Il ne faut jamais désespérer. Dieu est Dieu et sa Sagesse ne peut que s’installer dans sa Création, même si le XXIe s. se montre aveugle
Nativité, Bruno Gratas - L’œuvre de Bruno Gratas réveille en moi l’actualité et la permanence de Jésus-Christ.
La dernière phrase de la lecture de l’Évangile de ce jour, 9 décembre, m’a suscité deux réflexions qui me semblent complémentaires quoiqu’appartenant à des domaines différents.
Matthieu 11, 19 : la sagesse de Dieu a été reconnue juste à travers ce qu’elle fait.
Ma première réflexion jaillit de la tendance productiviste du monde actuel. Les décideurs savent que la Terre est limitée, mais ils maintiennent, globalement, des politiques expansionnistes comme s’ils ne voyaient aucun problème. Le groupe « Chrétiens et pic de pétrole », parle habituellement de l’aveuglement des politiques économistes. Les conférences données ce mois avec la chaire Jean Bastaire en témoignent.
Ma deuxième réflexion émane du non-accueil fondamental des migrants dont font preuve les pays industrialisés. La montée des populismes est effrayante. Voir les gouvernements suivre les tendances protectionnistes droitières pour ne pas perdre des électeurs, dramatiques. Certes, depuis la décision de ne plus avoir de camps à Calais, des communes ont pris les moyens de donner un toit à des migrants et de créer des structures pour les accompagner. Nous observons, dans ce cadre, de beaux témoignages de solidarité. Mais, comme je le dis souvent, les causes de ces migrations ne sont pas abordées. Il y a deux sortes de guerres, la militaire et l’économique. Tant que celles-ci ne seront pas supprimées, considérées en leurs causes, des gens, pour fuir la mort, tant causée par des bombes que par la faim, partiront de chez eux. Assis dans nos fauteuils, nous regardons les destructions des logements et les foules transporter de maigres bagages alors que nous ne pouvons que constater nos impuissances. Si au moins, nous recevions plus largement les personnes déplacées ! Si au moins nous arrivions à faire comprendre aux décideurs qu’il n’y a pas à distinguer les réfugiés politiques des migrants économiques ! En effet, dire que ces derniers n’ont pas vocation à rester en Europe est inhumain. Il est barbare de leur délivrer des OQTF : obligation à quitter le territoire français. Qui peut ignorer que, tout en ouvrant des centres d’accueil, le gouvernement maintient les arrestations de famille dans le but d’évacuer dans les pays d’origine. Ainsi, l’Office Français de l'Immigration et de l'Intégration, suite à une expulsion cette semaine d’une famille d’un hôtel Formule 1, se montre habilité à accueillir « pour envisager avec vous (les migrants) les différentes possibilités de poursuivre votre mise à l'abri dans le cadre du dispositif d'aide au départ ».
Joli jargon administratif pour dire à la famille D. de Bosnie, qu'elle a désormais le choix entre deux choses :
- être hébergée encore quelques jours dans un hôtel ou un foyer géré directement par l'OFII... mais à condition de signer une déclaration de "retour volontaire au pays" et d'accepter les conditions de contrôle policier du régime d'assignation à résidence mis en place par l'OFII le temps de trouver un avion ou un, car à destination de la Bosnie.
- refuser l'offre de l'OFII... et se retrouver dès aujourd'hui à la rue.
Ces deux domaines donnent à penser que l’homme du XXIe siècle ne croit pas en ce qu’il sait. Je trouve très forte et très juste cette sentence. Elle souligne l’inertie présente. Montre l’absence de sens de notre société post-industrielle. Pour maintenir les habitudes et privilèges anciens (qui, de fait n’en sont plus), le XXIe siècle ne veut pas voir. S’il voit, s’il connaît la politique qui serait à conduire, il ne veut pas le croire.
Cette formule que je trouve très signifiante a été employée en 2007 par Jean-Pierre Dupuy à propos du Climat « Même lorsque nous savons que la catastrophe est devant nous, nous ne croyons pas ce que nous savons. » et encore : « Nous savons, ou nous devrions savoir, mais nous ne croyons pas ce que nous savons ». Cette formule est souvent reprise dans les milieux de l’objection de croissance.
Face à un tel aveuglement, nous pourrions désespérer. Matthieu m’invite à l’espérance.
Matthieu 11, 19 : la sagesse de Dieu a été reconnue juste à travers ce qu’elle fait.
Le contexte de cette petite phrase montre que les contemporains de Jésus, ne veulent pas écouter les envoyés de Dieu. Pourtant, ils se réclament fidèles à la loi divine. Disons : fidèles à leurs habitudes. Ils ne veulent rien en changer et refusent tout autre art de vivre que cela soit un prophète ancien, ou Jean le Baptiste, ou Jésus qui le propose.
Dans ce passage, Mt 11, 16-19, Jésus porte donc un jugement sur ses contemporains qui rejettent les envoyés de Dieu. Ils ont critiqué Jean Baptiste, ils refusent aujourd’hui le Fils de l’homme. Mais malgré cela, la sagesse de Dieu –incarnée dans le Christ- sera victorieuse (Pierre Jounel).
Ce que je trouve admirable dans ce passage, c’est que, tout en accusant les siens de ne pas recevoir le Vrai qui se présente, Jésus (et l’évangéliste à sa suite) témoigne qu’il ne faut pas désespérer. Dieu est Dieu et sa Sagesse ne peut que s’installer dans sa Création.
Quand on voit que tout va mal, sans cesse il faut se dire, que le mieux arrivera, car le Créateur ne peut abandonner son Œuvre. Foi en l’amoureuse bonté de Dieu. Foi en la Résurrection qui donne sens à la vie présente. La Vie ne peut que triompher de l’aveuglement des hommes. C’est cette foi qui donne la force au militant de ne jamais abandonner sa lutte pour un monde plus juste, solidaire et aimant.
Méditant ce passage dans un temps de préparation à Noël, j’ai découvert les homélies de Gilbert Adam : « La Venue de Jésus à Noël, la Venue de Jésus en nous, opère un changement de perspective. Nous sommes appelés à la Joie, à la vraie Joie durable qui nous est donnée par Jésus, le fils de Marie, le Fils Unique de notre Père du Ciel. Avec Jésus, rien n’est plus comme avant, car il a changé le cours de l’histoire humaine. »
Je vous souhaite une bonne méditation et heureuse préparation à Noël pour que notre univers techniciste sorte de son enfermement aveuglant.