La célébration, en décembre prochain, du 150e anniversaire de la fondation du Prado par le Père Antoine Chevrier pourrait permettre aux Lyonnais de
redécouvrir la générosité du bienheureux
LYON (Rhône) De notre envoyé spécial BRUNO BOUVET LA CROIX
- Dans la chapelle du Prado, l’immense crèche rappelle le soir de Noël 1856, lorsque le P. Antoine Chevrier a choisi de « devenir pauvre parmi les pauvres
». À Lyon, les richesses patrimoniales comme les trésors gastronomiques n’ont de secret pour personne. Et, dans les deux domaines, l’appétit de
chacun est autant aiguisé que comblé ! Concernant l’une des célébrités religieuses de la capitale des Gaules, béatifiée par Jean-Paul II lors de sa venue dans la région en 1986, il en va
autrement. Pas le moindre petit panneau pour attirer l’attention du flâneur sur les lieux où vécut le Père Antoine Chevrier (1826-1879) ! Il est tout à fait possible, pour peu que la promenade
mène au quartier de la Guillotière, dans le 7e arrondissement, à deux pas de la place Jean-Macé, de passer mille fois rue du Père-Chevrier,
devant la façade jaune de la chapelle du Prado sans être précisément renseigné sur son origine. Et de s’en détourner sans même entrer à l’intérieur pour y connaître l’œuvre de celui qui racheta
le Prado, une salle de bal, pour catéchiser de jeunes défavorisés de l’époque. « Que ce soit Irénée, Frédéric Ozanam ou l’abbé Pierre, Lyon ne sait pas mettre en valeur ses saints.
Peut-être parce que Marie, notamment à la basilique de Fourvière, prend toute la place. Dans les années 1970, toutes les statues de saints ont été enlevées des paroisses lyonnaises, il ne
restait que la Vierge », regrette en souriant le Père Christian Delorme, curé de la paroisse d’Oullins et Pierre-Bénite, dans la banlieue sud de Lyon. Dans sa ville natale, le Père Chevrier, fondateur de l’Association des prêtres du Prado, est de ces figures dont le patronyme est parfaitement connu des chrétiens sans qu’ils
sachent forcément quelle fut son action. Quant aux « pradosiens », les héritiers d’Antoine Chevrier – prêtres, religieux et religieuses, laïcs, consacrés ou non (ils sont 60 aujourd’hui à Lyon
sur 450 en France) –, ils sont appréciés, bien sûr, mais pas toujours identifiés comme tels. Car ils ne mettent pas forcément en avant leur appartenance, ne serait-ce que parce que les prêtres
du Prado tiennent à leur ancrage diocésain. Prenez, par exemple, le Père Christian Delorme : en dehors d’un petit cercle d’initiés, qui sait que l’un des prêtres les plus médiatiques de
l’Hexagone, prédicateur régulier des messes télévisées sur France 2 et engagé de longue date dans le dialogue islamo-chrétien, est membre de l’Association des prêtres du Prado fondée par le P.
Chevrier le 10 décembre 1860 ? À l’image de tout lyonnais de souche qui se respecte, la discrétion serait donc une marque de fabrique des « pradosiens »,
qui préfèrent le témoignage par l’exemple à une exposition ronflante. La spiritualité pradosienne n’est pas un étendard. Elle est une identité qui se laisse deviner très facilement. « Les
lyonnais identifient bien l’esprit du Prado et cela ne les étonne pas de découvrir que tel prêtre du diocèse fait partie de notre association », explique le Père Philippe Chatagnon,
responsable du séminaire pradosien de Limonest, dans les monts du Lyonnais, siège aussi d’une maison d’accueil bien connue des mouvements chrétiens. Françoise Pioppi, orthophoniste à la
retraite, confirme : cette femme énergique est symbolique de cette famille du Prado, quelque peu informelle mais bien présente à Lyon. Familière des partages d’Évangile ou des sessions qui se
tiennent à Limonest, elle en est proche depuis son arrivée à Lyon pour ses études en 1962. Elle a gardé à jamais le souvenir d’un climat chaleureux, d’une façon directe et simple d’approcher
les gens. « Lors d’une session de catéchèse pour enfants handicapés, les religieuses du Prado m’avaient demandé de faire des crêpes. Rien à voir avec les relations difficiles que j’avais
entretenues avec certaines bonnes sœurs autoritaires durant ma jeunesse… » Pourtant, elle reconnaît avoir mis davantage de temps à découvrir le Père Chevrier. « Pour moi, le Prado,
c’était d’abord des gens. Ils vous acceptent comme vous êtes et ne portent pas de jugement quand votre vie n’a pas toujours pris des lignes droites. Ils transmettent l’Évangile, parce que leur
vie en est imprégnée. » Aujourd’hui, les prêtres du Prado ont peut-être moins d’influence dans la vie du clergé lyonnais qu’à certaines époques.
