Le réchauffement de plus en plus inquiétant de la terre constitue une sorte d’ultimatum auquel il faut répondre sans plus tergiverser
J’estime important de donner à lire l’appel recopié ci-dessous. Mais en même temps je me dis que c’est trop long, trop bavard, trop rebrousse poils…
J’avais déjà ce sentiment avec le Tocsin. N’empêche que les propos de Yves Urvoy-Roslin méritent d’être lus et étudiés. Il importe que l’Institution Église entre pleinement dans la réalité de la nécessaire décroissance.
Yves me donna son livre Le Tocsin, société des écrivains, en 2011 à l’occasion du colloque Objection de croissance et christianisme.
Il dédicaça son ouvrage de ces mots : « au père Michel, chez qui je trouve un écho à mes préoccupations, avec toute ma sympathie ».
Ayons le courage d’aborder l’appel (Supplique au pape François) afin de le concrétiser au quotidien. J’écris cela en pensant à l’action que nous conduisons à quelques un.e.s sur le territoire paroissial Saint-Maurice/ Saint-Alban.
Je redis : prendre le temps, avec courage, de lire cet appel devrait inviter à l’action. Il importe que d’une façon ou d’une autre, plus simplement, la question de l’avenir de la Maison Terre soit concrètement posée.
De quoi est-il question ?
Du milieu des objecteurs de croissance, donc, je reçois cet appel rédigé par Yves Urvoy-Roslin. Je le situe dans la trajectoire des séminaires que nous avions organisé à Chrétiens et pic de pétrole.
Yves Urvoy, auteur de Requiem pour César, a rédigé ce projet d'appel à destination des écologistes chrétiens.
Yves s’interroge continuellement sur le rôle de l’homme dans le changement climatique. Une partie de ses réflexions sur ce sujet est consignée dans Le Tocsin, publié par la Société des Écrivains en 2011 et Une affaire d’honneur paru en 2015 aux éditions Persée.
Son ouvrage Requiem pour César propose une réflexion percutante sur les enjeux environnementaux. Dans un style direct et incisif, Yves Urvoy-Roslin fait une analyse des questions existentielles en s’appuyant sur des penseurs réalistes tels que René Girard et Philippe Muray. Leurs voix dénoncent l’idéalisme naïf et l’inaction de l’Église de France, des structures administratives et de certains intellectuels face aux dérives de la société moderne, dominée par un matérialisme croissant. Il pose également un regard critique sur l’État libéral suivant deux approches : la sociologie et la théologie.
Supplique au Pape François
Appel du 4 octobre 2024
Le gigantesque processus, quoique résultant d’activités humaines, continue de dominer les hommes et de leur imposer sa logique.
Le Pape François, tout au long de son pontificat, fournit à l’humanité une analyse chirurgicale, un descriptif éclairant, au sujet de l’effet socialement destructeur d’un paradigme techno / logique / cratique / économique. C’est toute la vie humaine qui se délite, une forme d’effondrement, d’implosion qui atteint les richesses (naturelles) culturelles des peuples, l’art, la poésie, la vie intérieure et la spiritualité, toutes les formes de sagesse y compris la religieuse (cf LS §63)
Le réchauffement de plus en plus inquiétant de la terre constitue en outre une sorte d’ultimatum auquel il faut répondre sans plus tergiverser, en allant à la racine des choses. C’est le message essentiel de l’encyclique Laudato si, en cohérence avec l’enseignement constant du Successeur de Pierre au long de son pontificat.
Presque dix ans après Laudato si, un an après Laudate Deum, force est de constater qu’une fraction majoritaire de l’Eglise de France se considère à l’extérieur de cet enseignement, elle le juge inhabituel, hors de ses compétences, marginal. C’est patent au plus haut niveau : entre Rome et la hiérarchie de l’Eglise, chez nous, c’est une rupture masquée. Ainsi, l’annonce par le Pape en 2020 d’une année Laudato si, est passée inaperçue et force est de constater que, maintenant, le cri d’alarme lancé par Laudate Deum, n’a pas soulevé le moindre clapotis sur la mare d’une omerta compacte, depuis un an. C’est un triste premier anniversaire.
C’est un sujet compliqué et gênant sur lequel en réalité on n’a pas le temps de s’appesantir ; alors on en fuit l’urgence en édulcorant, en relativisant, en ratiocinant, en contournant voire même en refusant et contredisant. Un ensemble précis et concordant d’indices, a pour effet une forme de désincarnation, un refuge dans le spirituel, pour ne pas avoir à regarder de près un mode de vie dont les premières victimes sont la terre et les pauvres. L’espèce d’ultimatum qui s’impose à l’égard de nos habitudes et pratiques indécrottables est irrecevable dans ce contexte.
Cela fait donc un an qu’au jour dédié à Saint François d’Assise, le Pape adressait aux hommes de bonne volonté une exhortation véhémente à propos de l’évolution dramatique de la crise climatique. Il y dénonçait le mauvais accueil fait à Laudato si, à cause de l’aveuglement où conduit le paradigme techno-économique ou technocratique, et de la faiblesse de la politique internationale qui s’ensuit.
Il ajoutait aussi une dénonciation très inusitée dans la communication du Vatican : il se trouvait contraint de revenir sur son Encyclique à cause de certaines opinions déraisonnables et méprisantes au sein même de l’Eglise catholique. Le constat a-t-il été réceptionné par ses destinataires ? Y-a-t-il eu le moindre débat à ce propos, le moindre questionnement ? N’y a-t-il pas sujet à examen de conscience, et pour certains, à repentir ?
Les Evêques de France ont attendu quatre ans après la sortie de Laudato si, pour organiser des débats trois années consécutives. Des colloques lors des assemblée pleinières de la conférence des Evêques de France, la CEF. En mai 2023, un gros recueil de 353 pages est édité pour en rendre compte, avec une introduction de Mgr de Moulins-Beaufort, Président de la CEF. Celui-ci fait un aveu révélateur : c’est une réflexion insuffisamment aboutie qui nous est ici livrée (p 10).
① Olivier Rey. L’idolâtrie de la vie (Tracts Gallimard 2020)
② Yves Urvoy-Roslin Requiem pour César (Le Lys Bleu – 04-2024)
Ainsi ce gros ouvrage, titré Ensemble pour notre terre, les évêques de France s’engagent au service de l’écologie intégrale, n’a répercuté que très tardivement, et de façon inaboutie, l’enseignement très abouti du Pape !
Il faut examiner l’affaire d’un peu près, c’est ce que se propose de développer le présent appel au Pape. Pourquoi donc les Evêque de France se révèlent-ils, de leur propre aveu, impuissants à relayer les objurgations constantes du Pape à propos de la crise globale ?
