L'Eglise dans le courant communautaire
Dans la ligne de la réflexion précédente (voir sur ce blogue au 23/08/08) : « répondre au besoin communautaire » se pose la question de savoir comment l'Eglise peut répondre et répond aux appels qui se trouvent conjointement dans l'Ecriture et dans la vie des hommes : Amour, Fraternité, reconnaissance de ce que je suis devant le Tout Autre.
Celle-ci étant essentiellement communautaire, il est tout à fait normal de la questionner à ce niveau. C'est tout une étude qu'il faudrait. J'ignore s'il en existe une plus récente que celle de Pierre André Liégé, « l'Etre - ensemble des chrétiens ». Dans ce livre, l'auteur donne surtout les conditions ecclésiales pour que les diverses communautés se maintiennent dans le « corps du Christ » et fassent ainsi œuvre d'avenir. Tout en posant quelques jalons théologiques, dogmatiques -ce mot n'effraie pas qui le comprend bien- il jette, comme à la volée, des séries d'interrogations
- - « Ne faut-il pas réviser notre représentation abstraite et principalement organisationnelle de l'Eglise universelle, et porter plus d'attention aux cellules de base de l'Eglise, là où se réalise vraiment l'Eglise une ? »
- - « Ne faut-il pas préciser en quoi consiste l'action missionnaire, et la voir de préférence comme une action visant à ouvrir des possibilités de surgissement d'Eglise dans les espaces humains divers ? »
- - « Jusqu'à quand l'Eglise se prêtera-t-elle à gérer la religiosité naturelle, parfois la plus suspecte, sans dénoncer l'équivoque entretenue par là ? »
- - « Quel projet pastoral permettra de faire surgir une Eglise de volontaires dans l'Eglise des baptisés, de susciter des groupes conscientisés par l'événement de Jésus-Christ dans la masse anonyme de la clientèle d'Eglise ? Comment les communautés chrétiennes dont nous héritons deviendront-elles des lieux d'invention, de recherche et de partage de la foi ? »
- - « Comment faire retentir l'interpellation évangélique dans le cheminement des groupes humains constitués, pour qu'y démarrent des débuts d'Eglise par des communautés ? »
- - « Comment faire en sorte que des débuts d'Eglise réalisés dans les communautés catéchuménales n'avortent pas en abordant aux rivages des "communautés" installées, ou ne soient pas récupérées, pour leur malheur, par des "communautés" anonymes où il ne se passe rien qui rappelle l'Evénement ? »
Et encore : comment permettre en Eglise les nouvelles expériences de vie communautaire, fraternelle, sans plus s'alarmer des bavures « que d'un certain immobilisme paroissial encore régnant », sans « hâte de récupération », « en ne provoquant pas la marginalisation ? » *
Je reprends ces questions parce que je les fais miennes depuis déjà quelques années. Mes connaissances en furent témoins avec ce que nous avons tenté de vivre au Creusot. Je les reprends tout en me demandant en quels lieux elles seront réfléchies, discutées. Certes, il doit bien exister des réunions où laïcs et prêtres se penchent ensemble sur la réalité communautaire contemporaine et ecclésiale de notre temps. Seulement, j'aimerais en voir plus clairement les effets : lire les comptes rendus, entendre dans les presbytères des conversations à ce propos, connaître les séminaires organisés par secteurs pastoraux sur ce sujet... Mais, comme nous le savons depuis les Gaulois ou les indiens des Amériques, il n'y a pas de fumée sans feu ; donc, si la fumée manque... Or, n'y a-t-il pas urgence à ce que ces questions soient plus amplement mises à l'ordre du jour ? Elles le sont, me direz-vous. Demandons-nous alors avec quel dynamisme elles ont étudiées ?
Sûr que l'on peut se demander ce qui me pousse à écrire de la sorte. Est-ce la manie du changement ? C'est à voir. Toujours avec P. A. Liégé, j'affirme que «
conteste celui qui aime. Il nous faudra aimer l'Eglise pour y être contestataire ». Je ne peux rien dire de plus car seul le témoignage de la vie est probant.
- * Le mot "Eglise" est, ici, particulièrement ambigu. S'agit-il de l'Eglise vue dans son peuple ou dans ses responsables ? Il faut plutôt penser à ces derniers, à ceux qui, prêtres ou laïcs, gèrent la vie de la communauté chrétienne. Il est très clair que les initiatives qui permettront de répondre à ces questions ne seront pas prises en main par la hiérarchie. Il s'agit donc, si l'on est "fondateur", d'aller de l'avant. Mais qui est fondateur ? Si l'on n'est pas fondateur, il n'y a que la solution de discerner une fondation existante à laquelle s'agréger, note en substance le Père Ancel, à la lecture de cette page. Quand ce qui vient de la base aura une certaine importance, la hiérarchie pourra jouer son rôle de discernement.