantine. Sacré dans la primatiale de Lyon le 22 septembre par l'archevêque d'Alger (Mgr Lavigerie), Mgr Callot prit possession de son diocèse le 21 octobre. Là-bas, il se révéla un organisateur infatigable, établissant de nouvelles paroisses, augmentant son clergé, embellissant sa cathédrale (il remplaça l'orgue de facture espagnole par un instrument commandé au facteur lyonnais Merklin), fondant des écoles... En 1868, une famine décima les populations arabes. Mgr Callot, qui parcourait son diocèse sans se ménager, recueillit près de 1800 orphelins, qu'il tâcha d'éduquer, d'instruire et d'évangéliser. En 1873, il inaugura la basilique de Santa Cruz, sur la montagne de Santa-Cruz qui domine Oran et la Méditerranée, là où avait été édifiée autrefois une petite chapelle dédiée à la Vierge : il fit édifier une tour surmontée d'une statue copiée sur celle de Fourvière.

En 1870, l'évêque d'Oran participa au Concile Vatican 1er, manifestant une réticence à l'adoption du dogme de l'infaillibilité papale, auquel il se soumit pourtant. Mgr Callot n'eut de cesse de trouver des subsides pour subvenir à ses œuvres diverses, n'hésitant pas à venir « quêter » en France, ce qu'il fit au printemps 1875, invité au sacre de Mgr Thibaudier, premier évêque de Saint-Etienne : il fit des quêtes et des sermons de charité, tant à Marseille, à Lyon qu'à Paris. Mgr Callot retourna en Algérie pour la Fête-Dieu, et par des chaleurs torrides, effectua des visites pastorales qui ruinèrent sa santé. Il revient en France pour se soigner, et malgré une cure à Aix-les-Bains, il arriva malade à Beaujeu, où son frère l'hébergeait dans sa propriété des « Malfaudières ». Atteint d'une « fluxion de poitrine », il devait succomber le 1er novembre, après avoir reçu les derniers sacrements de Mgr Thibaudier.

La messe de funérailles du premier évêque d'Oran eut donc lieu à Beaujeu, dans l'église où il avait été baptisé 61 ans plus tôt, et son corps fut rapatrié en Algérie pour être inhumé dans la cathédrale Saint-Louis3

Que reste-t-il de la mémoire de Mgr Callot ? En Algérie demeure les restes de ce qui fut sa cathédrale, dont la façade était ornée du blason de l'Evêque4; le monument tombant en ruines depuis l'Indépendance5. Quant à la basilique de Santa Cruz, elle veille toujours sur la ville, ayant été récemment classée comme monument remarquable par les autorités municipales...

 

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A Beaujeu, la maison de son frère, « Les Malfaudières »6, conserve deux dessus de portes peints, représentent d'une part la Vierge de Santa-Cruz et d'autre part la montagne éponyme, témoignant ainsi de l'attachement de Mgr Callot pour son diocèse d'Oran ; tandis que dans la proche chapelle dite « du Château », située au-dessus de l'ancienne propriété des Callot et dont elle était le caveau funéraire, on distingue encore, sous une lucarne, une peinture de ses armoiries7...

 

Claude Vigoureux

 

 

1 Il ne figure pas dans le Dictionnaire du monde religieux dans la France contemporaine, publié en 2001. 2 Acte retrouvé grâce à l'obligeance du père Rémy Forissier, curé de Beaujeu.

2 Acte retrouvé grâce à l’obligeance du père Rémy Forissier, curé de Beaujeu.

3 Qui devait être ravalée au rang d'église paroissiale après la construction de la nouvelle cathédrale en 1913.

4 « Mi-parti : au 1er, de gueules au lion d'argent ; au 2e, d'or au palmier arraché de sinople ; au chef d'azur, à une étoile rayonnante d'argent, chargée d'un cœur de gueules ». Devise : Veritatem charitate facientes.

5 Quel sort a-t-il été réservé après 1962 aux sépultures des évêques ?

6 Qui deviendra au XXe siècle la résidence du graveur Philippe Burnot.

7 Qui intègrent, dans son cartouche, la croix de la Légion d'honneur.

Publié dans Eglise

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