Ce document consistant de la CEF consigne divers retours de participants qui donnent un éclairage sur ce fiasco : A mes yeux, il manquait l’essentiel : la conversion, qu’elle(s) conversion(s) pour entrer dans une vie qui prenne soin de la maison commune ? (p 286). A mon avis, il manquait les perspectives pour changer de système ; il n’y a eu aucune critique du système dominant, la seule question était comment le faire évoluer ou en réparer les dégâts (p 287)
En réalité tout en simulant l’engagement, l’épiscopat tourne le dos ; la politique de la chaise vide s’ajoute à celle de l’autruche ; la désertion se superpose au déni et le tout constitue, en premier lieu, une trahison à l’égard de la littérature elle-même. Ce véhicule essentiel de la pensée, victime d’une attaque sans précédant dans l’histoire humaine, est en cours d’effondrement partout, et nous, catholiques, prenons des pincettes à l’égard de la grande et belle œuvre littéraire que constitue, d’abord, l’ensemble de réflexions profondes et cohérentes déroulées tout au long du pontificat par notre dernier Pape. Cet ensemble marqué par la force, la simplicité, le sens des choses concrètes, fruits d’un savoir-faire inspiré, est accueilli (quant il l’est) dans des commentaires précautionneux, sorte de moues dubitatives : n’est-ce-pas un peu abrupt ? ① Plutôt que la sauvegarde, ne serait-il pas plus comestible de dire le soin ? Ça ressemblerait mieux au care de nos amis anglo-américains ? et puis toujours ce leitmotiv totalement contradictoire avec l’encyclique : il ne faut pas être catastrophiste.
Le plus époustouflant, dans cet engagement des Evêques au service de l’écologie intégrale, c’est qu’on n’y trouve rien, pas un seul mot sur 353 pages, à propos des NTIC, du tout écran avec la fabrique du crétin digital, promue et boostée par l’invasion barbare d’une prétendue intelligence artificielle…
Selon la formule même du Président de la CEF, aucun engagement concret n’est pris, à l’occasion des débats. La métaphore de Bernanos, qui analysait la postérité de François d’Assise, s’ajuste ici à merveille : Le colonel, sabre au clair, franchit le parapet en criant : Avanti ! Et le régiment (le régiment français, en l’occurrence) reste tapi au fond de la tranchée, pétrifié d’admiration devant tant de vaillance, la larme à l’œil, battant des mains et criant : bravo, bravo, bravissimo !
Le Pape remet les couverts écologiques (…) Il est urgent de relire cette encyclique qui constitue un des textes politiques majeurs du XXI siècle et qui n’a pas reçu l’impact qu’il mérite. C’est ainsi que s’exprimait une revue belge de bonne tenue KaÏros (revue sœur du mensuel lyonnais La Décroissance) en 2023 à la sortie de Laudate Deum.
Cette publication non confessionnelle apprécie le texte papal dans sa portée politique universelle. Les chrétiens peuvent-ils encore se considérer non concernés ? Cette question se pose dramatiquement et nécessite en premier lieu un retour aux textes, à l’enseignement proposé par les deux ouvrages, parties constitutives d’une œuvre littéraire et politique essentielle de ce premier quart de siècle : Laudate Deum, Laudato si.
① toutes questions trouvées dans les préfaces épiscopales
Chapitre 1 - Laudate Deum. La crise climatique globale empire, et la réponse politique est loin d’être à la hauteur.
La crise climatique globale, hypothèque gravement les conditions de vie de l’humanité et son avenir.
Le Monde qui nous accueille s’effrite et s’approche peut-être d’un point de rupture ( § 2), cette notion de la proximité d’une rupture, déjà exprimée dans Laudato si, revient dans ce nouveau texte. Le Pape s’appuie sur l’opinion d’une écrasante majorité des spécialistes du climat et des glaciologues. Ils craignent l’effet d’interactions ou de rétroactions difficilement mesurables à l’avance, une cascade d’évènements provoquant un effet de boule de neige. Il y a ici une raison impérieuse et notre Pape entend alerter vivement tous les hommes de bonne volonté. Il faut que cessent les résistances et les confusions (…) on ne peut plus douter de l’origine anthropique du changement climatique (§ 11). Il entre dans le vif du sujet : L’accélération est si inhabituelle (…) qu’il suffit d’une génération – et non des siècles et des millénaires – pour le constater. L’élévation du niveau des mers et la fonte des glaciers peuvent être facilement perceptibles à une personne au cours de sa vie.
Cela fait donc partie de notre quotidien immédiat, avec la multiplication des phénomènes extrêmes. Tout est sous nos yeux et le Pape déplore que cela ne semble pas accéder à l’entendement, dans les instances internationales, mais aussi qu’il se heurte, au sein même de l’Eglise, à certaines opinions méprisantes et déraisonnables.
Examiner le double échec du grand texte de l’encyclique Laudato si, c’est constater avec le Pape la faiblesse de la politique internationale et un aveuglement dû au paradigme technologique, cette manière de comprendre la vie et l’activité humaine qui contredit la réalité jusqu’à lui nuire. Ce paradigme ne nous permet pas de voir le grave problème qui affecte aujourd’hui l’humanité, et par surcroît, maintenant, avec la déferlante de l’intelligence artificielle s’alimente lui-même de façon monstrueuse (§ 39).
Pour ces raisons nous sommes devenus extrêmement dangereux, capables de mettre en danger la vie de beaucoup et ainsi notre propre survie. Citant Vladimir Soloviev, le Pape évoque un siècle tellement avancé qu’il risque d’être le dernier, et c’est pourquoi : nous devons tous repenser la question du pouvoir humain, de sa signification et de ses limites, formule qui rejoint la pressante recommandation de Laudato si : il devient indispensable de créer un système normatif qui implique des limites infranchissables et assure la protection des écosystèmes, avant que les nouvelles formes de pouvoir issues du paradigme techno-économique ne finissent par raser non seulement la Politique, mais la Liberté et la Justice (§ 53).
Poser des limites, le Pape l’a aussi associé concrètement dans l’encyclique à marquer une pause, voire un retour en arrière (…) accepter une certaine décroissance (§ 193). Ces notions imprononçables, clouées au pilori d’une bien pensance et d’une langue de bois, qui excommunient toute idée de cette catégorie, qualifiée de punitive.
L’examen approfondi que fait le Pape du processus des conférences sur le climat se conclut de façon imagée très éloquente : nous courons le risque de rester enfermés dans la logique du colmatage, du bricolage, du raboutage de fil de fer, alors qu’un processus de détérioration que nous continuons d’alimenter se déroule par en dessous.
Il fait des recommandations : en finir, une bonne fois pour toute avec les moqueries irresponsables, qui présentent le sujet comme étant uniquement environnemental, « vert », romantique, souvent ridiculisé par les intérêts économiques § 58). Ensuite il faudrait des mesures efficaces, contraignantes, contrôlables, dans un nouveau processus radical. C’est ce qui doit émerger de la prochaine COP 29 – Cela n’est pas parvenu sur le chemin parcouru jusqu’ici, mais ce n’est que par un tel processus que la crédibilité politique internationale pourra être rétablie et qu’il sera possible de réduire notablement le dioxyde de carbone, et d’éviter à temps les pires maux (§ 53 et suivants).
Le Pape est trop lucide, trop près des drames qui prolifèrent pour se faire des illusions, mais jusqu’au bout se force à espérer : Dire qu’il n’y a rien à espérer serait un acte suicidaire, affirme-t-il en un volontarisme ultime : nous ne pouvons renoncer à rêver (sic) que cette Cop conduira à une accélération marquée de la transition énergétique avec des engagements effectifs susceptibles d’un suivi permanent… Accélération hautement improbable, comme en atteste une information toute récente : l’organisateur pétrolier de cette Cop 29 profiterait de ces rencontres pour signer des contrats de nouveaux gisements pétrolifères ou gazier (cf : émission débat-doc sur LCP du 11.09.2024).
