Sacerdoce adamique

Publié le par Michel Durand

 

Nous avons déjà lu de nombreux articles sur le prêtre rédigés par Robert. Je ferais bientôt une page de liens pour tous les rassembler. Ces textes sont exigeants à lire, mais combien important ! Que serait le prêtre sans l'homme ? Le sacerdoce ministériel sans l'adamique ?

Avez-vous lu des romans Pietro de Paoli, la confession de Castelgondolfo, Vatican 2035… ? Ils nous placent sous ce même visage sacerdotal qui ne peut prendre sa source que dans une réponse personnelle à l’appel toute humaine (adamique) à réussir sa vie d’homme.

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Utilisée dans la période pré-conciliaire, dans les décennies du centre du XXe s., l’expression : « sacerdoce adamique » est tombée dans l’oubli. Elle ne fut pas reprise telle quelle par les textes issus du Concile Vatican II.

 

Cependant, la notion de l’homme, sa dignité et sa mission éminentes dans la création et sa marche historique, elle, en revanche, a été particulièrement approfondie par ces mêmes textes, de telle sorte que le contenu, exprimé naguère par l’expression : « sacerdoce adamique » se trouve objectivement pris en compte, très précisément dans « la Constitution pastorale de l’Eglise dans le monde de ce temps » G.S., 3/1, 11-12, 14-15, 36, 39, 55, 56 ; et, aussi, dans la Déclaration sur le liberté religieuse, 3.

 

Vérité qui n’est pas atteinte au terme d’une éventuelle conquête de l’esprit humain, « l’homme image de Dieu » la source du sacerdoce adamique relève de l’enseignement biblique, accessible à tous les lecteurs certes ! mais dont l’efficacité adéquate en chacun, dépend de la réception personnelle dans la foi en Dieu. Cf. Gn. 1 à 9, 1-17 ; Ez. 28,12 ; PS 8 ; Si.17 ; 36,10. Dan. 3, 57-60.

 

  1. 1.    LA SOURCE DIVINE DU SACREDOCE ADAMIQUE

Pour exprimer, le langage plus actuel, l’enseignement biblique, relatif à « l’homme image de Dieu », cf. Gn.1, 25-27 ; 9, 6 ; Si. 17, 1-4 ; Sg .2, 23 ; le concile de Vatican II a choisi l’heureuse expression : « un germe divin est déposé en l’homme » cf. G.S. 3/1.

 

1.1.         L’appel du premier homme à la vie n’advient qu’au dernier jour de la création, le 6ème, selon Gn. 1, 1-2, 4, comme si l’être humain était ordonné, selon le dessein de Dieu, à en occuper le plus haut degré, le sommet absolu de l’œuvre divine. 

En outre, l’appel est précédé – et lui seul ! – d’un temps d’arrêt, d’une réflexion, d’un dialogue intérieur, comme s’ils étaient nécessaires devant l’extraordinaire engagement pris : mettre une part divine – un germe – dans l’homme : « faisons l’homme à notre image… » et suivie immédiatement du passage à l’autre : « Dieu créa l’homme à son image, à l’image de Dieu il le créa homme et femme » cf. Gn. 1, 26-27.

 

1.2.         Toutes les infidélités existentielles, commises par les hommes qui jalonnent leur histoire primitive, depuis la Création jusqu’au Déluge universel, cf. Gn. 1 à 8, à savoir : soumissions  à l’esprit du mauvais, désobéissances, meurtres fratricides, mariages contre-nature, corruptions générales, violences jusqu’à  l’auto-destruction de toute vie sur terre… l’ensemble de ces infidélités si perverses et mortifères fussent-elles, n’ont pas réussi à éradiquer de la nature humaine sa participation à un germe divin. A la sortie de l’Arche mythique, l’homme est encore défini par sa plus noble identité : « car à l’image de Dieu, l’homme a été fait » cf. Gn. 9,8.

 

1.3.          « A l’image de Dieu », en hébreu Tselem. Ce terme est exactement le même que les auteurs sacrés utilisent pour désigner l’idole par laquelle la divinité païenne est censée se rendre présente à  ses adorateurs. A la différence des idoles, faites de main d’homme qui ont une bouche et ne parlent pas ; des yeux et ne voient pas ; des oreilles et n’entendent pas ; un nez et ne sentent pas… Des mains, et ne touchent pas ; des pieds et ne marchent pas » cf. Ps.115,6 ; en revanche, l’homme, Tselem du Dieu personnel, unique, créateur, providence… est revêtu de force. Il a une bouche, une langue, des yeux, des oreilles, un cœur, une intelligence éclairée pour voir la grandeur des œuvres divines et pour louer son Saint nom, cf. Si. 17,3ss.  

