Rendre grâce. Constater la fidélité, la permanence, l’existence d’un sillon toujours creusé dans la même direction, rend honnêtement heureux

Publié le par Michel Durand

Retraite au Prado, prêtres et laïcs consacrés (frères), maison Saint-André

Retraite au Prado, prêtres et laïcs consacrés (frères), maison Saint-André

La dernière semaine d’août, je participais à la retraite annuelle donnée en la maison Saint-André à Limonest. Retraite spirituelle menée par Jean-Pierre Gralletévêque émérite de Strasbourg.

En clôture nous avons été invités à présenter l’essentiel de ce que nous avons ressenti durant cette semaine. Ce qui nous a principalement marqués et que nous retenons pour le futur.

À cet effet, j’ai rédigé cette page - quelques notes, supports d’une libre prise de parole.

 

Un souvenir des années 60 : par rapport au cahier de vie, ou révision de vie, à la prise de notes des entretiens avec l’accompagnateur spirituel (directeur de conscience) ——— > en relisant ce qui est écrit, on découvre la constance du chemin suivi. Dieu nous appelle pour une mission et sans cesse il nous conduit sur ce chemin. La relecture du cahier de vie (des notes prises à cet effet) indique que le sillon que nous traçons est bien droit. Cela indique la fidélité à l’appel reçu.

Sans cesse creuser et recreuser le même sillon. Cette phrase entendue en direction spirituelle, je la redis souvent par exemple, à des artistes peintres qui cherchent leur style.

Pour cette retraite, c’est comme si je regardais le sillon tracé depuis ma classe de seconde. À savoir, volonté, désir de faire de la vie - de ma vie- quelque chose de fort. Découverte de l’importance de l’Évangile. Surtout, sentiment que le mode de vie de mon milieu d’origine ne peut apporter le bonheur. C’était, avec la Jeunesse étudiante chrétienne, un regard vers le Tiers monde. Justice, fraternité entre milieux sociaux. Désir de vie simple, sobre. Partage. Découverte d’Antoine Chevrier : une Église proche de nous, proche de tous, parlant comme tout le monde. Église sans vêtement de dentelles. Merci aux Frères des Écoles chrétiennes.

Une Église communion fraternelle dans la simplicité et la décontraction.

Je transpose à maintenant. Une assemblée de fidèles du Christ qui ne s’enferme pas dans la sacristie, mais qui est présente sur le parvis, les trottoirs. Une Église qui place le Christ au centre. En liturgie eucharistique, je signale cela par le plan centré du bâtiment église. La communauté forme un cercle au milieu duquel prend place l’autel, symbole du Christ. Une communauté de prêtres, de prophètes, de roi. De baptisés. Nous nous retrouvons pour prier. La prière commence quand nous sommes tous réunis. Le président de la liturgie (le prêtre, les membres du clergé) n’a pas besoin d’entrer solennellement par la porte du fond - dans une musique tonitruante - pour que commence la prière ; il émane du groupe en prière, en faisant parti de ce groupe in personna christi.

En présence des pauvres, des marginalisés de la société dominante.

Au Prado, nous sommes nombreux à être proches des migrants. Dans les années 70, il était plutôt question des Portugais. Aujourd’hui, on parle de crise migratoire.

Le sillon que je continue de tracer pour l’Église m’indique la maison-église des 2-4e siècle. C’est une villa romaine : une grande salle pour l’eucharistie ouverte au fond d’une cour arborée. Proche de la porte qui donne sur la rue, il ya la pièce pour les baptêmes et la pièce pour la diaconie, le lieu où sont placés ce qui est destiné aux pauvres - veuves, orphelins, étrangers.

Je me dis : cette salle d’accueil diaconale, dans chaque maison paroissiale, devrait directement donner sur le trottoir. Si aujourd’hui cela manque, peut-être devrions-nous mettre en place de nouvelles œuvres pour suppléer aux carences de l’État.

 

En ce domaine, avec discernement, je songe à la l’inévitable désobéissance civile. En conscience : objection de conscience, objection de croissance, décroissance économique pour plus de croissance humaine et spirituelle.

Un sillon qu’il me semble avoir toujours creusé, sous des formes diverses selon les époques. Aujourd’hui, en Église, nous ne pouvons pas annoncer la liberté selon l’Évangile et en même temps obéir aux lois de l’économie qui servent aveuglément l’idolâtrie du dieu argent. L’argent est le fumier du diable.

Dans mes homélies et autres prises de parole, je tâche de concrétiser ces idées. Elles ont été plusieurs fois développées pendant cette semaine de retraite. Je pense en faire part dans les jours ou semaines à venir.

Je termine. Dans ma situation de retraité où la prière a une large place, je continue à creuser ce sillon. Prière chantée avec les moines grâce à internet et au système numérique. Et avoir constaté la fidélité, la permanence, l’existence de ce sillon toujours creusé dans la même direction, me rend honnêtement heureux. Action de grâce !

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