Chapitre 2 – Une réflexion cohérente tout au long du pontificat
C’est en premier lieu l’exhortation La joie de l’évangile initiée par Benoît XVI, mais dont le Cardinal Bergoglio était le principal rédacteur, où s’exprime d’ores et déjà la révolte contre le fétichisme de l’argent et le règne de l’économie sans visage ni but véritablement humain, vis-à-vis desquels tout ce qui est fragile comme l‘environnement, reste sans défense par rapport aux intérêts du marché divinisé transformés en règle absolue.
Chaque fois qu’il s’exprime ensuite, le Pape François parle haut et fort : Nous ne pouvons plus le supporter, nous ne le supporterons plus proclame-t-il à propos de la situation des pauvres en Amérique Latine. Il faut entendre La clameur de la terre et des pauvres. Nous nous devons de prendre une douloureuse conscience, de faire une souffrance personnelle, de ce qui se passe dans le monde (§ 19. Laudato si)
Le leitmotiv tout est lié, tout est relié, renvoie à contrario au fait que l’humain est précisément aujourd’hui individualiste, hostile à tout engagement, privé de la compréhension d’une histoire, sa propre histoire dont il se coupe, dont il se délie. La dénonciation du paradigme technologique, qui isole et sépare l’économie, du monde naturel et la fait se développer contre lui, est une condamnation d’ordre anthropologique.
Le Pape François s’attache avec constance à renouveler l’approche historique de cette question parce qu’il devient manifeste que l’Eglise doit corriger la trajectoire où elle s’est engagée à l’époque industrielle. Un ajustement est nécessaire, la position n’est plus tenable. On ne peut plus continuer de dire : l’Eglise n’est pas compétente, elle n’a pas vocation à se prononcer sur ces questions, de se mêler de solutions techniques. L’outil est neutre, il suffit de bien l’utiliser.
Cette solution de facilité, ces poncifs, aboutissent, dans ce monde où tout est techno et marchand, où les limites ne sont là que pour être enjambées, où nous expérimenterons tout ce qui peut l’être et où nous achèterons tout ce qu’est vendable y compris l’humain lui-même, aboutit en fin de compte à rendre la totalité à César, et surtout aux nouveaux pouvoirs plus ou moins occultes qui se substituent à lui. Au Dieu de l’Incarnation, que reste-t-il ? Rien. C’est une actualisation, et une forme d’inversion de la grande hérésie manichéenne, mère de toutes les hérésies.
Le Pape nous fait sortir de cette embardée en trois lignes décisives : Les objets produits par la technique ne sont pas neutres parce qu’ils créent un cadre qui finit par conditionner les modes de vie et orientent les possibilités sociales dans l’intérêt de groupes de pouvoir déterminés (§ 107. LS).
C’est dit avec la simplicité et le sens du concret qui sont la marque de ce saint Pape ; il révèle cela à la manière du : Le roi est nu ! du conte d’Andersen ; il nous extraie du conformisme étourdi. C’est une nouvelle feuille de route, pour l’humanité : l’écologie n’est pas un choix de vie comme un autre, ce n’est pas facultatif, ce n’est pas une idéologie. Cette feuille de route, c’est la triple réconciliation à laquelle appelait déjà Jean-Paul II en 1994, en vue du Jubilé de l’an 2000, il appelait l’humain à se réconcilier avec la création, avec ses semblables, avec lui-même.
Cette réconciliation préalable avec la création, le Pape François y a vu une pièce maitresse, pour aller à la rencontre des Eglises séparées et créer aussi des liens avec les autres religions.
L’heure est venue d’accepter une certaine décroissance.
Face à l’accroissement vorace et irresponsable produit durant de nombreuses décennies, il faudra penser aussi à marquer une pause en mettant certaines limites raisonnables, et même de retourner en arrière avant qu’il ne soit trop tard (§ 193 de LS)
Il devient indispensable de créer un système normatif qui impose les limites infranchissables et assure la protection des éco-systèmes avant que les nouvelles formes de pouvoir dérivées du paradigme techno-économique ne finissent par raser non seulement la politique, mais la liberté et la justice. (§ 53. LS)
Les axes de la mise en exécution concrète, du franchissement de la frontière de l’immobilisme, sont posées clairement. C’est confirmé avec force dans Laudate Deum, qui se conclut par un appel à un changement généralisé du mode de vie irresponsable du modèle occidental.
En contrepoint de tout ceci vient la très étonnante repentance de Mgr Bruno Feillet, Evêque de Séez, qui, à partir du psaume 84 : Tu as aimé Seigneur, notre terre, ajoute : Nous te demandons pardon, car nous ne croyons pas à notre dignité autant que toi, et nous avons peur de nos limites !!! C’est à la première page du Ensemble pour notre terre de la CEF ! comment peut-on croire qu’à partir d’une telle confusion chez les pasteurs, les brebis s’engageront sur le bon chemin ?
Autre contrepoint : dans sa préface à la dernière édition de Laudato si, parue en 2020 Mgr Brunin, Evêque du Havre, pose en préliminaire : verser dans une approche catastrophiste des questions environnementales compromettrait l’exercice de la responsabilité humaine… c’est bien le ton qu’adopte le Pape François. Que fait-il donc du § 161, où l’on trouve : les prévisions catastrophistes ne peuvent plus être considérées avec mépris ou ironie (…). Le rythme de consommation, de gaspillage, de détériorations de l’environnement (…) peut seulement conduire à des catastrophes ?
Chapitre 3 - Les lendemains décevants de l’observatoire socio-politique. l’OSP.
En février 2000, un jeune évêque dynamique prend les rennes du diocèse de Fréjus-Toulon, en le dotant d’un observatoire socio-politique. Il en confie l’animation à Falk Van Gaver, jeune philosophe écrivain prometteur, réfléchissant en profondeur sur les liens de l’écologie et du catholicisme. ①
① venait d’être édité Le Politique et le sacré - viendront encore « Le ciel sur la terre, essai de théologie sauvage, et en 2017 : christianisme contre capitalisme.
Était de la partie encore Philippe Conte, ingénieur, essayiste, bon connaisseur de l’histoire de l’Eglise. Très concerné par les Eglises orientales. L’inspirateur du présent appel était là, lui aussi, déjà commençant la rédaction de son essai Le Tocsin, édité peu avant le Pour sortir de l’impasse écologique, de Philippe Conte.① Bref, une petite cohorte engagée qui vit avec joie, en 2015, surgir la grande Encyclique.
La proximité de Fabrice Hadjadj, installé à l’époque dans le Var, était, elle aussi, partie prenante dans l’orientation du nouvel évêque, qui rédigeait un opuscule Peut-on être catho et Ecolo ? avec réponse affirmative.
A la sortie de Laudato si, c’est Luc Richard qui avait remplacé Falk. Ce journaliste très concerné lui aussi par l’écologie obtint le lancement d’une grande journée de l’écologie chrétienne, propre à opérer un déclic et répondre à l’appel du Pape.