 

1.4.         A la différence des idoles qui étaient censées rendre présent la divinité dont elles étaient l’image, l’homme rend réellement présent Dieu. « Il se tient immédiatement auprès de Dieu ; c’est même en lui seul que le monde se trouve en proximité avec Dieu ; il joue un rôle de « pontifex », celui qui fait le pont entre toute la création et le Seigneur. 

Ainsi,  « tout sur la terre doit être ordonné à l’homme comme à son centre et à son sommet ». cf. G.S., 12/1.

Cet homme, jamais la Bible ne l’envisage comme un être absolutisé, autonome, extérieur à l’histoire mais toujours comme un être engagé dans une histoire avec Dieu.

C’est à cet homme seulement, « que les choses trouvent leur sommet et peuvent librement louer leur créateur » cf.G.S., 14/1 et Dan. 3, 57-90.

 

L’EXERCICE DU SACERDOCE ADAMIQUE 

 Il  s’exerce dans la louange, la gouvernance du monde, le risque d’une parole…

 

1.5.            La louange

L’exercice du sacerdoce adamique ne requiert ni lieu spécial, ni temple fait de mains d’hommes, ni temps marqués par un calendrier liturgique, ni rituels codifiés en matière d’objets, de vêtements, de lectures, de ministres… son espace ? c’est le monde créé ; son temps ? c’est l’histoire humaine qui se déroule ; son objet ? ce sont les merveilles que voient, qu’entendent, qu’accueillent… les hommes pour les faire remonter à Dieu dans un geste sacerdotal. Il s’inscrit dans l’ordre universel de la Création, en situation d’alliance avec Dieu, l’Alliance noachique, cf. Gn.9, 1à17.

 

Sans appartenir à l’Alliance du Peuple de Dieu, cf. Gn.15 et 17 ; Ex. 19 à 20, 21 – bien qu’il lui soit ordonné, cf. Gn. 12, 3 ; 22.18 ; 23.14 ; Jr.4, 2 ; Si.44, 21; Ga.3.8 ; etc… le sacerdoce adamique, en lui-même, n’en demeure pas moins en vigueur, aujourd’hui comme lors des temps primitifs.

 

L’homme Jésus dont on connaissait le père, la mère, les frères, les sœurs, le village, le métier, lui, non plus, n’était « ministre du culte », prêtre lévitique, cf. He. 7, 14 ; et, cependant, ce que ses yeux voyaient, ce que ses oreilles entendaient, ce que son cœur ressentait de la nature : coucher de soleil, fleurs, oiseaux ; de la vie des hommes : générosité, vérité, foi, etc.., devenait objet d’admiration et de louange adressées à Dieu, partout où cela advenait même en terres interdites par le jugement abusif des autorités, cf. Mt. 9, 10-13 ; Lc. 15,2 ; 19, 1-10. En vrai fils d’Adam, cf. Lc. 9, 38, l’homme Jésus accomplit parfaitement le sacerdoce inauguré dès le première Homme, son Père.

 

1.6.          :    La gouvernance du monde :

Le sacerdoce adamique est aussi un sacerdoce « royal ». Non seulement l’homme a été définitivement établi sur l’ensemble des œuvres crées par Dieu pour les dominer – et n’être pas dominé par elles ! – les gérer, les accompagner dans le cours de l’Histoire ; mais, encore, il a reçu une force, elle aussi venue d’En haut, pour être le vice-roi efficace, cf. Gn. 1, 26-28 ; 9, 7 ; Si. 17,2, ce qui suscite l’admiration du psalmiste :

« Qu’est-ce que l’homme, pour que tu te souviennes de lui. Tu l’as fait un peu inférieur à Dieu, tu l’as couronné de gloire et de splendeur et tu lui as donné la domination sur les œuvres de tes mains. Tu as tout mis sous ses pieds » Ps. 8, 5-7, et l’admiration du prophète Ezéchiel : « la parfaite beauté du premier Adam »  Ez.28, 12.

 

Ces vérités bibliques ont été reprises et actualisées au cours des sessions du Concile Vatican II et, enfin, écrites principalement dans la constitution Gaudium et Spes,par exemple : 12/1 et 14/1 déjà cités plus haut ; A l’homme parce que : « il a été constitué seigneur de toutes les créatures terrestres pour les dominer, pour s’en servir, en glorifiant Dieu » cf. G.S. 12/3 et Si. 17, 3-10.