Effets conjugués de la baisse des vocations et d’une humilité qui les éloigne des actions de communication. Certains regrettent pourtant que la paroisse du Moulin-à-Vent, aux confins du
8e arrondissement où le Père Chevrier fut curé, ne soit plus « tenue » par les pradosiens, comme ce fut longtemps le cas. Mais les disciples du
Père Chevrier n’ont pas pour autant déserté la capitale des Gaules ! Les prêtres du Prado tout comme les sœurs ont leur maison généralice dans la rue
du Père Chevrier. Leur dynamisme pastoral est grandement apprécié là où il s’exerce. Une facilité de plume conduirait à écrire qu’on les trouve plutôt dans les zones défavorisées que dans les
quartiers huppés. Nuançons en disant que les pradosiens ont le souci de porter la Parole à toutes les populations, y compris non croyantes. Curé de Vaulx-en-Velin, dans l’une des banlieues bien
connues de la région lyonnaise, le Père Régis Charre aime cette idée de rencontre, qui implique un déplacement. Originaire de la Presqu’île, entre Rhône et Saône, le Père Chevrier a bravé
l’interdiction de sa mère qui lui déconseillait de « traverser le pont » (du Rhône) pour se rendre à La Guillotière, commune ouvrière à l’époque indépendante de Lyon. Qu’allait-il
faire chez ces « sauvages », demandait-elle. Ayant grandi dans le quartier de la Guillotière, le Père Régis Charre a effectué la même démarche en devenant très vite curé dans
les zones les plus ouvrières et difficiles de la région lyonnaise : Saint-Priest, Rillieux-la-Pape et Vaulx-en-Velin depuis sept ans. « En venant dans la banlieue, j’ai d’une certaine
manière traversé le pont. »
Pourtant, l’un des prêtres les plus attachés au fondateur du Prado ne se trouve-t-il pas au cœur de Lyon, sur la colline de Fourvière ? Le cardinal Philippe
Barbarin n’a pas attendu son arrivée entre Rhône et Saône pour puiser dans les écrits du Père Chevrier une inspiration quotidienne pour son ministère. Au point que son ancien vicaire épiscopal
du diocèse de Moulins s’étonna, une nuit de la Nativité, qu’il ne soit pas entré au Prado, alors que Mgr Barbarin venait de prêcher sur le Noël 1856 du P. Chevrier, moment décisif dans son
désir de se consacrer tout entier aux pauvres. Le Primat des Gaules eut naturellement à cœur d’inviter les Lyonnais à (re)découvrir ce bienheureux méconnu. Ce qu’il a fait en 2006 en rédigeant
une lettre pastorale intitulée Suivre Jésus de près (Éd. Parole et Silence/DDB), qui retrace la vie d’Antoine Chevrier et insiste sur son message. Dans cet ouvrage, le cardinal
Barbarin demandait à toutes les paroisses de faire le pèlerinage du Tableau de Saint-Fons, dans la banlieue lyonnaise, où le message du Père Chevrier est inscrit à même les murs d’une petite
maison sans apprêt. « Être pauvre dans la vie quotidienne ! Son intuition est un trésor pour la société d’aujourd’hui où l’argent gagne toujours, s’enthousiasme le cardinal Barbarin.