Le compte rendu de cette journée fut édité (Ed Altercathos et Peuple libre) titré de cette interrogation radicale : La catastrophe écologique, fruit pourri du capitalisme ? Document post-facé par Mgr Dominique Rey qui appelait à une urgente conversion écologique.
Luc Richard avait obtenu le concours de ténors comme Patrice de Plunkett et Olivier Rey. Participaient aussi Marie Frey, journaliste à la revue Limites, Cyril Frey ornithologue, et Thierry Jacquot, rédacteur en chef de l’Ecologiste.
Ce fut un crève-cœur de constater la participation dérisoire à ces débats : trois poignées de paroissiens, un seul prêtre sur les 250 du diocèse. Pas un seul séminariste de La Castille voisine. L’Evêque ne viendra qu’en fin de journée donner sa bénédiction. Le reste de l’histoire de l’OSP fut à cette aune, inodore et incolore, il n’a pas fait d’émules, il n’a pas essaimé, il est resté pauvre et solitaire, loin de ses racines écologistes. Il aurait pourtant pu s’épanouir, par exemple, en obtenant que le Domaine de la Castille, propriété du diocèse et siège du séminaire, un des grands domaines viticoles du Var, se convertisse au bio. C’eut été bien exemplaire de le faire sortir des circuits intégrés de l’exploitation industrielle, d’arrêter les intrants chimiques, et de le réorienter vers une certaine diversification, propice à une meilleure insertion locale.
Tout ceci n’est pas détaillé pour identifier un bouc émissaire, mais pour mieux montrer un lien disparu, celui qu’il y a toujours eu entre la culture de la terre et la culture religieuse et catholique. Une occasion, ici, a été manquée, et par surcroit, quatre ans après, les évêques en assemblée pleinière parleront pendant trois ans de Laudato si, sans faire la moindre allusion au dialogue de Toulon.
Chapitre 4 – Plusieurs aspect d’une faillite intellectuelle.
Un néologisme éclairant est fourni par le Pape François, qui affine cette recherche d’explication : La rapidacion, cette accélération continuelle des changements de l’humanité, en phénomènes rapides et constants (…) pas nécessairement tournée vers le bien de l’humanité (§ 19 de LS). C’est une nouveauté dans un perpétuel jaillissement qui désarçonne, qui engendre un effet amnésique, un archivage des épisodes qui se succèdent. C’est une sorte de pandémie, un virus particulièrement actif dans les hautes sphères y compris celles de l’Eglise. Ils ne mourraient pas tous, mais tous étaient atteints. C’est un mal qui répand la terreur.
① Féru de stratégie militaire, Philippe Conte a écrit aussi un essai : « Afghanistan, guerre lointaine », très utile exploration de ce qui est aujourd’hui à notre porte.
La littérature en est la première victime. L’Encyclique, ouvrage dense et consistant, riche de démonstrations ajustées et imagées, bel ouvrage appelant une attention soutenue, nécessitant une méditation pour pénétrer la complexité des choses, n’a en réalité été lue qu’en travers. Tout ce qui est alarmant a été oblitéré. On ne sait plus lire, et cela conduit à s’escaper dans la recherche du consensus, à évacuer toute mise en demeure. S’ensuit l’obsession du centrisme ou la peur de la radicalité ①. Ne pas choquer, être dans la mesure, la modération, le juste milieu, ne pas s’attaquer au comportement d’autrui, être tolérant. Ce centrisme évacue l’idée qu’il y a des intérêts particuliers qui doivent être sacrifiés au Bien commun, tout ceci convient parfaitement au capitalisme libéral.
On comprend mieux, ainsi, les désarmantes bifurcations du Président de la CEF dans son introduction où, après avoir dit : Laudato si a vraiment ouvert une voie nouvelle et nécessaire, il nous glisse entre parenthèses que : « des esprits affutés (sic) entreprennent de contredire le Pape », et aussi, un peu plus loin, que la conversion écologique est une idée gênante (sic) pour les catholiques…
Il fait par ailleurs d’amples préliminaires, où il se livre à un tableau idyllique de transformations en cours très prometteuses : Partout les agriculteurs se remettent en question et transforment leurs modèles …), les industriels renouvellent leurs processus de fabrication, prennent au sérieux l’économie circulaire… etc, nous brossant le décor d’un pays de rêve ; ne réalisant pas l’aspect ultra marginal de ce qu’il nous décrit ; il occulte l’alerte dramatique qui est au cœur de Laudato si.
Ce commentateur très autorisé s’engage du côté de l’effondrisme ou collapsologie. C’est très en vogue, c’est très bien accueilli maintenant ; cela permet de sortir du déni, d’accepter la réalité du réchauffement, et en même temps de rester sans réaction, puisque les processus qui sont en route s’inscrivent sur le temps long et qu’à notre échelle de temps il est illusoire d’espérer les entraver : que peut la foi chrétienne face à une telle perspective ? Rien qui puisse dévier la trajectoire de ce qui nous attend, sans doute, beaucoup quant à la manière dont nous pouvons la vivre (p12).
Tandis que le Président de la CEF expédie ainsi en souplesse un cadeau étiqueté après nous le déluge à un futur indistinct, le Pape nous engage, lui, très clairement, à ne pas rester inertes, face à une urgence telle que : nous avons tout juste le temps d’éviter des dégâts encore plus dramatiques (§ 16 L.S.)
Chapitre 5 - Au congrès extraordinaire des sapeurs-pompiers, les pyromanes mènent les débats.
Examiner la liste des participants aux colloques de la CEF, c’est continuer de mesurer l’écart dramatique entre cette structure et les messages du Successeur de Pierre. Et c’est l’éloignement où elle a choisi de se tenir, de la pensée française contemporaine, de ses grandes figures chez qui le christianisme ou catholicisme reste très vivant, et dont se veulent humblement les héritiers, les signataires de l’appel.
Ainsi voit-on à ces colloques de la CEF tenir le haut du pavé, l’ancien président de la banque mondiale, une ancienne présidente de la FNSEA, un ancien directeur des chambres d’agriculture et d’autres experts, figures de l’oligarchie profiteuse et impuissante qui accompagne le processus, ceux dont l’Archevêque Bergoglio, parlant de l’histoire de l’Argentine avec sa plume intransigeante, faisait un petit portrait sans fards : Intellectuels sans talent, et experts au service du pouvoir. Arrivistes qui, sous leurs diplômes internationaux et leur langage technique facilement interchangeable, masquent leur savoir précaire et la quasi inexistence de leur humanité (La Patrie est un don, la Nation est un devoir – Ed Paroles et silence – à propos de l’histoire de l’Argentine).
①Notions développées par Marie Frey, au fameux Dialogue de Toulon en 2015
La question essentielle de l’agriculture et de l’alimentation était à juste titre au cœur des préoccupations, mais la place faite au syndicat majoritaire qui tient en main les chambres d’agriculture et à sa botte le ministère, ne pouvait conduire qu’à cette réflexion insuffisamment aboutie. L’effondrement paysan est dû depuis plus d’un demi-siècle à un système de prime à l’hectare qui joue un rôle dévastateur, mais que s’acharnent à maintenir précisément ces invités de la CEF, qui ont péroré sans qu’on ne leur ait posé de question sur ce sujet brûlant. Ils se plaignent d’un lacis de normes qui ne sont en réalité pour l’essentiel que des palliatifs impuissants, face au système absurde qui est maintenu, de l’extension sans fin des surfaces. Ces experts se plaignent des conséquences dont ils chérissent la cause, contradiction de plus en plus vivace dans ce monde envahi de folie technique et où un management déchainé échappe à tout contrôle (comme dit Philippe Muray).
