R E – L E C T U R E

Publié le par Michel Durand

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Nous savons que Robert a rejoint l'éternité. Je dois, il n'et pas encore tard publier ce texte.

 

De la Session des Prêtres, 26-28 septembre 2010 : « Soifs spirituelles des hommes et  femmes de notre temps, défis pour l’Eglise du Christ et pour notre mission ».

 

Remarques préliminaires :

Si j’ai pris une certaine part à la préparation de la rencontre, je n’ai pu y participer en raison d’une contrainte thérapeutique… Cette absence me donnerait-elle plus de « neutralité » pour entreprendre le travail de la re-lecture ?...

Ma re-lecture s’appuie sur deux bases : 1) le document officiel : SYNTHESE FICHE D’EVALUATION ; 2) les lettres nombreuses que j’ai personnellement reçues donnant de multiples appréciations

 

I. SATISFACTION GENERALE EXPRIMEE PAR TOUS

 

Parmi les tout premiers points d’évaluation, avant les autres exprimés par les participants, il y a : « une satisfaction générale exprimée par tous ». Pour quelles raisons ? Celles qui ont été exprimées par écrit tournent autour de deux facteurs : la qualité de la prestation des intervenants externes et celle des témoignages rendus par quelques prêtres sollicités, d’une part, et, d’autre part, les expressions de la vie fraternelle au cours de ces journées.

 

Effectuer une re-lecture sur un évènement passé ne s’arrête pas à l’enregistrement des faits, puis les classer, les mettre en ordre…, mais il faut encore – et surtout – entreprendre l’analyse qui seule, permet d’apercevoir le « sens » de cet évènement et d’en apercevoir les prospectives éventuelles. Ainsi, la satisfaction dont les contributions des intervenants a bénéficié, repose sur une raison de bon sens « elles répondaient au thème de la session ».

Quant à la satisfaction relative à la qualité fraternelle des rapports entre prêtres, son analyse est certainement plus complexe… et partant, plus prudente. Je la conduis autour de 3 paragraphes : l’espace, l’expérience, la dynamique engendrée.

 

L’espace :

Même si le domaine Saint Joseph commence à être connu et fréquenté par les uns et les autres, il a été pendant deux jours le théâtre de quelque chose d’exceptionnel pour les participants. Libérés du cadre habituel de la vie quotidienne, des surcharges pastorales de l’année, avec leurs inévitables combats et leurs blessures, les participants ont pu faire, dans cet espace diocésain, une pause favorable à la cessation de l’urgent pour donner du temps à l’essentiel.

 

L’expérience :

Dans le cours de l’année, il a pu exister entre prêtres des non-dits, lourds à porter, des affrontements, des blessures. Celles-ci, sans être effacées d’un coup de baguette magique, ont pu être mises en perspective par rapport à des valeurs supérieures : la participation à une identité et une mission communes au service du Peuple de Dieu.

Qu’entre les uns et les autres, il y ait eu un début de réconciliation : c’est très probable, dans un expériment partagé. Plus généralement, au cours de la session, l’expériment n’était pas seulement de l’ordre de la réconciliation, mais plus communément de l’ordre de l’épaisseur humaine qui tombait immédiatement sous l’expérience des sens : une fraternité sacerdotale confortée. Expériment, apaisant et vivifiant, chanté depuis des millénaires par d’autres témoins, nos aînés : « qu’il est doux, qu’il est agréable de se trouver entre frères et d’être unis » cf. Ps.132 (133)1. Expériment dont Vatican II a précisé la nature théologale : « les prêtres sont tous liés les uns aux autres par la fraternité sacramentelle… issue du sacrement de l’Ordre » Presbyterium ordinis, P.O., n° 8.