C’est un homme viscéralement attaché à l’Évangile, qui tire toutes les conséquences sociales de cette mystique. Il ne sépare pas la prière et l’action, il les réunit. »
===================================================================================== Une action pour les
plus pauvres, nourrie de la parole du Christ
Bruno BOUVET
Le Père Antoine Chevrier n’a cessé de puiser dans une étude attentive de l’Évangile le modèle d’une vie consacrée à l’éducation et à l’évangélisation des
défavorisés.
LA CROIX -
Le Père Yves Musset dans la chambre du P. Chevrier. Derrière lui, près de 2.000 pages rédigées par le fondateur du Prado.
Combien étaient-ils ce jour d’octobre 1879 pour assister aux funérailles du Père Antoine Chevrier à l’église Saint-Louis à Lyon ? 5.000, comme le dira le très
laïque Progrès ou plus exactement 10.000 si l’on en croit Le Nouvelliste ? En tout cas, le petit peuple de la Guillotière, ce quartier industrieux et populaire, autrefois
commune indépendante des faubourgs mais intégrée à la ville de Lyon en 1852, avait tenu à rendre hommage en masse à celui qu’il considérait déjà comme son saint. Antoine Marie Chevrier avait vu le jour le 16 avril 1826, au cœur de la Presqu’île, dans les beaux quartiers de Lyon. Ses parents ne sont pas démesurément riches. Claude, le
père, un homme bon et doux, occupe une modeste fonction d’employé municipal. Sa mère, Marguerite, a mis à profit un fort tempérament pour acquérir un petit atelier de tissage de la soie. Elle a
enseigné à son fils des principes de vie jansénistes qui imprégneront son caractère de rigueur et de ténacité. Ordonné prêtre en 1850, après avoir suivi sa formation au grand séminaire de Lyon
où souffle déjà un fort vent missionnaire, le jeune Père Chevrier se consacre tout entier à son premier ministère : vicaire de la paroisse Saint-André à la Guillotière. Ce prêtre à l’allure
élancée ne ménage pas sa peine pour rendre visite aux malades. De même, il n’écoute que son courage pour porter assistance aux victimes emportées par les inondations qui ravagent les frêles
habitations du quartier, le 31 mai 1856. C’est à la lumière de cet engagement qu’il faut sans doute analyser la « conversion » de la nuit de Noël 1856, sans doute moins brutale que ne le
voudraient des récits trop rapides. Méditant devant la crèche, à l’église Saint-André, le Père Chevrier se sent appelé à suivre le Christ au plus près. Il se fera pauvre parmi les pauvres et
transmettra les enseignements de Jésus, dont l’étude le nourrira quotidiennement. Il veut revenir à l’esprit de l’Évangile, abreuver de cette source les chrétiens dont la tiédeur et
l’assoupissement lui deviennent insupportables. « Nous voyons clairement que, pour devenir son véritable disciple, il faut d’abord renoncer à la famille et au monde, renoncer à soi-même,
renoncer aux biens de la terre. Puis quand on a renoncé à toutes ces choses, il faut ensuite prendre sa croix et le suivre dans toutes les vertus évangéliques », écrit-il dans Le
Véritable Disciple de Jésus-Christ , l’ouvrage de référence qu’il rédige en 1876 à l’intention des futurs prêtres. Le Père Antoine Chevrier ne se
contente pas de mots, il passe à l’action et entraîne d’autres compagnons dans son sillage. Marqué par l’exemple du curé d’Ars, auprès duquel il vint chercher de nombreux conseils, il donne à
sa vie une orientation radicale, se débarrasse du superflu et veut même échanger les meubles du presbytère contre de modestes planches, ce que refusent ses confrères. C’est que le prêtre non
conformiste, peu soucieux de respectabilité publique, a été très fortement marqué par l’exemple de Camille Rambaud : ce bourgeois, qui gagnait sa vie dans la soierie, a abandonné sa situation
