L'Église, c'est tout un monde !

Publié le par Michel Durand

Je le disais récemment dans ce blogue, le métier de journaliste donne l'avantage de savoir présenter avec grande clarté des développements historiques parfois complexes.
Quand je reçois des demandes de sacrements, je pose systématiquement la question, surtout à des jeunes qui demandent le baptême pour leur enfant alors qu'ils n'ont pas désiré s'unir par le sacrement du mariage, « pourquoi, voulez-vous ce geste de l'Eglise, cette aide (grâce) de Dieu ? En quoi le Christ, l'Eglise vous concerne pour que vous vouliez recevoir d'elle une action mystérieuse » ?
Question que j'adapte, bien sûr, à mes auditeurs que j'ai longuement écoutés avant de prendre la parole. Pourquoi une demande de sacrement ?
L'échange qui s'ensuit donne lieu à une véritable catéchèse.
Le livre que je viens de découvrir d'Henri Tincq, « les Catholiques » me comble de bonheur tant je le trouve adéquat pour expliquer l'Eglise du Christ. Une belle photographie du catholicisme qui, j'espère, sera lue par tous les demandeurs de services ecclésiaux. Je vais au moins le proposer.
Je vous donne, ci-dessous, l'article de
Michel Kubler qui présente cet ouvrage pour « La Croix ».


L'Église, c'est tout un monde !

Approchant du terme d'une carrière exemplaire, Tincq confirme ici sa parfaite liberté de commentateur de l'univers catholique

C'est le privilège de l'âge : il offre une accumulation de connaissances et d'expérience, et fait accéder à une sagesse qui libère des clichés de la jeunesse. Henri Tincq peut sereinement récolter le fruit d'une vie de labeur et passer outre à la suffisance de ceux qui ne savent pas qu'ils ne savent pas. Approchant du terme d'une carrière exemplaire, le voici qui partage la quintessence d'une immense science, avec le désir avoué de rendre justice à son sujet de prédilection : le catholicisme.

C'est une véritable somme que livre celui qui, depuis près d'un quart de siècle, décrypte le fait religieux avec autorité dans les colonnes du Monde. Une somme qui ne se contente pas de bénéficier des fiches dont ce grand professionnel n'a cessé de se doter, mais sait mettre ce savoir en perspective, pour mettre au jour les enjeux d'une communauté rassemblant un milliard de personnes de par le monde.

Cet ouvrage présente les avantages cumulés d'une encyclopédie et d'un essai. De la première il a l'organisation raisonnée et le savoir-faire pédagogique, de manière à saisir sans s'y perdre l'histoire du catholicisme et son organisation, sa vision de la foi et des mœurs, ses rites et ses populations. Ne cherchez pas l'oubli majeur : il n'y en a pas. Ni l'inexactitude ou l'approximation : vous n'en trouverez guère. Les Catholiques a même, par endroits, des allures de catéchisme, n'hésitant pas à fournir le texte du Magnificat ou des Béatitudes. De quoi être sûr que rien d'essentiel ne manque à l'appel.

Tincq confirme ici sa parfaite liberté de commentateur de l'univers catholique, à l'égard duquel il ne cache par ailleurs pas sa sympathie. C'est parce qu'il a une haute idée du catholicisme qu'il se montre si exigeant envers ses représentants. Il demande aux catholiques de ne rien cacher de leur institution, qui a produit des monstres et des saints, suscité l'Inquisition mais aussi une immense civilisation. Et il supplie les non-catholiques de cesser de l'ignorer.

C'est qu'il connaît suffisamment les rouages de la Curie romaine pour en dénoncer les lourdeurs et les raideurs ; il a suffisamment arpenté la planète catholique pour mesurer combien le centre romain en est loin ; et il n'a cessé de fréquenter les meilleurs experts du catholicisme pour disposer des analyses les mieux ajustées (très ancrées dans la sphère occidentale). Peu d'informateurs religieux peuvent se targuer de ce niveau de connaissances et d'assurance, donc d'influence.

L'influence de ce redoutable collègue sera-t-elle suffisante pour lui faire gagner son ultime bataille de chroniqueur ? On veut parler de l'image du catholicisme dans l'opinion, telle qu'elle est entretenue, précisément, par les médias : une quantité de clichés, une litanie d'à-peu-près, un chapelet de préjugés. L'ouvrage d'Henri Tincq abonde en idées tordues sur l'Église, son message et ses fonctionnements, qu'il s'emploie à redresser. Par exemple lorsqu'il rend justice à l'inspiration comme à l'héritage de Jean-Paul II. Ou quand il déclare «vaine et inadéquate» la lecture des institutions ecclésiales selon des grilles politiques (tout en cédant lui-même à la tentation du jeu des «sept familles» pour décrypter les clivages internes du catholicisme actuel). Ou encore quand il coupe court aux fantasmes sur la «puissance» du Vatican... Ou, enfin, quand celui qu'on a pu qualifier de «pape de l'information religieuse» rappelle ici, avec la force d'une encyclique, que «le christianisme n'est pas une morale, ni une idéologie. Il est adhésion à un homme de chair identifié, mort, ressuscité, monté aux cieux et vivant pour l'éternité»!

Pareille lucidité, empreinte de ferveur, ne s'emploie pas uniquement à dénoncer des approximations journalistiques. Elle sait avoir aussi le courage d'indiquer à l'Église elle-même des questions qu'elle ne peut éluder. Ainsi quand, ayant mis en évidence la liberté sans précédent dont celle-ci jouit aujourd'hui pour réfléchir aux conditions de sa mission, Tincq pose la question qui tue : «Veut-elle vraiment changer?»

On allait oublier une ultime idée reçue que ce livre vient utilement dénoncer : non, «la religion chrétienne ne court pas à sa perte», garantit Henri Tincq, qui pronostique qu'«elle sera, en 2050, la religion des trois quarts de l'humanité». Simplement, elle connaît des mutations considérables : qualitativement, par la montée inexorable de la mouvance évangélique (c'est elle qui sera dominante en 2050), et quantitativement avec la fin du modèle catholique occidental au profit du «tiers-christianisme». Les défis sont immenses, mais l'avenir n'est pas triste !
(La Croix)

http://www.la-croix.com/livres/article.jsp?docId=2334658&rubId=43500

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