Après des années de développement « sans compter »
Que de nouveaux modes de vie se mettent en place par une action politique, nous sommes plusieurs à le souhaiter. La crise actuelle devrait permettre une réflexion approfondie. Le veut-on ? Il semblerait plutôt que, dans une mentalité monétariste, on alimente infiniment l'usine à gaz, dont plus ne personne ne contrôle les fuites, pour empêcher son arrêt. Chaque jour on entend parler de milliards pour renflouer des entreprises multinationales en difficulté alors que l'argent manque pour répondre aux problèmes de la faim dans le monde. Les réservoirs des voitures importent plus que les ventres des humains.
Dans la ligne de Pax Christi, je vous adresse cet appel à une vie simple de l'Eglise Réformée.
Simplicité de vie : Limites des ressources et partage des richesses
Après des années de développement « sans compter », il est aujourd'hui possible de mesurer tant l'accroissement de la population que l'abondance des ressources énergétiques, de connaître les mécanismes qui régissent le fonctionnement des diverses « enveloppes » de la terre (atmosphère, hydrosphère, biosphère, géosphère) et d'évaluer l'impact des « développements » en cours. Ainsi peut-on mesurer les conséquences des activités humaines sur la planète. Depuis le début de l'ère industrielle, le recours massif, et croissant, aux énergies fossiles (charbon, pétrole et gaz naturel), entraine d'importantes émissions dans l'atmosphère, avec une incidence désormais avérée sur le climat.
L'humanité doit donc réfléchir sur les principes mêmes qui fondent la science, l'économie, la politique, pour refonder ses pratiques quotidiennes. Outre de possibles solutions scientifiques et techniques, c'est un changement profond non seulement de notre idéal moral, mais de nos moeurs concrètes qui est nécessaire. Cela impliquera nécessairement des débats et de l'information ; cette « conscientisation » permettant de former des citoyens responsables exige de mettre en avant non seulement une éthique de questionnement mais aussi de responsabilité, où l'on cherche à comprendre ensemble les enjeux plutôt que de rechercher des solutions « faciles » .
Soyons conscients que les habitudes, les moeurs sont plus difficiles à changer que nos installations techniques. Par exemple, nous sommes habitués à nous déplacer sans limites, ni de fréquence ni de distance, nous ne savons plus être simplement là où nous sommes. Le plus délicat ici est de changer non pas tant nos opinions que nos habitudes. Et il n'est pas de tâche plus impérieuse, plus délicate, aujourd'hui, que de changer l'image que nous avons de la « vie bonne ». Ce mirage intérieur conditionne des réflexes inconscients qui échappent à l'argumentation.
Pour ébranler l'imaginaire social, bouleverser suffisamment nos préjugés pour littéralement nous convertir, changer l'orientation générale de nos vies, les religions et les arts au sens large sont incontournables. Le recours à l'émotion écologique est un moyen privilégié permettant d'ébranler la confiance quasi religieuse dans le progrès technique. Au-delà de l'émotion il nous faut discerner une vérité, occultée par des discours convenus, qui nous libère pour inaugurer d'autres comportements et d'autres règles de vie commune.
Si les politiques n’osent pas dire qu’il nous faut changer de train de vie, abandonner le toujours plus, accepter de partager, les chrétiens ont de bonnes raisons pour le proclamer. Oui, il faut changer de vie, travailler sur le désir qui nous met en marche… tâche éminemment spirituelle. À l’approche de Noël, quand revient la déferlante des incitations à la consommation, essayons, à notre mesure, d’être simples, sobres et… joyeux, en reprenant cette question essentielle : où est notre espérance ?
Claude Baty,
président de la Fédération protestante de France
Voir aussi : Quelles ressources spirituelles... du groupe chétiens et pic de pétrole.