Dire son admiration pour les mages qui d’un statut inconnu deviennent des compagnons de route, des « étoiles » pour guider auprès de Dieu
Je vous livre ici la préparation d’Éliane pour la récollection du dimanche 17 mars 2019 avec des laïc(que)s du Prado. C’est une journée qui se passe au Centre spirituel du Prado, maison Saint-André à Limonest. Voir ci-dessous, document joint, le livret de ce temps de méditation.
L’audace des Mages !
En de nombreux secteurs, l’Église vit de sombres journées. J’en parlais récemment. Comment, chrétiens de base, garder le cap de l’Évangile ? Ne nous faut-il pas l’audace et le courage des Mages partis à la découverte d’un nouveau-né sous les auspices d’une étoile ?
Matthieu 2,1-12
Jésus était né à Bethléem en Judée, au temps du roi Hérode le Grand. Or, voici que des mages venus d’Orient arrivèrent à Jérusalem et demandèrent : « Où est le roi des juifs qui vient de naître ? Nous avons vu son étoile à l’orient et nous sommes venus nous prosterner devant lui. »
En apprenant cela, le roi Hérode fut bouleversé, et tout Jérusalem avec lui. Il réunit tous les grands prêtres et les scribes du peuple pour leur demander où devait naître le Christ. Ils lui répondirent : « à Bethléem en Judée, car voici ce qui est écrit par le prophète : et toi, Bethléem, terre de Juda, tu n’es certes pas le dernier parmi les chefs-lieux de Juda, car de toi sortira un chef, qui sera le berger de mon peuple, Israël. »
Alors, Hérode convoqua les mages en secret pour leur faire préciser à quelle date l’étoile était apparue ; puis, il les envoya à Bethléem, en leur disant : « allez vous renseigner avec précision sur l’enfant. Et quand vous l’aurez trouvé, venez me l’annoncer pour que j’aille, moi aussi, me prosterner devant lui. » Après avoir entendu le roi, ils partirent.
Et voici que l’étoile qu’ils avaient vue à l’orient les précédait, jusqu’à ce qu’elle vienne s’arrêter au-dessus de l’endroit où se trouvait l’enfant. Quand ils virent l’étoile, ils se réjouirent d’une très grande joie. Ils entrèrent dans la maison, ils virent l’enfant avec Marie sa mère ; et, tombant à ses pieds, ils se prosternèrent devant lui. Ils ouvrirent leurs coffrets, et lui offrirent leurs présents : de l’or, de l’encens, de la myrrhe. Mais, avertis en songe de ne pas retourner chez Hérode, ils regagnèrent leur pays par un autre chemin.
Éliane :
Pour cette étude d’Évangile, après une brève présentation des personnages et des lieux, je reprends les trois points proposés dans la feuille d’invitation. Ce sont des pistes d’entrée pour la méditation prévue pendant le temps personnel et la réflexion en carrefours.
Les personnages « silencieux »
- L’enfant qui sera la seule dénomination dans le reste du texte alors qu’il aura trois noms dans les cinq premières lignes : Jésus ; le roi des juifs ; le Christ…
- Cet enfant, un bébé comme les autres ? Pas si sûr ! Dès sa naissance, il est mal vu des puissants…
- Marie qui assiste silencieusement, sans mot dire…
- Les lieux avec
- Bethléem, lieu de la naissance donc de la vie, l’ouverture, l’avenir…
- Jérusalem, lieu du Livre, de la Loi, du Savoir qui enferme…
- Il y a aussi l’étoile qui alerte les mages de la naissance de Jésus, qui les fait passer par Jérusalem puis les « précède avant de s’arrêter au-dessus de l’endroit où se trouvait l’entant. »
- Les mages se déplacent vers Bethléem
Nous savons peu de choses sur eux ; sont-ils des rois ? Des savants ? Des scientifiques ?... Donc, rien sur leur identité, car l’essentiel pour Mathieu, c’est le message, l’enseignement porté par leur démarche impulsée par la naissance de Jésus ; une sorte de pèlerinage qui se déroule en quatre temps :
- Le départ d’Orient
- Le passage à Jérusalem.
- L’arrivée vers « l’enfant »
- Leur retour par un autre chemin.
Ils arrivent d’Orient, guidés par une étoile… qui les fait passer par Jérusalem où ils ne vont pas se laisser impressionner par Hérode et son conseil. Ils ne dévient pas de leur objectif qui est « d’aller se prosterner devant le roi des juifs qui vient de naître.»
