Guy Barbier, sensible à la misère des pauvres n’a-t-il pas présenté à Jésus les souffrances qu’il a rencontrées
Il me faut revenir sur les jours précédents. En effet, je n’ai pas tout dit sur les raisons qui m’ont conduites en Finlande alors que je n’ai jamais souhaité connaître les pays du Nord de l’Europe. Les pages ce blog montre du reste que je me sens bien plus à l’aise sous les climats du Sud que de ceux du Nord.
Jean-Claude a ouvert le chemin d’Helsinki. C’est une évidence en ce qui me concerne. Mais, il faut savoir au préalable que, séminariste postulant, Jean-Claude a été informé de l’existence du séminaire du Prado à Lyon par un pradosien vivant son ministère sacerdotal en Finlande. Guy Barbier après une longue vie apostolique en Russie, en Estonie et en Finlande décida de demeurer en ce pays. Il est enterré à Turku (Finlande).
C’est donc isä Guy Barbier qui est à l’origine de mon voyage à Helsinki. S’il n’avait pas informé Jean-Claude de la possibilité de terminer son séminaire à Lyon, au Prado, jamais je n’aurais rejoint ces terres froides. En fait, pas si froide que cela au moment de mon passage puisque j’ai vu du soleil et que le thermomètre ne fut jamais en dessous des -1° ce qui est, m’a-t-on dit, rare en un milieu d’octobre.
Il y a encore d’autres raisons. Si je pense maintenant à parler de Isa Guy, père Barbier, c’est que je n’ai pas partagé un repas ou une rencontre avec des prêtres, des laïc(que)s, des religieux (ses) sans entendre parler de ce « saint homme ». On me dit que l’évêque du lieu souhaiterait sa béatification. « Il était tellement proche de gens, il a aidé tellement de personnes, des réfugiés, des religieux !... » Il y a à peine une heure un prêtre Tamoul (originaire de Pondichéry), encore jeune, me témoigna de tout ce qu’il avait reçu de ce prêtre au moment où il débutait dans le pays où l’on parle le finnois. Sans cette rencontre, aurait-il tenu en ce lieu ? Pour lui, « Guy Barbier, un vrai père ».
Voilà pourquoi j’estime indispensable d’en parler et de vous donner à lire des pages glanées sur internet.
Guy Barbier est le fils de Fils de Joseph Barbier de Courteix et de Marguerite Marie Barbier de Courteix (née du Maroussem). Il est né le 20 septembre 1921 à Chabanais en Charente (France). Il fait HEC puis intègre les Chantiers de Jeunesse dans le Vercors d’où il est envoyé en Allemagne dans le cadre du Service du Travail Obligatoire dans une usine près de Schkopau. Il participe à la formation de groupes de résistance, à l’organisation des évasions…. Au bout de 18 mois il est arrêté et déporté à Dachau durant 6 mois et libéré le 8 mai 1945. Il a 23 ans. Il entre au séminaire d’Issy-les-Moulineaux et est ordonné prêtre à Paris le 29 juin 1951. Pour son premier poste il est nommé vicaire à Grand Croix (Loire) où il reste 4 ans. En juillet 1956 il suit une année de formation Pradosienne à Saint-Fons. Il est nommé formateur des Frères du Prado et aumônier de l’institut séculier du Prado. Il oriente sa vocation à la fois vers la conversion de la Russie et l’attention aux plus pauvres. Parlant déjà plusieurs langues il commence à apprendre le russe et s’exerce à célébrer la messe en rite oriental.
Sur l’instigation de Monseigneur ANCEL en 1957 il apprend le métier de radio-électricien en vue de devenir prêtre ouvrier. Il découvre la fraternité au travail. Cette orientation est stoppée par la décision de Rome de mettre un terme à l’expérience prêtre ouvrier.
Engagé, incardiné au Prado sans affectation à un diocèse (Prado général), il part missionnaire en Finlande en accord avec Monseigneur ANCEL. Il y rejoint la Communauté d’Emmaüs où il a une vie très rude. Il y a beaucoup d’alcoolisme. Il se fait proche des chrétiens de Finlande et d’Estonie pendant plusieurs dizaines d’années. Il traverse souvent le golfe de Finlande pour Tallinn en Estonie. Il prêche des retraites aux Sœurs de Mère Thérèsa de Calcutta en Estonie, à Moscou et parfois en Sibérie dans des endroits lointains à trois ou quatre jours de train de Moscou. Il fut opéré du cœur au Val de Grâce en 2001 (date non vérifiée).
