Un critique précoce de la technique : Jacques Ellul

Publié le par Michel Durand

Pour nous préparer à la rencontre de samedi : Sortir de la crise en lisant Jacques Ellul : Voir ICI,

cette page de "A la gauche du Christ" rencontre toute son importance.


Christlemonde.jpgvoir ici lemonde.fr

 

 

Engagé, dans la lignée d'Esprit, dans la nébuleuse des « non-conformistes » des années 1930, proche des diffuseurs du barthisme en France au sein du mouvement étudiant protestant et de sa revue Le Semeur, Jacques Ellul (1912-1994) publie en 1934, avec Bernard Charbonneau, des Directives pour un manifeste personnaliste. Elles s'inscrivent dans l'orbite de la révolte radicale contre le « désordre établi » commune aux personnalistes et aux non-conformistes, mais elles ont l'originalité d'incarner une logique déjà « écologiste ». Car ces « directives » insistent sur l'emprise du facteur technique dans la critique de la modernité et sur l' « illusion politique ».

Pensée et action ne sont pas séparées chez Ellul. Antifasciste dans l'avant-guerre puis résistant, il devient adjoint au maire de Bordeaux à la Libération, en 1946. Il rompt avec Emmanuel Mounier en 1950 sur les orientations thomistes du personnalisme et le rôle du politique. Le marxisme l'inspire, mais il le conçoit immédiatement comme dépassé. Il s'engage au Conseil national de l'Eglise réformée de France (ERF) de 1950 à 1970. Son ouvrage de 1963, Fausse présence au monde moderne, est une contestation de droite du courant progressiste au sein du protestantisme français. Il dirige Foi et vie, revue de culture protestante d'inspiration barthienne, de 1970 à 1987, et préside de 1970 à 1987 un mouvement écologiste : Défense de la côte Aquitaine.

Agrégé d'histoire du droit, Jacques Ellul enseigne cette matière et rédige une monumentale Histoire des institutions en cinq volumes, dont le premier paraît en 1955. Son œuvre immense (43 ouvrages, traduits en plusieurs langues) lui donne une aura prophétique. Ellul développe sa réflexion autour du « phénomène technique » et de son impact social (Technique ou l'enjeu du siècle, 1954, et Système technicien, 1977). Son refus de la croyance dans le progrès technique, croyance commune aux marxistes et aux libéraux, le conduit à dénoncer l'aliénation sous l'empire d'un « système technicien ». Critique du productivisme et des dérives de la modernité, ce théologien laïque propose les prémices d'une pensée écologiste qui plonge ses racines dans la foi calviniste.

Devenu une figure inspiratrice des mouvements américains de contestation de la société de consommation, il irrigue alors une partie des chrétiens de gauche français par ses critiques de la dévastation de la nature, des aspects liberticides du développement technique qui entraînent la disparition brutale des traditions.


Frédéric Gugelot, A la gauche du Christ, Seuil, septembre 2012, p.223

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B
<br /> Sur quels critères les auteurs de ce livre se basent-ils pour affirmer que Jacques Ellul était un "chrétien de gauche" plutôt qu'un chrétien dont l'engagement trouvait sa source dans les<br /> Evangiles?<br /> <br /> <br /> Ellul s'est-il revendiqué lui-même de la gauche?<br />
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M
<br /> <br /> EEn répondant un poste précédent je devais penser à celui-ci. Un chrétien n'est, en soi, ni de droite, ni de gauche. Il est du<br /> Christ. Nombreux articles ces derniers jours pour parler des chrétiens qui sont engagés dans le monde, les classent à gauche. Une façon de parler, je l'accorde, pas très heureuse.<br /> <br /> <br /> <br />