 

La dynamique :

 

Un des signes de l’authenticité d’une expérience c’est le désir de la partager à ceux qui ne l’ont pas connue et seraient en mesure de la connaître, Cf. 1 Co. 7, 6-8. Ainsi ceux qui ont participé à la Session ont exprimé l’engagement à : « trouver les moyens d’intéresser et de faire participer à ces sessions plus de prêtres de tout le diocèse »

Un autre signe – toujours de l’authenticité – est de désirer perfectionner l’expérience non pas que l’on en soit satisfait (en l’occurrence on en éprouve du contentement) mais parce que l’on est conscient des améliorations possibles pour mieux vivre le présent : progresser correspond à une loi naturelle et évangélique incontournable, cf. Gn. 1, 26-28 ; Mt. 25, 14-30 ; Ph. 3, 16 -13.

 

Ainsi plusieurs secteurs améliorables ont été cités comme la mobilité des placements à la table de la salle à manger, pour favoriser davantage . « une grande mixité » ; un allongement d’horaire pour permettre des échanges plus sérieux avec les intervenants externes ; une meilleure organisation pour approfondir encore le dialogue avec le Cardinal. Il va de soi - sans le dire mais il vaut mieux le dire – que le désir de perfectionner suppose le désir de continuer l’expérience – encore ! l’année prochaine (et pour laquelle de précieuses indications seront reprises dans la IIIè (partie).

 

Certes, quelqu’un avertit – il faut lui en savoir gré – « à ne pas tuer la formule à petit feu… » Si la formule était  suspendue à quelque mode de pensée conjoncturel, elle serait, par nature, vite démodée, peut-être insensiblement comme à petit feu. Au contraire, si la formule dépend d’une bonne inspiration : l’aujourd’hui de Dieu dont l’amour agissant est à la fois tous les jours nouveau dans l’histoire du Salut des hommes et immuable dans le Dessein éternel, cf Lam. 3, 21-23.

L’avertissement donné : « à ne pas tuer la formule à petit feu » invite à trouver une solution efficace, soit : élaborer la formule en fonction de la fidélité recherchée au travail de Dieu dans l’humanité et l’Eglise dans les temps présents. Exigence prégnante et difficile à poursuivre. Encore un signe qui vérifie comme les précédents, l’authenticité de l’expérience vécue, celui de la verbalisation : dire avec des mots d’homme les sentiments et pensées enfouis dans le cœur et saisis, comme par une échographie intérieure, dans l’ambiance fraternelle de la Session, et, enfin, livrée avec confiance, à ses frères. Les 15 réponses à l’appel de suggestions de thème à travailler pour une autre année sont impressionnants : par leur base commune : la réalité conjoncturelle vécue tant par le monde, aux multiples mutations incertaines, que par l’Eglise-Institution, avec ses faiblesses et ses précarités… La réalité, comme une donnée incontournable, que les prêtres acceptent, ayant renoncé à la regarder telles qu’ils la souhaiteraient mais telle qu’elle est concrètement… à aimer et à servir.

 

La réalité historique quelles qu’en soit les lourdeurs et les opacités n’est pas démobilisatrice : conscients et libres, les prêtres , dans les 15 réponses, se présentent debout, décidés à poursuivre des prospectives pastorales adaptées dont ils donnent des listes. Ils ne donnent pas que des listes : ils énumèrent aussi  les principales conditions fondatrices de réussite dans l’entreprise de réalisation comme la participation à la purification des péchés dans l’Eglise-Institution selon l’esprit de Lumen Gentium, L.G. n° 8 ; la communion, sans cesse à harmoniser, entre différents secteurs sacerdotaux selon l’esprit évangélique et conciliaire, cf. 3 Jn. 8 et P.O. 8 ; la conversion personnelle qui ne saurait être remise ni à plus tard, ni à un autre, selon l’esprit de P.O. 12-16.

Par la verbalisation des pensées de leur cœur, ces prêtres deviennent témoins qu’ils ont reçu la grâce de partager « la pitié de Jésus pour les foules, harassées et portées comme des brebis qui n’ont pas de berger … » cf. Mt. 9, 36, dans l’accueil quotidien du Christ glorieux marchant à leur côté, sans faille, jusqu’à la fin, la confidence par laquelle l’Evangéliste Mathieu a mis le point d’orgue à son œuvre, cf. Mt. 28-20. Chacun vit selon ses capacités personnelles l’itinéraire spirituel et pastoral qui lui est propre.