Une association paysanne, initiatrice des journée paysannes autour de l’Eucharistie, à l’occasion du jubilé de l’an 2000 avait adressé une supplique à l’Eglise ; se tournant, disait-elle, vers sa mère, pour lancer un cri de douleur à propos du drame paysan. Des religieux avaient participé à la rédaction d’une importante enquête, dont il résultait un réquisitoire très charpenté contre l’agriculture industrielle.
En 2017, Fabrice Hadjadj participait et animait ces journées paysannes, en une série de brillantes conférences publiées sous le titre : L’agriculture, art majeur pour la renaissance au XXI siècle.
Que cette association n’ait pas participé au débat, que les rapports qu’elle a produits ne figurent pas dans le dossier de la CEF, laisse pantois.
Un parallèle s’impose avec l’échec programmé des conférences successives sur le climat, leurs grandes ambitions affichées, happening inconséquents, montagnes accouchant d’une souris. Marie Frey, au colloque de Toulon en 2015, évoquant le mécénat de ces Cop par les grands groupes : Renault Nissan, Engie, BNP Paribas et consorts, raccourcissait l’exposé en une piquante formule : Les pyromanes sont les mécènes des congrès extraordinaires des sapeurs-pompiers.
C’est manifestement ce modèle qui a inspiré les organisateurs des débats de la CEF, où les pyromanes paradaient et, peut-être, sans mettre même un sou à la quête…
Chapitre 6 : Un monde définitivement aboulique ?
C’est la question ultime, c’est le dernier retranchement de l’intelligence, où il faut s’ancrer coûte que coûte, en décidant de façon très terre à terre que la solution est à notre portée, et que nous n’allons surtout pas la renvoyer à la débandade, à l’abdication anthropologique, d’une prétendue intelligence artificielle algorithmique.
Le Notre Père (….) que votre volonté soit faite sur la terre comme au ciel, ne peut en aucun cas cohabiter avec le « No alternative » de la célèbre et malfaisante premier ministre Margaret Thatcher, ce « gigantesque processus », comme dit Olivier Rey, qui, quoique résultant de l’activité des hommes, domine les hommes et leur impose sa logique, formule qui est dans la ligne de la vision prophétique de ce théologien martyr des nazis qu’était Dietrich Bonhoeffer : La chose, le monde, domine l’être humain. Il est prisonnier, esclave du monde. Sa domination n’est qu’illusion car c’est la technique qui est la force par laquelle la terre saisit l’être et le soumet. C’est parce que nous ne dominons plus que nous perdons pied, que la terre n’est plus nôtre terre, c’est pour cela que nous devenons de plus en plus étrangers à nôtre terre.
Ce TINA : There is no alternative, cette « tiny solution », passage étroit en forme d’inversion diabolique de l’autre porte étroite, celle de l’accès au royaume des cieux, nous en mesurons tous les jours l’effrayante efficacité destructrice : le monde impuissant, qui prétend s’être attribué ces deux exclusivités divines que sont l’instantanéité et l’ubiquité, contemple en ce moment, ici et maintenant, l’œil écarquillé, médusé, l’effet annoncé de longue date par d’innombrables Cassandres, de la bombe non pas atomique mais climatique, en une énorme « goutte froide », très grosse goutte en effet, qui décrète « ex abrupto » un désert de boue, à la place d’un village ou d’un quartier, en déversant sur chaque hectare de surface terrestre de l’ordre de 3 à 5000 tonnes d’eau en une journée à peine ; le plus percutant de ce spectacle de désolation est l’entassement d’une « casse » gigantesque de tous véhicules et engins gourmands de pétrole, dans une sorte de bouclage de la démonstration d’une économie intégralement circulaire (c’est bon pour le bâtiment et l’industrie automobile) et intégralement suicidaire.
La citation ci-dessus de Bonhoeffer remonte à 1930, et nous fait percevoir la continuité de la meilleure littérature d’obédience catholique. Nous la trouvons, cette citation, en effet, dans l’Université du désastre de Paul Virilio (Galilée 2007), qui a si bien élucidé tout ce dont il s’agit, que l’on ne peut que le copier et marcher dans ses pas d’une pénétration conceptuelle assistée d’une immense richesse lexicale. Le néologisme du Pape évoqué ci-avant de « Rapidacion », résume puissamment ce dont Virilio est le théoricien : cette accélération qui affecte désormais la vie terrestre (transports et télécommunications) imposant une science que le philosophe Virilio baptise « Dromologie » (en grec ancien science de la vitesse) et dont il est le maître fondateur. Nous avons rendu les villes inhabitables et la circulation habitable, nous dit Virilio, c’est le peuplement d’un transit avec lequel nous sommes dans la crise du lieu comme du lien, qui se traduira par la croisière au long cours des exilés climatiques, des ouvriers déplacés par l’internationalisation des profits, des prolétaires flottant d’une région à l’autre, et des individus équipés d’ « emportables ». Il faut envisager la fin de la sédentarisation et le début d’une grande déportation. C’est une situation sans précédent dans l’histoire.
Dans une phrase d’un seul jet qui ne souffre aucune interruption, Virilio identifie un par un, et les lie entre eux dans un crescendo démonstratif, tous les éléments du drame, comme une flèche qui filerait droit au but s’enrichisserait d’énergie au long de sa trajectoire. Ainsi organise-t-il le dévoilement de cet accident majeur que représente en continu l’espèce de surprise permanente où nous sommes installés : Ainsi, de la représentation objective des faits, nous passons subitement à la présentation téléobjective d’un monde globalement accidenté par les méfaits d’une MEGACOSCOPIE qui dénature non seulement l’histoire des civilisations et de l’art, mais tout autant celles des sciences INTEMPORAINES, ci-devant victimes d’une guerre au temps, où la morphologie cède son importance coutumière à une pure rythmologie de l’homme générique, celui qui, au siècle dernier, marchait sur la lune et qui ne marche plus que dans l’image et ses chimères, celle d’une « télésurveillance » incontinente et désespérée (L’Université du désastre p 17).
Ainsi, à l’accident des substances (réchauffement, pollutions) s’ajoute un « accident des connaissances », prétention à une « exoscience », accompagnant « la quête extravagante d’une exoplanète de substitution », pour échapper à cette petite planète que nous nous appliquons à rendre inhabitable.
La prétendue transition écologique est une impasse. L’objectif de ne pas dépasser la consommation de l’année 1990 moins 5 %, nous nous éloignons tous les jours, mais cette réalité toute scientifique est contournée par le discours sur l’innovation qui va forcément nous acheminer confortablement vers le miracle d’une société décarbonée.
Cette fiction est une « exo-science », qui nous permet de faire fi des constats scientifiques, fondés sur de basiques relations de cause à effet. La science, aujourd’hui, dit Paul Virilio, « renonce à habiter l’étendue qui l’a vue naître (…) ce seul lieu connu de toute vitalité organique », dans un discours qui n’est en fait qu’une accumulation de gros mensonges, et qui vient contrebalancer et neutraliser l’inquiétant constat.