Sur la fin de sa vie, l’Evêque d’Helsinki lui confie la charge d’Exorciste sur les trois pays du nord où il exerce son ministère. C’est une mission, exigeante et extraordinaire suivant ses propres termes, de libération du mal et de soulagement des personnes qui subissent les conséquences du mal que les autres font.
Guy BARBIER a prouvé toute sa vie la profondeur de sa vocation traduite par une véritable charité pastorale et marquée du souci de rencontrer les personnes et de les ouvrir à la joie de la vraie vie. Il est décédé dans sa quatre vingt dixième année le 21 juin 2011 à Helsinki. Ses obsèques ont été célébrées à la cathédrale d’Helsinki et il a été inhumé en Finlande suivant sa volonté.
Robert Daviaud dira à son propos au moment de sa sépulture :
« Lors de la visite que j’ai effectuée auprès de Guy, il y a déjà quelques années, il m’avoua tout rayonnant : “J’ai été heureux dans mon ministère de prêtre !” et pendant quelques jours je fus le témoin de son activité débordante. A peine arrivé à Helsinki, il me fit prendre le train pour Moscou où il anima une journée de réflexion avec l’évêque et le presbyterium de ce diocèse. Puis il me fit découvrir sa mission à Tallinn en Estonie, avant de terminer en Finlande. Le premier sentiment qui m’habite est donc l’action de grâce à Dieu pour la ferveur de la foi qui animait Guy et pour son énergie missionnaire jusqu’au bout. Au mois de mai dernier, il écrivait : “J’ai de plus en plus de travail”, en partageant sa joie de voir la continuité de son agir et en se réjouissant de tel ou tel projet à mettre en œuvre au cours de l’été prochain, notamment un congrès en Pologne avec un groupe de laïcs. Ancien résistant, ancien déporté, il manifesta dès sa jeunesse une disponibilité pour des engagements courageux au service de la liberté, de la justice et de l’attention aux plus pauvres. Il répondit avec beaucoup de détermination, à l’appel du Père Ancel, alors Responsable Général du Prado, qui l’envoya dans le nord de l’Europe, avec la mission de se faire proche des chrétiens de ces pays, tout particulièrement de ceux de l’Union soviétique. Tout au long des années, bien des rencontres, bien des actions ont marqué son ministère. Je pense à la présence à la communauté Emmaüs, la rencontre des Sœurs de Mère Térésa, le ministère d’exorciste qu’il exerça avec passion ces derniers temps. Ceux qui l’ont connu pourraient ajouter sans doute bien d’autres dimensions de son activité missionnaire. Le Bienheureux Antoine Chevrier parle de l’attrait et de l’élan qui pousse une personne à suivre Jésus-Christ de plus près et à le servir dans sa beauté évangélique. Au milieu des combats contre le péché et des obstacles propres à toute existence humaine, Guy nous a témoigné d’un attachement profond à Jésus Christ qui se traduit dans une véritable charité pastorale, avec le souci de rencontrer les personnes et de former des croyants solides et fidèles. Il disait l’importance de commencer par regarder Jésus Christ dans sa relation au Père et dans sa relation aux gens. Sensible au pouvoir de délivrance et de libération du Ressuscité, il a su témoigner qu’il était possible de sortir du mal, de ne pas se résigner à rester sous son emprise. Par où passent les chemins de la grâce ? s’interrogeait-il, tout en mettant en œuvre dans la prière, les actes de salut et de guérison que Dieu nous offre. À travers ses capacités et ses limites mêmes, il tenait à devenir comme du bon pain, afin que les chrétiens, les personnes, notamment celles qui souffrent le plus, puissent trouver par lui la bonne nourriture qui vient du ciel, puissent avoir la joie de recevoir la Vie en abondance. Je terminerai cette intervention en citant les mots mêmes de Guy, qui, il y a quelques mois, s’exprimait sur ce qui fut l’essentiel de son existence : “Quand la mort se présente, on ne peut plus cacher ce qui a été le but de notre vie. Le prêtre, la religieuse, seront compris suivant le rôle social qu’ils auront rempli, mais on ne soupçonne pas ce qui a été l’origine de leur vocation : un appel personnel de Dieu, par la personne du Christ, afin de s’attacher à lui comme disciple, un amour qui ne se révèle en plénitude qu’à ceux qui le vivent… Quand depuis sa tendre enfance, on a été toute sa vie attiré par un Maître aussi extraordinaire que le Christ, on ne peut que désirer le rejoindre le plus vite possible… Dieu nous a créés à son image afin que nous puissions vivre avec lui dans l’éternité !“ »