 

II. SATISFACTION GENERALE A NUANCER

 

Ni nombreuses, quelques unités à peine, ni superficielles : elles posent la question de savoir si le thème retenu a été réellement traité au cours de la session, les nuances apportées à la satisfaction générale méritent la même attention d’étude. Elles aussi ont un sens. ELLES PARTENT DE CONSTATS :

 

Une distance :

entre le déroulement pastoral quotidien sur le terrain, à l’écoute attentive « des attentes des gens d’aujourd’hui » dont le décryptage demande beaucoup de sagesse «pour ne pas faire dire aux gens ce que l’on voudrait qu’ils nous disent » d’une part, et, d’autre part, le contenu des interventions et son expression langagière : il y avait un grand écart, comme si on ne parlait le même langage.

Une distance entre le contenu du questionnaire, pour initier le travail en carrefours qui partait uniquement des apports du journaliste et du philosophe et ne partaient pas des apports concrets et ouverts qu’apportaient les pasteurs.

 

Des déceptions : J’ai été un peu déçu…

 

Aux distances exprimées ci-dessus il convient d’ajouter les compléments suivants : les manques d’échanges avec les intervenants, en temps et en qualité, en interactivité ; le manque d’exploitation des fruits des carrefours qui, en partie, comblaient les quelques distances évoquées ci-dessus ; manque de prospectives pastorales sages issues de l’ensemble des échanges comme : « amorcer modestement une recherche pastorale correspondant aux attentes que nous avons commencé à percevoir…

 

En conclusion :

 

 « La question des attentes spirituelles des hommes et des femmes de notre temps et de notre époque a trop peu été touchée… »

 

III. PREPARER LA PROCHAINE

 

A la lumière des leçons du passé, l’attention première de l’équipe de préparation devrait porter sur les efforts à entreprendre pour supprimer les « distances » et les facteurs de « déceptions » enregistrés ci-dessus e r r a r e  h u m a n u m  e s t  s e d  p e r s é v é r a r e… ?

Il est évident que beaucoup de prêtres en aient pris conscience et ont même pris le temps et la plume pour suggérer les remèdes à utiliser l’an prochain pour éviter qu’il en soit encore ainsi,  parmi lesquels figurent : le travail de préparation, l’accompagnement après la session, l’exploitation des carrefours, la dominante pastorale, le temps « sacré » aux échanges interactifs….

 

Tous d’ordre organisationnel, ces remèdes sont prégnants ; cependant, à eux seuls, ils ne seraient pas suffisants pour suppléer à l’absence de structure qui devrait être nettement définies et acceptées des uns et des autres. Le temps serait-il  advenu après les premières années d’expérience des sessions, de préciser la nature originale des rencontres annuelles entre les prêtres et l’Evêque ?

 

Parmi les requêtes exprimées, deux sont particulièrement suggestives : l’une, plus grande considération des apports des différents échanges et, en particulier, des carrefours ; et l’autre, l’amélioration du temps de dialogue avec le Cardinal ; dans ces deux requêtes se trouve en germe ce que la structure de collaboration entre le Presbytérium et son Evêque, précise et honore.

 

Ainsi, ce que les prêtres vivent, réfléchissent et verbalisent ensemble dans le cadre de leur mission canonique reçue de l’Ordinaire, cf. L.G. 9, 28, entre dans la collaboration objective avec l’évêque dont ils sont les coopérateurs immédiats et conseillers, cf. P.O. 2, sacramentellement unis les uns à l’autre par la participation à l’Unique sacerdoce du Christ, cf. L.G. 28. C’est également ensemble qu’évêque et prêtres « se mettent assidûment à l’étude pour être capables d’assurer leur responsabilité avec le monde et avec les hommes de toute opinion ». cf.G.S. 43/5.

 

Oui, le temps ne serait-il pas advenu de donner aux sessions de septembre une structure conciliaire de Presbytérium et son évêque : cela parait attendu et bénéfique pour tous et les collaborateurs et le premier pasteur du diocèse.

 

Lyon, novembre 2010

Robert Beauvery


Publié dans Eglise

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