Nous ne pouvons qu’admirer le courage, la persévérance la confiance de ces mages qui quittent tout, qui se laissent déplacer pour suivre l’étoile, leur seule boussole. Que de mouvements ! Ils partent, ils suivent l’étoile, ils rencontrent… ils questionnent… ils prennent des risques pour s’aventurer vers l’inconnu… puis après cette hardiesse, ils donnent, ils adorent…
A noter que l’étoile est bien leur guide et non leur but : ils ne vont pas se prosterner devant elle, mais bien devant celui qu’elle désigne.
Pourquoi passent-ils par Jérusalem ? Là, où l’étoile ne brille plus, semble-t-il ? - pour scruter les écritures, s’assurer que celui dont elles parlent est bien celui qu’ils veulent adorer.
Au début, je disais que nous ne savions rien de ces mages – aucun C V ! » - mais nous pouvons penser qu’ils ne font pas partie du peuple de Dieu ; ce serait donc des étrangers, des chercheurs de Dieu, les premiers à être venus adorer Jésus, qu’ils découvrent dans une maison (là encore, aucune précision) avec Marie, sa mère.
Que d’humilité et d’abandon de soi-même :
- Ils tombent aux pieds de l’enfant
- Ils se prosternent devant lui
- Ils ouvrent leurs coffrets et lui offrent des présents comme à un roi et non comme à un enfant :
- De l’or symbole de la royauté, du pouvoir, des richesses. Pour Matthieu offrir l’or cela veut dire que les richesses du monde appartiennent à Dieu.
- De l’encens, signe de la prière qui monte vers Dieu. Pour Matthieu cela veut dire que Dieu seul on peut adorer.
- De la myrrhe, un parfum (utilisé pour les fêtes) qui servait à embaumer les morts. C’est un signal que donne Matthieu à ses lecteurs pour leur indiquer que celui que les mages viennent adorer donnera sa vie pour nous.
Après un tel dépouillement, c’était des hommes nouveaux, donc il est normal qu’ils reviennent par un autre chemin ! Ils sont animés par la foi, l’espérance, les fondements de la sainteté. Matthieu veut nous dire que toute rencontre avec Jésus change la vie.
- Hérode et tout Jérusalem furent troublés.
Cet enfant, né dans une étable, ne devrait pas être motif de bouleversement de l’ordre établi, et pourtant…
Le roi Hérode, surpris et inquiet par la question des mages convoque les grands prêtres et les scribes qui vont faire leur travail, à savoir « scruter les écritures » et retenir que « de Bethléem, Terre de Juda, il sortira un chef qui sera le berger de mon peuple, Israël. »
Quel contraste entre ces mages qui posent des questions ouvertement, cette assemblée repliée sur elle-même et le roi attaché à son pouvoir, à sa gloire, à ses richesses,
Hérode, rusé, va convoquer les mages, en quête de deux précisions : la date d’apparition de l’étoile et le lieu exact où se trouve l’enfant. Il n’est pas concerné par le symbole de l’étoile. Visiblement cet enfant lui fait peur. Sent-il son autorité menacée ? Craint-il d’être destitué ? Cet enfant risquerait-il d’être un rival ? Comment va-t-il réagir lorsqu’il comprendra que les mages, qu’il avait utilisés comme espions, l’ont déjoué ?
- Quelle résonnance pour moi ?
Tout d’abord, je voudrais dire mon admiration pour ces mages qui, d’un statut inconnu deviennent des compagnons de route, des « étoiles » pour nous guider auprès de Dieu. Ils nous apprennent à nous laisser conduire par l’étoile et donc de dépasser notre immédiateté, nos biens, notre sécurité.
Les mages me font aussi penser à ces nombreux migrants qui traversent forêts, marécages pour s’entasser ensuite dans des bateaux pneumatiques « vendus » par des passeurs mafieux. Ce sont des hommes, des femmes, des enfants qui sont acculés à quitter leur terre natale en raison de la misère, des conflits de toute sorte, des guerres.
Au-delà de cette traversée de l’inconnu, ils espèrent trouver en Occident, dignité, liberté et travail. Heureusement, pour certains, après avoir franchi ces écueils successifs, ils rencontrent des personnes engagées pour les aider à se poser, à s’intégrer par le biais d’associations, d’accompagnement, d’hébergement…
Oui, les mages nous invitent à nous aventurer hors de nos frontières habituelles pour rencontrer Jésus dans des lieux inattendus…
Oui, les mages nous invitent à aventurer notre foi sur les chemins du monde, à nous approcher du lointain, à entrer dans la familiarité de l’étranger.
Avec eux, apprenons à reconnaître, à nous laisser contaminer par la Bonne Nouvelle et dépasser nos certitudes, notre confort, nos suffisances morales, religieuses….
Avec eux, sortons de nos routines pour prendre le chemin ouvert par Jésus.