professionnelle pour se consacrer aux enfants pauvres et les catéchiser. C’est tout naturellement que le Père Chevrier devient l’aumônier de « La Cité de l’Enfant-Jésus » qui, à la fois, aide
les enfants défavorisés et leur assure le catéchisme. Cette double dimension se retrouve à la Providence du Prado. Ouverte en 1860, la maison accueille des
filles et des garçons, enfants et adolescents, pour qu’ils reçoivent une formation religieuse. Jusqu’en 1879, 2.500 jeunes y passeront pour se préparer à la première communion tout en recevant
un minimum d’instruction. L’accès est totalement gratuit, ce qui rend le fonctionnement aléatoire. Parfois, le Père Chevrier doit aller quêter jusqu’à la porte de l’église de la Charité, place
Bellecour, non loin de là où il est né. Heureusement, le plus souvent, il y a les dons, venus des riches comme des pauvres. Car les ouvriers de la Guillotière se reconnaissent dans ce prêtre
qui vit aussi chichement qu’eux. S’il voit grand, le Père Chevrier sent bien qu’il ne peut rien faire seul. Son dessein ? Former d’autres prêtres qui viendront en aide aux plus pauvres. En
1866, il fonde une école cléricale, pépinière de jeunes d’où seront issus les premiers prêtres du Prado. Ceux-ci sont ordonnés en 1877. L’une des joies ultimes du Père Chevrier qui meurt deux
ans plus tard, au Prado, là où il a passé trente années de sa vie. Là où a éclos l’œuvre qui lui a survécu.
===================================================================================== EXTRAIT d’un
sermon prononcé en avril 1857, cité dans Antoine Chevrier, le chemin du disciple et de l’apôtre (présentation d’Yves Musset, Éd. Parole et Silence) :
«Donnez-moi, ô doux Sauveur, le bonheur de vivre comme vous me l’inspirez» « Ah, je connais bien des misères et
il est douloureux pour un prêtre de ne pouvoir les soulager. Je donnerai tout ce que j’ai. Je comprends qu’il est doux d’être pauvre avec Jésus qui n’avait pas une pierre pour reposer sa tête
et qui n’avait pour lit qu’une croix. Donnez-moi, ô doux Sauveur, le bonheur de vous ressembler et de vivre comme vous me l’inspirez. Voilà mes frères comment je comprends la religion. Je ne
sais pas si je me trompe mais si je me trompe, je n’ai rien à risquer, car j’ai pour moi les saints qui nous ont devancés, les martyrs qui ont donné leur sang, les saints qui se sont sacrifiés
pour Dieu et leur prochain. En lisant la vie des saints, je n’en ai pas trouvé un qui n’ait pas fait le sacrifice de ses biens, de son argent, de son corps, pour le donner à Dieu et au
prochain. (…) Où êtes-vous donc, âmes fidèles, âmes généreuses, âmes vraiment chrétiennes qui désirez vivre vraiment de cette vie de sacrifice,
d’abnégation, de renoncement, qui voulez nous donner de grands exemples de vertu, qui cherchez à aimer Dieu par-dessus toutes choses, qui voulez vous consacrer à lui, où êtes-vous ? (…) Ah ! si
le bon Dieu inspire à quelqu’un d’ici ces grands actes de dévouement, de courage, de vertu, de renoncement, de charité, ah ! qu’il obéisse à cette sainte pensée de la grâce ! Il faut des vertus
! Si Dieu vous inspirait le courage de vous consacrer au soin des malheureux, à l’instruction de tant de pauvres enfants qui languissent dans ces ateliers et qui ne reçoivent aucun aliment
spirituel ; s’il vous inspirait le goût de panser les plaies, de garder les infirmes, d’aller chercher le pain des pauvres, de vous consacrer à cela par le dévouement, en vue de Dieu, par
humilité, par imitation de Jésus qui a lavé les pieds à ses apôtres, quelle belle œuvre ! Que de mérites pour vous ! Ah ! suivez ces saintes inspirations ! Obéissez à la voix de Dieu ! »
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Un esprit d’accueil pour entretenir la mémoire À Lyon comme à Limonest, il n’y a pas de musée du P.