 

De même que Dieu mit le premier Adam au sommet de tout l’univers créé et le lui subordonna ; ainsi fait-il pour le Second, Jésus. L’auteur de l’épitre aux Ephésiens a eu l’intelligence de citer explicitement le verset 8  du psaume 8 : «Il a tout mis à ses pieds  (de l’homme) » pour l’attribuer au crédit du seul chef, le Christ, en personne, cf. Eph.1, 22. En outre, Jean, l’Evangéliste, attribue à Jésus la conscience d’avoir reçu « pouvoir sur toute chair » cf. Jn.17, 2.

 

Cependant, à la différence de la royauté confiée au Premier Adam dont l’exercice s’arrêtait aux limites de la terre et du temps historique, la royauté, confiée au Second s’exerce encore au-delà de ces limites pour donner la vie qui est éternelle à tous ceux que le Père confie au Nouvel Adam qui est aussi son fils unique, cf. Jn. 17, 3 ; 3, 35…

 

1.7.            Le sacerdoce adamique est, encore, un sacerdoce de Parole.

 

1.7.1.    L’équipement pour produire une parole…

L’équipement fondamental est enseigné par le Siracide au chap. 17 dont on peut extraire les points suivants :

a)    La place prioritaire des sens pour appréhender le réel existentiel avec justesse (la connaissance du réel observable est une première requête de la Sagesse).

b)    La place du cœur « pour penser » à partir des informations reçues par les sens, d’une part, et, d’autre part, à partir de lumières données d’En-Haut.

c)     La capacité de discerner entre le bien et le mal, le vrai et le faux.

 

Ces points permettent de prononcer une parole appropriée, intelligente, ouverts sur la transcendance… et la louange.

2.   Les éloges de l’intelligence humaine par le document conciliaire Gaudium et Spes :

Certes, il est bien question d’un génie qui permet à l’humanité toute entière de progresser positivement : le génie humain, assuré personnellement par le sujet,  qui s’efforce, avec persévérance et humilité, de pénétrer dans le secret des choses ;  et, en même temps, il s’agit d’un génie qui est don de Dieu, cf. G.S. 11/2 dont l’exercice concret « est conduit par la main de Dieu qui soutient tous les êtres et les fait ce qu’ils sont » cf. G.S. 36/2.

 

L’efficacité des paroles techniques, scientifiques, sociales… prononcées par les hommes : elles orientent les efforts immenses de tous pour soumettre la terre et la rende féconde en libérant toutes ses potentialités vitales, de telle sorte que ces efforts contribuent, d’une certaine manière, à préparer les cieux nouveaux et la terre nouvelle, cf. G.S. 39/2.

 

« Nous sommes témoins de la naissance d’un nouvel humanisme ; et l’homme s’y définit avant tout par la responsabilité qu’il assume envers ses frères et devant l’histoire ». cf. G.S. 55.

 

Le sacerdoce adamique s’exerce aussi dans le domaine de la parole, des idées, des cultures, sources et soutiens de la marche historique de toute la famille humaine.

 

Quant à la parole de l’homme Jésus, elle est simple, claire, sans alliage, sans acception de personnes, cohérente, fidèle, à tel point «que jamais homme n’a parlé comme cet homme »cf. Jn. 7, 32-46. Elle ne se prononce pas directement dans les domaines techniques et scientifiques, mais dans les domaines sociaux et surtout personnels, cf. les Béatitudes qui mettent en rapport quasi immédiat les comportements humaines et les réalités divines, annonciateurs du Royaume éternel.

 

 

P.S. Est-ce que en dehors des enseignements bibliques, les différentes cultures et sagesses du monde, ont-elles perçu quelque chose du germe divin qui détermine l’homme et sa posture « sacramentale » ?

 

L’apôtre Paul, lors d’un de ses plus brillant discours qu’il prononça au Centre mondial de la culture d’alors, à Athènes, à l’Aréopage, essaya, sans succès semble-t-il, de mettre en relation le thème biblique, l’homme image de Dieu et l’assertion d’ARETUS, le poète selon lequel «  nous sommes de la race divine » Ac. 17,28 ?

 

Ce qui serait intéressant à travailler, ce sont les relations éventuelles entre le droit naturel et la conscience morale, d’une part, découvert par plusieurs cultures anciennes et actuelles ; et, d’autre part, le sacerdoce adamique biblique.

 

En tout cas, les hommes qui n’ont pas eu la grâce de connaître l’Evangile, mais qui méritent une vie droite, bonne et vraie,  selon les lumières de leur conscience – et avec secours, probablement inconscient de la grâce divine – peuvent obtenir la Salut éternel. Cf. L.G. 16.

 

Robert Beauvery

Publié dans Anthropologie

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