Avec Virilio, qu’il serait d’absolue nécessité de sortir de sous le boisseau, la néo-monde cybernétique est décrit avec une précision et une richesse de vocabulaire stupéfiantes, et toute contraction pour faire appréhender toutes les contradictions de l’échec du succès grandissant de la Big-science, et du basculement de la mégalomanie politique, dans la mégaloscopie d’une ubiquité tous azimuts qui poussera les différents pouvoirs à la faute, si ce n’est demain à la tragédie.
Ce discours prophétique vient en total appui, à propos de la domination du « paradigme technologique » dénoncés par le Pape François dans l’encyclique « Laudato si ». Le solutionnisme technologique est parfaitement identifié, démasqué, mais très curieusement, il entraine dans son effondrement l’idée même de solution. L’extralucidité de Paul Virilio le conduit à un pessimisme radical, qui l’entraine à considérer l’écologie, et sa dérive actuelle, comme un simple aspect du problème, une démonstration supplémentaire, plutôt que comme « la » solution : Devant cet accident des connaissances ; qui met littéralement cul par-dessus tête, nos sciences issues de la terre et de son histoire, l’apparition, le développement fulgurant de l’ECOLOGIE prend figure de prophétie auto-réalisatrice pour le prochain lancement d’une ESCHATOLOGIE non seulement laïque et athée, mais névrotique, ce qui est autrement redoutable… Concrètement, pour Virilio, l’écologie se ramène à : « disqualifier la planète terre, celle du vivant, pour cause d’insalubrité et de pollution diverses, celles des substances comme des distances et partir à la découverte post-coloniale d’un ailleurs de substitution.
Paul Virilio est probablement le plus percutant, dans l’analyse, le plus riche et le plus complet, parmi les très nombreuses voix qui crient dans le désert de l’écologie d’obédience chrétienne, en ce début XXIe siècle. Mais il faut remarquer que n’émerge rien, dans sa brillante démonstration, qui soit de l’ordre d’une issue quelconque, d’une ouverture sur l’idée qu’il serait encore possible de modifier le cours des choses, de revenir en arrière, d’atténuer le choc prévisible.
Paradoxalement, la plus fine lame des mousquetaires de la critique chrétienne du modernisme libéral tourne le dos à l’idée qu’il y aurait des actes à poser pour tenter de dévier le cours de choses, pour écouter le Pape décrétant « Nous avons tout juste le temps pour éviter des conséquences encore plus dramatiques » (Ibid : Laudate Deum).
Le plus stupéfiant, pour « l’innocent » qui se met à l’affut de cette curiosité paradoxale, c’est que « l’Université du désastre » donne le ton à tout un concert harmonique, dont il faut détailler et mettre en vue quelques solistes.
Vient hors concours le Père Pascal Ide, triple docteur, en théologie, médecine et philosophie, qui dans l’introduction à son ouvrage récent « Les quatre sens de la nature », parle de lui au pluriel et décrète : Nous n’avons pas les compétences pour indiquer comment prendre soin de notre maison commune, individuellement, collectivement, institutionnellement. D’autre le font, et le font bien – nous renverrons à leurs propositions. ①
En fait d’écologie intégrale chez Pascal Ide, on ne trouve qu’un démontage appliqué, en contradiction avec l’ouvrage du Pape. C’est une sorte d’enterrement de première classe, pour « Laudato si ».
Beaucoup plus intéressant et révélateur est l’ouvrage de Jean François Holthof, moine, ermite, ami de Pierre Rabbi : « La terre et la sagesse. L’écologie et les Pères de l’Eglise » 2023/EDB.
Le Père Holthof propose une étude très enrichissante, donnant tout son sens symbolique à la création en six jours, au repos de Dieu du septième et à l’ordre d’apparition (la lumière quatre jours avant le soleil – l’homme et les animaux etc…). Il met par ailleurs en évidence une dérive récente, anthropocentriste, de certains textes du magistère, justifiant des chosifications devenues généralisées auxquelles l’Eglise s’est ralliée dans « des incantations à la magie technicienne » (p 209)
Il distingue un « ici » et un « là-bas » avec un lien que l’homme est en mesure de couper définitivement ; il y a une menace de rupture définitive que l’encyclique « Laudato si » s’applique providentiellement à analyser, « en dernière expression de la doctrine sociale de l’Eglise » (p 183).
① on trouve une large recension de cet ouvrage dans « Requiem pour César ». Ed Lys Bleu. 2024
La gnose, le manichéisme, toutes les hérésies dénoncées par les Pères de l’Eglise se retrouvent dans un refus du « tout est lié », dans tous les sophismes, comme celui d’un marché auto-régulateur.
« L’encyclique « Laudato si » reste encore à accomplir », nous dit enfin ce moine érudit. C’est affirmé ainsi, de façon laconique, sobrement, sans plus de commentaires. La mise à l’écart de ce texte papal n’est pas dénoncée comme un inadmissible refus, les catholiques ne sont pas interpellés, comme si leur apathie était dans l’ordre normal des choses. Dans l’ordre de l’écologie concrète par ailleurs, il n’y voit que catastrophisme paralysant, impuissance, fausses solutions, malthusianisme. Jean-François Holthof fuit l’action, en posant un préalable de « réintégration de la nature dans la pensée, avec un retour de la métaphysique », conduisant finalement, par le découplage de la pensée et de l’action, à jouer le jeu de la gnose.
C’est le même dispositif paralysant, avec l’étonnante dernière production de Fabrice Hadjadj, intitulée « L’écologie tragique » (Ed Mame) dont le titre est d’une totale pertinence, mais pour d’autres raisons que celles argumentées dans cet essai qui éreinte l’idée de faire rimer écologie et mise en pratique.
Il traite en effet de cette préoccupation en opposant le dernier Pape et ses soucis terre à terre, au premier Pape de l’Histoire, qui avait pour seul objectif de « Hâter le retour du Seigneur » : cette fin des temps, que la démolition actuelle est en train d’accomplir avec un grand à propos, nous n’avons pas à nous soucier. A l’écologie intégrale, Hadjadj substitue l’ESCHATOLOGIE intégrale, qui, au même titre que l’effondrisme ou collapsologie, permet d’expulser toute nécessité d’agir, toute perspective de mobilisation pour tenter de modifier le cours de choses.
Il est passablement ébahissant de voir ce « phare » de la pensée catholique contemporaine appliquer son talent érudit à la noyade de toute exigence d’une action concrète, et à tourner le dos précisément à ce qu’il a publié sous le titre « l’agriculture, art majeur pour la renaissance au XXIe siècle », en ne traitant l’écologie que sous l’angle ironique de « l’écologisme » ou « compostisme ». Les meilleurs talents sont quelquefois schizophréniques. Ainsi de Houellebecq, ancien ingénieur agronome, qui, dans son roman « Sérotonine », règle son compte à l’agriculture industrielle et, par ailleurs, publie en compagnie du trublion Onfray une sorte de programme politique qui ignore la question alimentaire et agricole…
Tout ceci ne disculpe pas complètement la hiérarchie officielle de l’Eglise de France, dans le fait d’une encyclique « qui reste à accomplir », mais apporte de larges circonstances atténuantes.