Chevrier, mais plutôt des lieux historiques où la simplicité de leur fondateur reste perceptible
TABLEAU de St FONS BRUNO AMSELLEM La veille, ils étaient à Ars. En fin d’après-midi, ils partiront pour Notre-Dame de La Salette. Mais, ce matin, les 77 participants du pèlerinage annuel du diocèse de Quimper
sont accrochés aux paroles du Père Richard Holterbach, assistant du provincial de France du Prado.
La plupart ne connaissaient pas le Père Antoine Chevrier avant de faire étape à Lyon, dans la chapelle qu’il édifia, au numéro 13 de la rue qui porte aujourd’hui
son nom, dans le 7e arrondissement. Assis sur les étroits bancs d’époque, ils découvrent les grandes étapes de sa vie, au cœur de laquelle sa
décision de « devenir pauvre parmi les pauvres» semble les toucher directement. L’immense crèche, installée à demeure dans l’aile gauche de la chapelle, rappelle le soir décisif de
Noël 1856. Lorsque le Père Chevrier choisit de se consacrer tout entier aux jeunes du quartier de la Guillotière et d’abandonner tous les éléments matériels qui pouvaient l’en détourner.
Dans son récit, mené d’une manière vive et chaleureuse, le Père Holterbach cherche à provoquer un écho personnel dans son auditoire. Cette visite à la chapelle
s’inscrit dans une démarche d’ordre spirituel. Plus de 7 000 prêtres sont passés ici tout au long de l’Année sacerdotale voulue par Benoît XVI. Une proposition de pèlerinage à Lyon avait
d’ailleurs été envoyée dans chaque diocèse dont les groupes envisageaient de se rendre à Ars. Elle a rencontré un vif succès. À chaque fois, un prêtre du Prado accompagne les visiteurs. Une
messe est célébrée chaque vendredi et des permanences d’accueil se tiennent deux fois par semaine. « Nous n’avons jamais conçu ce lieu comme un musée », précise le Père Holterbach. La
veille, il a accueilli à l’improviste un groupe de six personnes. Leur visite des lieux historiques du Prado s’est conclue par un temps de prière, simple et fraternel. Avant la messe avec le
groupe de Quimper, le prêtre pradosien prend le temps de raconter l’origine des lieux. Un joli film, projeté dans une petite salle annexe, éclaire la démarche du Père Chevrier.
« Si vous avez besoin d’un pauvre, me voici. Si vous avez besoin d’un fou, me voici », disait-il. Lorsque la lumière se rallume, les bretons
échangent sur le sens missionnaire de ce prêtre qui leur rappelle l’audace de Mère Teresa ou de Sœur Emmanuelle. Le Prado, c’était une ancienne salle de
bal, que le jeune curé lyonnais loua avant d’en faire l’acquisition pour mener son œuvre d’éducation. Autrefois, plus de 1.000 personnes pouvaient danser en même temps. Les riverains du
quartier avaient maintes fois réclamé aux autorités locales la suppression de cet espace nocturne qui accueillait petites frappes et femmes de mauvaise vie. La chapelle du Prado, dont
l’intérieur fut rénové il y a une vingtaine d’années, ne présente pas de génie architectural particulier. Mais l’esprit de son fondateur est resté. Au premier étage, il est encore possible
d’entrer dans sa petite chambre, maintenue dans son modeste état d’origine. « Chaque jour, quand je passe devant la pièce, je lui dis que j’essaie de faire de mon mieux », s’amuse
le P. Holterbach, qui vit avec sa communauté au 13 de la rue du Père-Chevrier. Cette simplicité, si prompte à mettre à l’aise le visiteur de passage, les
pèlerins de Quimper la retrouveront, l’après-midi, dans l’un des autres lieux qui portent la marque du fondateur du Prado. À Limonest, dans l’Ouest lyonnais, qui abrite à la fois un centre
spirituel de 75 chambres et le séminaire du Prado. Elle est aussi le siège de « l’année pradosienne de formation internationale». Là encore, la grande bâtisse du XVII siècle – achetée par le P.
