Pensons la migration dans sa globalité, depuis l’idée de coopération et de développement jusqu’à l’intégration des immigrés vivant chez nous
Hier Antoine a quitté la pièce de la maison paroissiale où il venait dormir depuis plusieurs mois. De la pente de la colline de la Croix-rousse il s’est envolé, en très bonne compagnie, vers des montagnes plus hautes. J’espère que sa migration prendra fin et que son avenir se construira enfin en toute sérénité. Mais cela n’est pas encore acquit. Les informations que nous recevons de l’Europe manifestent toujours le refus des pouvoirs occidentaux de recevoir dignement le gens que la loi qualifie d’étranger.
Mais qui est Antoine ?
J’en ai plusieurs fois parlé dans ce blog. Vous pouvez par exemple venir ici.
Et si vous êtes intéressés pour lire plus de nouvelles, écrivez dans le moteur de recherche de cette page les mots « Antoine Manson-Vigou » et vous aurez de quoi lire.
Le Progrès en a récemment parlé à l’occasion de son dernier livre : Dans le secret. Il titre Antoine Manson Vigou invite le lecteur dans un univers romanesque. Il y a certes de l’imaginaire. Personnellement, la connaissance de cet homme m’incite à dire que l’imaginaire dont il est question s’enracine dans un vécu bien réel. Dans le secret s’inscrit tout simplement dans une suite logique du premier livre : Journal d’un demandeur d’asile.
Donc, Antoine quittant Lyon avec toutes ses affaires tourne une page. Mais soyons plus précis. Il va rejoindre des personnes connues, des amis rencontrés il y a quelques années sur les pentes de la Croix-rousse lyonnaise. Le monde d’aujourd’hui vit dans la migration. Certaines légales, d’autres non.
Le problème du logement est devenu crucial depuis deux ou trois ans. Il me semble qu’à mes débuts dans le soutien des « sans papiers » avec RESF et la Cimade , deux instances présentes dans le quartier polycarpien où je vis, on trouvait plus facilement des occasions de répondre positivement au besoin de dormir au sec. Sans papier – sans toit est devenu le slogan qui colle le mieux à la réalité.
En voici une preuve.
Une heure après le départ d’Antoine, un père et ses deux enfants (5 et 7 ans) si je ne me trompe, se présentent à la maison paroissiale. Ils étaient sur une liste d’attente depuis plusieurs mois. Comment ce père au parlé russe peut-il se trouver dans la rue avec deux très jeunes enfants ? Où est la mère ? Sans poser cette trop délicate question, j’apprends grâce au dialogue favorisé par une amie interprète qui a connu une situation semblable que l’épouse de ce monsieur, la mère des deux garçons, est hébergée chez des religieuses qui n’accueillent que les femmes. Pour que la mère puisse dormir au calme, il fallait laisser à la rue le père et les deux garçons. Cela me semble tellement étrange que je me suis renseigné. J’ai obtenu cette réponse : effectivement, dans cette maison de religieuses, les hommes ne sont pas admis, alors les familles se voient séparées. J’essaye de voir dans cette situation un moindre mal ; la mère est au moins en sécurité. Dans ma petite tête, je n’arrive quand même pas à trouver une place à ce type de séparation.
En fait, élargissons la réflexion. Si j’ai eu le désir de décrire ce que j’ai vécu hier en voyant qu’à peine l’un parti, d’autres –en plus grande difficulté- venaient sans aucun doute suite à une information diffusée par les personnes avec qui nous sommes quotidiennement en lien, c’est que je venais de lire un article dans le quotidien « La Croix » exposant la fermeture des Européens à l’accueil des migrants. Je livre cet article qui s’avère être une bonne préparation à notre mission d’électeur chrétien souhaitant une monde universel et fraternel.
par Sylvie Guillaume, eurodéputée de la région sud-Est (S&D = Alliance progressiste des socialistes et démocrates au Parlement européen.
Membre de la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures au Parlement européen, Sylvie Guillaume pointe le manque de solidarité entre États dans le domaine de l’immigration.
« La politique européenne de l’immigration est clairement insatisfaisante. Preuve en est la multiplication des crises comme celles – très visibles – de Lampedusa et du naufrage de navires, ou celles qui ont lieu en Grèce, où des centaines de personnes sont retenues dans le pays, après y être entrées illégalement.
L’approche européenne de l’immigration est insuffisante et la crise économique que nous traversons a contribué à radicaliser les positions de bon nombre d’États, en renforçant le repli sur eux-mêmes. L’approche européenne est morcelée et ne fait ainsi l’objet d’aucune vision globale.
Certains textes sont entrés en vigueur récemment, comme le statut des travailleurs saisonniers, mais ils demeurent très marginaux. Preuve de ce morcellement, certains qualifient l’Europe de forteresse et d’autres de passoire. Par ailleurs, la solidarité entre les États est clairement insuffisante.
« Considérer la migration au sens large »
Les pays du pourtour de l’Europe, comme la Grèce, l’Espagne ou l’Italie, font l’objet d’une très grande pression, par rapport aux pays du centre de l’Europe, qui sont moins directement confrontés à l’immigration irrégulière. Les États les moins exposés ont tendance à se défausser sur les pays qui bordent l’Europe.
L’Europe constitue pourtant le bon niveau de réflexion pour travailler sur les questions migratoires, en les déconnectant des enjeux nationaux souvent exacerbés. L’UE et ses États doivent promouvoir une approche sereine de cette question : cela passe notamment par le fait de considérer la migration au sens large comme un phénomène qui a toujours existé et existera toujours.
Ces mouvements sont nécessaires pour alimenter la vie économique et culturelle des 28 pays de l’UE. Il faut aussi que nous soyons capables de penser la question migratoire dans sa globalité, depuis les questions de coopération et de développement, jusqu’à l’intégration des immigrés qui arrivent dans nos pays. Il nous faut aussi retravailler sur les voies légales de migration : plus la migration est régulée et régulière, plus l’immigration irrégulière et ses réseaux de passeurs sont affaiblis. »