Le plus effrayant, et le plus tragique, précisément, c’est que « la distraction théoriciste », comme dit le philosophe René Garcia dans « L’écologie mutilée », qui est l’apanage de ce monde impuissant, s’enrichit d’une « eschatologie » qui n’est pas « intégrale », mais purement contemplative (avec l’œil torve), chez des chrétiens qui ont ainsi vocation à rester objectivement stoïques, l’arme au pied et dénonçant l’activisme stérile, dans le dernier carré des grognards de la garde d’un Waterloo de la modernité techno-scientiste.
S’agit-il d’un destin inexorable, d’une tragédie grecque ? René Girard répond : « La tragédie est de retour (…) si la tragédie est de retour et que nous commençons à la percevoir comme une tragédie religieuse, alors il y a de l’espoir ; si au contraire nous la considérons comme une tragédie grecque, alors tout est fini ».
La tragédie « religieuse » de Girard, c’est bien entendu celle du grand basculement opéré dans l’Histoire, de la religion « sacrificielle » des origines, à celle qui est en totale contradiction, de l’innocent qui s’offre en sacrifice, rédempteur du monde.
L’allusion de Girard à la tragédie grecque est tirée d’un recueil de ses conversations avec Gianni Vattimo (Champs – Essais p 48), philosophe Heideggérien réputé que les thèses de Girard ont ramené au catholicisme. Ainsi Girard, que ses propres recherches ont conduit hors de ses convictions marxistes initiales, semble bien avoir vocation à ramener les meilleurs penseurs dans le droit chemin. Il rétablit une hiérarchie, un ordre, dans les sciences humaines ; il les rend subsidiaires d’une révélation que l’humanité ne peut plus s’en tirer avec la solution victimaire, violente, des origines de la civilisation. Il propose ainsi à la fois une révélation et une révolution, sous l’autorité de celui qui fait « toute chose nouvelle » ; nous avons à devenir des révélationnaires : vient à la surface et éclate au grand jour, un implicite sous-jacent depuis toujours qu’expose le grand anthropologue, mais qui était exprimé déjà nettement par l’éminent théologien Mgr Jean-Joseph GAUME (+1879) découvreur d’une sorte de théorème théologique : plus il y a de pratique du Sacrifice divin, moins il y a de pratiques des sacrifices humains. 1
S’impose ici, concrètement, de faire le lien avec la catastrophe globale qui semble bien, à travers le paradigme technologique, exiger le sacrifice de l’humanité entière et de la nature elle-même. La « dissuasion nucléaire » elle-même semble perdre de son poids : « même pas peur », prétend certain foutriquet qui se prend pour Jupiter, et vient en sus cette bombe climatique, alternance de longues périodes de sécheresse extrême et de déluges soudains, qui ne dissuade en rien la multitude déboussolée qui ne semble y voir qu’une farce cruelle où elle n’assume qu’un rôle de spectateur, ou de victime directe à la recherche d’un bouc émissaire.
Dans les dernières lignes de la conclusion de son dernier ouvrage « Achever Clausewitz » (2007), Girard, d’une manière pénétrante, synthétise son message et nous met au pied du mur : Le réchauffement de la planète et cette montée de la violence sont deux phénomènes absolument liés. Contrairement à beaucoup, je persiste à penser que l’histoire a un sens (…) Cette montée vers l’apocalypse est la réalisation supérieure de l’humanité. Or, plus cette fin devient probable et moins on en parle (…) La montée aux extrêmes révèle, à rebours, la puissance de l’intervention divine. Du divin est apparu, plus fiable que toutes les théophanies précédentes, et les hommes ne veulent pas le voir. Ils sont plus que jamais les artisans de leur propre chute, puisqu’ils sont capables de détruire leur univers. Il ne s’agit pas seulement de la part du catholicisme d’une condamnation morale exemplaire, mais d’un constat anthropologique. Il faut réveiller les consciences endormies, vouloir rassurer c’est toujours contribuer au pire».
Ces derniers mots de Girard : « rassurer, c’est toujours contribuer au pire » viennent en testament, il fait de nous ses légataires. Cela s’intègre parfaitement à ce qui guide un autre des très grands littérateurs contemporains, Philippe Muray, pour qui nous n’avons pas d’autre voie pour comprendre « ce qui se passe », que de juger les choses d’un point de vue strictement catholique. Ce qui implique de nous désolidariser du Jardin d’Eden on line et de l’Arcadie cybernétique, dont les délices nous sont présentés tous les jours comme un horizon indépassable. (Le XIXe siècle à travers les âges – exorcismes spirituels – l’Empire du Bien).
Enfin, vient en point d’orgue, totalement dans le sillon des meilleurs auteurs catholique depuis Chesterton, Péguy, Bernanos etc, une nouvelle variété de : « journal d’un curé de campagne », proposée par le Père Michaël Bretéché. Ce curé de campagne de la région nantaise, a élaboré un très remarquable « bréviaire de la décroissance » (Ed de germe – 2023) ; « qui ouvre une brèche d’espérance au cœur du lecteur », en mettant au centre la nécessité de « démachiniser ». Il fixe « le rythme » d’une « pérégrination » qui nous sort du confinement d’un statuquo contemplatif.
Toutes ces œuvres ne font pas que nous éclairer, mais postulent, contre le nihilisme relativiste ambiant, le retour du sens commun, de l’intelligibilité des choses et de la dignité de l’action humaine.
L’Eglise trouve ici à sa disposition un arsenal d’arguments qui lui fait mesurer sa véritable envergure et, en particulier, sortir du fantomatique « que faire ? », où chacun regarde son voisin en attendant que ce soit lui qui commence…
1 « René Girard, du désir à la violence » Sylvain Durain – Ed Verbe haut – 2023 – p138
Chapitre 7 : La bombe informatique
Paul Virilio a donné ce titre à un essai en 1998. Ce visionnaire illustre parfaitement l’existence d’un large courant de pensée catholique en France, en France spécialement, plus qu’ailleurs, et qui affronte de longue date le monstre informatique, et la manière explosive dont il a subverti toute la vie humaine, à la manière d’une drogue dure.
L’inquiétude du Pape à ce propos se traduit dans de multiples interventions – discours sur l’IA le 1er janvier 2024, discours au G7 sur le même thème en juillet, ainsi qu’un ardent plaidoyer pour la littérature intitulé « Le rôle de la littérature dans la formation ».
Comme pour la bombe climatique, c’est une « longue maladie nosocomiale », aux conséquences incalculables, une bombe à retardement et à fragmentation. D’ores et déjà on en voit les effets désastreux dans la capacité cognitive catastrophique d’une jeunesse qui ne sait plus lire ni écrire, ainsi que des épisodes où se mêlent l’horreur et la stupidité, comme cette fugue et disparition épouvantable d’une malheureuse fillette, tout récemment, dont les parents excédés avaient réduit en miettes le portable…
Tout est lié, il faut le rabâcher. Derrière « la mise à sec » d’un réchauffement global, se profilent toutes « les mises à sac », dont celle de la littérature, que l’obnubilation des écrans rend de plus en plus inaccessible à la multitude, quoiqu’en disent les escrocs stipendiés du système médiatico-politique. « Faites- les lire ! », nous exhorte maintenant l’auteur de « la fabrique du crétin digital », Michel Desmurget.