Chevrier en 1872 pour accueillir une vingtaine de jeunes – n’attire pas pour sa singularité esthétique, mais pour la quiétude de son décor – très belle vue sur Fourvière depuis le jardin ! – et
la cordialité de l’accueil, la pierre angulaire de la « fraternité pradosienne ». Les groupes aiment se retrouver dans la vaste salle à manger,
rénovée il y a dix ans, et le Père Adrien Muller, responsable des lieux, en donne deux raisons parmi tant d’autres : « Les prêtres participent eux-mêmes au service à table, ce qui peut
étonner certains, et nous faisons attention à ce que chacun trouve sa place. Notamment lors des discussions pendant le repas. » Ici, la mémoire du Père Chevrier est cultivée avec
discrétion. Dans la jolie chapelle, décorée des peintures chaudes et colorées du P. Richard Holterbach, une réplique du Tableau de Saint-Fons (lire ci-dessous) a été installée. À
l’étage de la maison, en traversant sur le long balcon, rien n’indique la présence d’un lieu « historique ». Là encore, la disposition de la petite chambre, où le P. Chevrier a séjourné avant
sa mort, n’a pas été modifiée. Même le papier peint (d’époque) garde la trace émouvante des crachats de sang du malheureux. Seule une armoire métallique a été rajoutée dans la pièce. Elle
contient l’un des trésors de la maison de Limonest : 2.000 pages manuscrites d’études de l’Évangile, la plupart rédigées par le Père Chevrier. Il ne faut pas hésiter à demander au Père
Yves Musset, leur plus fin exégète, de vous les présenter : il en connaît chaque ligne…
2- Les Roms sont nos frères comme tant
d’autres
Communiqué de presse envoyé aux journalistes le 27 août 2010 :
En août 1942, Monseigneur SALIEGE, archevêque de Toulouse ordonnait la lecture publique d'une lettre pastorale restée célèbre intégralement
reproduite ci-dessous et dont voici deux extraits : « Que des enfants, des femmes, des hommes, des pères et des mères soient traités comme un vil troupeau, que les membres d’une même
famille soient séparés les uns des autres et embarqués pour une destination inconnue, il était réservé à notre temps de voir ce triste spectacle. » … « Les Juifs sont des hommes, les Juives
sont des femmes. Tout n’est pas permis contre eux, contre ces hommes, contre ces femmes, contre ces pères et mères de famille. Ils font partie du genre humain. Ils sont nos Frères comme
tant d’autres. Un chrétien ne peut l’oublier. »
En août 2010, en France, des campements de Roms sont démantelés et des expulsions soi-disant volontaires du territoire français sont
largement médiatisées. Devant de tels agissements et les déclarations répétées de plusieurs membres du gouvernement, nous ne pouvons rester silencieux et nous associons pleinement aux
prises de position des responsables de la Pastorale des Gens du voyage et des Migrants, et de la Communauté Mission de France rejoignant la conclusion de leur texte :
« Nous ne pouvons nous résoudre à voir les Rom et Gens du voyage victimes de préjugés et d’amalgames, boucs-émissaires désignés des difficultés de
notre société, alors qu’ils en sont souvent les premières victimes. Nous sommes convaincus que le remède à la peur et à l’insécurité ne se trouve pas dans une surenchère sécuritaire mais
passe par une action de longue haleine nourrie de respect et de connaissance réciproques. »
Avec le pape Benoit XVI, nous souhaitons rappeler les catholiques de notre diocèse et tout homme de bonne volonté à "l’accueil des hommes de toutes
origines" et à la "fraternité universelle".
+ fr Robert Le Gall,
Archevêque de Toulouse