Père Robert Daviaud Responsable Général du Prado
Homélie prononcée lors de la messe du 25 juin 2011 en la chapelle des prêtres du Prado à Limonest pour Guy Barbier de Courteix
De Chabannais en Charente à la Finlande et les pays Baltes se déroule une longue existence, celle de Guy Barbier de Courteix, né en 1921. Ce matin nous voulons nous souvenir de sa vie, sa vie à la suite de Jésus Christ, sa vie de prêtre. De cette histoire on retiendra sa vie en famille, les études en HEC, à la guerre les Chantiers de Jeunesse dans le Vercors, le travail obligatoire en Allemagne, une vie de travail, des groupes de résistance, deux ans de captivité en camp de concentration Dachau et Mauthausen… Ordonné prêtre le 29 juin 1951 ; il fera partie de la Communauté Générale du Prado : engagement en septembre 1956. Après un temps en paroisse, il s’oriente vers la vie de travail : il fait une formation professionnelle pour adultes ayant un handicap physique par suite de la guerre ou du travail : radio électricien mécanique… Il s’orientait vers une vie de Prêtre ouvrier dans le projet du Père Ancel. A la fin de cette expérience, il réalise le désir qu’il portait avec d’autres d’une initiative pour aller évangéliser la Russie par un travail des langues et de la liturgie orientale. Je crois que c’est pour cela qu’il ira en Finlande, au plus près de la frontière de l’URSS. Sa première insertion en Finlande sera une communauté Emmaüs avec des gens de la rue marqués par l’alcoolisme. Dès que les murs du communisme tombent, il ira dans les pays baltes et au-delà. Il a aussi travaillé comme exorciste et accueilli de nombreuses personnes en difficulté. Parmi les personnes qui lui ont demandé son aide, il y avait aussi de nombreux non-catholiques. J’ai glané un petit témoignage paru en Finlande : « Il m’a dit que ses proches collaborateurs étaient à Saint-Pétersbourg et Stockholm, et qu’il était préoccupé par le manque de successeurs. Je suis si vieux, je pourrais mourir demain. Je devrais être capable d’enseigner à quelqu’un mon expérience, mais personne n’en veut dit-il. » Cette longue vie, 60 ans de ministère sacerdotal je voudrais la relire avec ce passage de l’Évangile que la liturgie nous propose aujourd’hui. On nous présente un centurion romain, c’est un étranger, un païen, un guerrier au cœur d’une légion romaine. Qu’est-ce que c’est pour lui un esclave, sa chose qui lui appartient comme un animal. Ce centurion aborde Jésus et lui porte la maladie et la peine de son esclave, il est au lit et souffre terriblement. Quel contraste avec la dureté des maîtres de cette époque, et surtout avec la rudesse des officiers romains. Ce capitaine de l’armée se montre sensible et solidaire d’un pauvre, son esclave, mais il a une foi admirable en Jésus. Quand Jésus dit qu’il ira le guérir, il manifeste une autre délicatesse envers Jésus. Il sait bien que pour un juif il est comme un pestiféré, il sait que Jésus ne peut entrer dans une maison païenne sans encourir une impureté légale, dont il devra se purifier pendant une semaine. Je ne suis pas digne que tu entres sous mon toit. Pour lui, Jésus possède un pouvoir qui dépasse celui qu’il exerce sur ses soldats et ses esclaves mais dont l’efficacité est du même genre. Le Christ peut commander à la paralysie comme lui, l’officier et le maître, à ses soldats ou à ses esclaves. Il croit que la seule parole de Jésus est puissance et autorité sur le mal. Et Jésus admire cette foi du païen. Aujourd’hui nous nous souvenons de Guy Barbier. Sensible à la misère des pauvres n’a-t-il pas présenté à Jésus les souffrances qu’il a rencontrées. Dans son ministère, souvent isolé, il ne pouvait qu’aborder Jésus-Christ et lui dire tout ce que les gens peuvent souffrir. Il avait une grande foi en Jésus-Christ, une foi en la puissance de sa parole pour libérer les hommes de ce qui les enchaîne. En nous souvenant de Guy Barbier nous voulons porter toute sa vie au Christ avec cette foi que la Parole du Christ, une seule Parole l’appelle à la résurrection.