« Le Pape est la figure de l’opposition au désastre », disait Philippe Muray, « mais il est plus qu’une figure » (Les Essais p 1344), il précisait encore de manière définitive : « Le Christianisme est en général une arme essentielle de la liberté (…) Au contraire, le monde technophile, festivophile et progressiste est le véritable monde de ténèbres et de réaction qui mène une guerre incessante à la liberté. On arrive à cette situation paradoxale que c’est dans le Christianisme qu’on peut puiser une véritable critique radicale de la réalité, tandis que la domination obscurantiste est du côté de l’immense secte des avancistes, du côté du parti du mouvement et de ses prêcheurs illuminés, qui n’arrêtent pas de répéter que le monde n’a plus besoin de critiques, qu’il n’a plus besoin que d’amour. »
La « bombe informatique », pour l’épiscopat français, n’est pas critiquable, puisqu’il n’en est pas question dans le « Ensemble pour notre terre » de la CEF. Ainsi voit-on à regret que des confrères de l’Evêque de Rome semblent pencher du côté des « prêcheurs illuminés », et de leur vulgate « rassurante », hérétique ; au contraire de ce Pape et de la tradition de l’Eglise, toujours affrontant le grand dilemme, le grand défi, de faire se rencontrer et s’embrasser « Amour et vérité, Justice et paix ».
Chapitre 8 : Quid des académies pontificales (des sciences et sciences sociales)
Le Pape rédigeant sa dernière exhortation « Laudate Deum » a manifestement été aidé par le rapport de 2024 de l’académie des sciences du Professeur Ramanathan (subventionné par l’Université Californienne de San Diego). C’est une compilation de toutes les données statistiques, du GIEC et d’université américaines sur la crise du réchauffement climatique. Sont soulignées toutes les disparités entre un milliard d’humains auteur et fautif de l’essentiel de l’augmentation de l’effet de serre (85%) et le reste de l’humanité, divisé en deux sous-groupes équivalents, dont le deuxième d’environ 3 milliards d’humains est une pure victime.
C’est un document intéressant et utile, mais architechnocratique, qui ne fait aucune allusion à la contestation par le Pape de la domination d’un « paradigme technocratique ». En effet on s’applique bien à inclure dans les perspectives à venir, le présupposé secours d’une innovation technologique, qui n’est en l’état actuel qu’une véritable « philofolie » (comme dit Virilio). Ainsi est supposé comme objectif possible, le captage des 300 milliards de tonnes qu’il y aurait d’ores et déjà « en trop » dans l’atmosphère !
Ce rapport semble démontrer que ces scientifiques se considèrent comme des oracles, qui n’ont pas particulièrement à écouter ce que dit le Pape. Très significatif est la notion de « résilience » qui chapeaute leurs travaux – L’étymologie latine Resilire : sauter en arrière, se retirer, montrant une facette que l’indécrottable optimisme scientiste anglo-saxon a fait évoluer en capacité à encaisser le choc, ne pas se laisser abattre, rester zen, ne pas déprimer, face à un événement imparable…
Autre curiosité, de la part de structures du Vatican qui ne semblent pas avoir mesuré la profondeur des changements de perspective impliqués par la grande Encyclique, est la stupéfiante signature d’un partenariat baptisé « Council for inclusive capitalism with the Vatican », avec une ONG de milliardaires nommée « Coalition for inclusive capitalism » créée par Madame Lynn Forester de Rothschild ! Ce partenariat arrive comme une sorte d’estocade, le Vatican prise de guerre, embarqué dans les fourgons de ce capitalisme inclusif, autre nom du « gigantesque processus » qui entend contrôler son propre négatif, par le simple phénomène de l’accélération de sa propre expansion.
Appel au Pape François :
Cette incroyable bévue, ralliement ou abdication, c’est une faute capitale, alors que c’est ici et maintenant le bon moment pour l’Eglise, de promouvoir un procès Galilée à l’envers, pour mettre en accusation cette science « qui renonce à habiter l’étendue qui l’a vu naître », « aujourd’hui démunie », dit encore Paul Virilio, « dès lors qu’il s’agit de la géophysique et de la géologie, et de fait, la globalisation n’est autre que le nom d’emprunt de cette sphère d’impatience d’une science physique entrainée dans l’accélération d’une réalité dont l’incontinence conduit tout droit à l’inertie de l’histoire, celle, politique, des événements, comme celle, scientifique, des savoirs (…) Depuis au moins deux siècles, ajoute l’admirable philosophe : « la vitesse a succédé à l’étendue, au point de nous faire perdre toute grandeur et donc toute mesure, non seulement dans le domaine de la nature, mais dans celui de la culture, d’où l’urgence philosophique de l’étude d’un désastre sans équivalent connu ». (Conclusion de « l’Université du désastre »).
L’urgence est « philosophique » certes, mais n’est pas seulement philosophique, « l’Hôtel des invalides du savoir et des connaissances, privées semble-t-il de conscience critique », va devoir accueillir aussi le tiers de l’humanité en malnutrition plus ou moins sévère, et même menacée de mourir de faim dans une proportion qui s’accroit tous les jours. Propose-t-on à ces pauvres gens d’être « résilients » ? La résilience est le premier pas dans l’écoblanchiment … Entrons plutôt dans le « halte à la croissance » qu’un bien nommé « Club de Rome » - que le Vatican aurait été bien inspiré d’écouter et d’intégrer à l’époque, voici un demi-siècle – fixait comme objectif, et qui aurait pu peut-être ainsi nous prémunir des bombes climatiques et informatiques qui s’ajoutent maintenant à la nucléaire…
L’heure est gravissime et nous est révélé de surcroît que nous ne pouvons nous en tirer avec le triptyque « du sang de la sueur et des larmes ». Cette ultime issue du XXème siècle nous est désormais fermée. La militarisation de ces sciences aveugles, dont les prétendues vérités ne sont que des « erreurs en sursis » (dixit Castoriadis), conduit leurs accélérations vers un « Crash test » final.
Accueillir « le bréviaire de la décroissance » du visionnaire curé de campagne Bretéché, l’inclure dans le texte de la doctrine sociale de l’Eglise, serait un signe fort.
« Le retour à un univers qui serait aussi un ordre, où les mots retrouveraient tout leur sens et les objets leur poids, disait l’historien Jean Renaud (commentant Muray dans les cahiers d’histoire de la philosophie), ne se réalisera pas sans détours singuliers, imprévisibles, mais passe inévitablement par l’intercession de l’Eglise Catholique, Muray s’en doutait. Parmi ses lecteurs, il se trouvera des écrivains, des poètes, des philosophes qui, las du nihilisme de leurs ainés, puiseront dans son œuvre les raisons de confirmer et de suivre ces vérités salvatrices. »
Particulièrement prophétique à cet égard, de la nécessité d’un Hôtel des invalides de la science, est la démarche de l’illustre fondateur du Centre National d’Etudes spatiales, Jacques Blamont : après la rédaction de ses mémoires éditées sous le titre « L’action sœur du rêve », il s’était rendu à Rome en 2015 pour tenter d’inciter Benoît XVI (qui était en train d’organiser sa succession), pour l’engager de façon pressente à décider d’un concile pour la défense de la création.