Quand l’église perd sa dimension d’accueil universel

Publié le par Michel Durand

Sans-titre-1.jpgVraisemblablement, aujourd’hui, une photographie de l’Église catholique de France donnerait, ce type de portrait : un large corps, dont les flétrissures trahissent l’âge, surmonté d’une tête jeune, reliée aux autres membres par un frêle cou.
Mais cette image n’a qu’un relatif intérêt. Elle ne veut qu’introduire le dessin que l’on peut actuellement tracer de l’Église visible. Voilà. Mis à part les personnes qui sont regroupées sous le nom de traditionalisme ou d’intégrisme, figeant l’Église au XVIe siècle, le visage de l’Église se présente sous un double profil : la face gauche de ceux et celles qui envisagent l’annonce de l’Évangile dans le quotidien de l’existence,  désormais supplantée par la face droite de ceux et celles qui proclament la nouvelle évangélisation à l’aide de grands rassemblements présidés par l’évêque s’entourant de divers collaborateurs. Le visage des petits pas discrets, bousculés par les grandes enjambées d’une Église affirmant sa présence, et son autorité. Juxtaposition d’anciennes et de nouvelles orientations.
Cette réflexion m’est venue hier, dimanche, alors que je tenais ma permanence hebdomadaire à l’Espace Confluences.
Une personne me parlait de l’accueil des « visiteurs » dans les églises. Il s’agit, cette fois des bâtiments.
Situons le cadre. Le sanctuaire d’une grande ville française. Beaucoup de touristes viennent sur cette colline. Il y a un superbe panorama. Sont-ils tous chrétiens ? Loin de là. Mais tous sont susceptibles de désirer comprendre ce qu’ils voient. L’iconographie des peintures, sculptures, mosaïques, livres ouverts sur les murs, attendent que des guides, souvent des bénévoles, apportent des explications. Toute œuvre d’art, du reste, requiert un minimum d’informations ; même celles qui semblent le plus immédiatement perceptibles. Quel est le sens du serpent ? Que veut dire péché originel ? Qu’entend-on aujourd’hui par péché ? Un visiteur découvrant les images des récits de la création, n’ayant suivi aucun catéchisme, n’ayant pas eu la chance de profiter, au collège ou au lycée, des cours de culture religieuse (lesquels se mettent, malgré tout, difficilement en place) a du mal à comprendre le sens de la forme montrée. Il lui faut l’aide d’un guide. Celui-ci l’accompagne avantageusement disposé à répondre, dans la mesure de ses connaissances, à toutes questions. De nombreux guides, passionnés par l’histoire, la Bible et l’Église, sont très compétents. Ils font de ces visites, parfois payantes au bénéfice d’une association, une authentique mission d’évangélisation. Conformément au sacrement du frère, attention de toutes personnes avec le regard du Christ, ils cherchent dans leurs commentaires à expliquer au mieux ce qui est montré. Révélation biblique, histoire de l’Église, vie des saints, explication des symboles chrétiens viennent en réponse à une attente.
Comme il est triste de constater l’affrontement du gardien du sanctuaire qui veut appliquer la loi du silence complet ! «  Ce lieu est un lieu de prière, on ne peut parler à haute voix ; vos explications, il faut les donner ailleurs… » Et, devant les visiteurs, de hausser le ton pour mettre bon ordre dans l’église : « Vous n’avez pas le droit de venir ici, près du sanctuaire, c’est un lieu de prière, un espace sacré ».
Il m’est déjà arrivé d’être informé sur ce genre de non-dialogue entre un « gardien de sanctuaire » et des « touristes ». J’ai même rencontré, un jour, un prêtre revêtu du vêtement liturgique, l’aube avec étole, qui accueillait les visiteurs en souhaitant déceler en eux des pénitents potentiels.
Monte-t-on sur une colline et entre-t-on dans une basilique, une cathédrale, pour, obligatoirement, accomplir un pèlerinage ? Assurément non.
Par contre, dans le touriste, bien accueilli, peut monter une prière à la suite d’une explication approfondie du sens du bâtiment et de son décor.


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