Un crucifix dans l'urine !

Publié le par Michel Durand

Je reçois encore, de divers lieux, des articles sur ce sujet. Je me suis abstenu de tous les publier et je continue à me poser la question de l’opportunité de les faire connaître.

Si je les diffuse ici, c’est avant tout parce que, d’une façon ou d’une autre, ils constituent un dossier appréciable pour l’étude d’une très vieille question ; la rencontre de la foi et de la culture, l’union ou la désunion de l’art et du religieux. Autant de thème que je souhaite aborder au cours d’un débat pendant la 8ème biennale d’art sacré actuel

 

 

Vendredi 22 Avril 2011 : La croix du Nord, FORUM

 

LE BLOC-NOTES DU PÈRE BERNARD PODVIN

 L'exposition de la photo d'un crucifix trempé dans l'urine suscite une vive et légitime réaction, tandis que plus d'un milliard d'hommes dans le monde célèbrent la passion ! Ça se passe en Avignon ; tout le monde en parle. On assiste à un dialogue de sourds entre ceux qui défendent la liberté de créer, et ceux qui pourfendent le droit de l'exposer dans un musée.

Ni l'obstination des auteurs ni la violence répressive ne sont la juste voie. L'art s'honore quand il n'offense pas. L'indignation s'honore quand elle est non violente ; il faut aimer l'art qui fait grandir, pas quand il divise à ce point. Ces messieurs de la culture nous disent : « Ne soyez donc pas primaires. Ne faites pas une lecture littérale de cette oeuvre. C'est une métaphore ! » nous prend-t-on pour des abrutis ? Ce qui choque n'est pas qu'on utilise la croix dans l'art. Cela se fait depuis des siècles. Ce qui choque, c'est de ne pas entendre que, ici en l'occurrence, cela choque ! Malheureusement, des commandos intégristes desservent cette cause, sans doute parce que la communauté chrétienne n'est pas assez ferme et présente à ce « débat ». Afin d'user d'arguments clairs et nets. Mais toujours dans la douceur d'Évangile ! Ainsi donc, en plein jours saints, on porte offense à ce que nous avons de plus précieux. Les archevêques d'Avignon et de Lyon se sont exprimés en ce sens. Le Christ en son chemin de croix sait le poids de l'opprobre. il n'a de cesse qu'une publicité tapageuse soit faite à une... « métaphore » de sa croix. son agonie livrée jusqu'au bout par amour n'a rien de « métaphorique ! »

Relire les Évangiles de sa passion, c'est communier à ses souffrances dans l'aujourd'hui du monde. « Voici le bois de la croix qui a porté le salut du monde » chantent les croyants chaque vendredi saint. Rappelons-le : cette « oeuvre » controversée n'est pas exposée depuis seulement huit jours. et ne le fut pas seulement en Vaucluse. pourquoi avoir tardé dans un dialogue exigeant ? Cette surenchère n'est pas neutre. Au-delà de cette pénible affaire, creusons de toute urgence le lien vital entre la culture et la foi. Des artistes croyants doivent être soutenus. Une culture d'art sacré manque cruellement à la base. De jeunes talents sont à détecter. La nouvelle évangélisation doit aussi passer par l'art. non comme instrument. Mais comme porteur du mystère qui passe infiniment l'homme. « On comprend, reconnaît le ministre de la culture, que ce crucifix dans l'urine puisse choquer certains publics. » euphémique reconnaissance d'une vive blessure !

Méditons cette hymne de l'inoubliable père Didier Rimaud. s'il en est un qui conjuguait avec profondeur l'art et la spiritualité, c'est bien lui. sa prière litanique nous recentre au coeur du Christ : « Pour ton Corps d'innocent humilié, béni sois-tu ! Ton Corps de Dieu où les faibles sont forts, béni sois-tu ! Pour ton Corps qui n'est rien qu'une plaie, béni sois-tu ! Ton Corps de Dieu où se brise la haine, béni sois-tu ! Pour ton Corps tout couvert de crachats, béni sois-tu ! Ton Corps de Dieu qui grandit parmi nous, béni sois-tu ! Pour ton Corps condamné à mourir, béni sois-tu ! Ton Corps de Dieu où l'Amour est plus fort, béni sois-tu ! Pour ton Corps abattu de tristesse, béni sois-tu ! Pour ton Corps de Dieu crucifié par Amour, béni sois-tu. Béni sois-tu pour ton Corps ! Béni sois-tu pour ton Sang qui consacre le monde. »

On a bien compris le sens de la réaction des chrétiens dans l'offense qui est faite à la Croix du Christ. Je conclus par ce point fondamental : si les chrétiens vénèrent la croix plus que tout, ce n'est pas pour défendre « leur » propriété. C'est précisément parce qu'elle n'est propriété de personne. C'est donc bien plus que les chrétiens que l'on blesse.

 

Dans la bibliothèque de Confluences-Polycarpe se trouve le livre "L'Eglise et l'art d'avant garde",  2002. J'en parlerai.


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