Carnet de voyage : Ghardaïa, Beni Isguen

Publié le par Michel Durand

Ghardaïa - 1053 - XIème siècle - premières constructions
Classé au patrimoine de l'UNESCO en 1982

Ces quelques notes n'ont pu être vérifiées sur place. J'en appelle donc aux connaisseurs du pays pour y apporter toutes les corrections utiles.


Les rues

Les rues sont construites étroites pour garder toute la fraîcheur. Il n'y a pas de fenêtres donnant sur la rue, sinon une petite ouverture, parfois, située au-dessus de la porte d'entrée ; ce qui permet de voir de l'intérieur sans être vu de la personne qui frappe. Cela peut être également de cet orifice (petit trou), petit rectangle muni d'un volet type persienne, claustra, moucharabieh... qu'un dialogue s'établit entre le visiteur et la personne qui se trouve à la maison : « Non, mon mari n'est pas là. Je pense qu'il sera là dans une heure... »

Si les murs extérieurs des maisons sont très souvent de couleur ocre, sable, parfois assez sombre, les intérieurs sont plutôt très pastel, bleu, vert, rose, blanc !


Le but premier est de répartir la lumière dans toutes les pièces à partir du « puits » de lumière situé au centre de la maison. Pour se faire comprendre, on peut employer le mot de Patio pour désigner cette pièce carrée centrale ; la lumière entrant par le percement de la terrasse éclaire le rez-de-chaussée, lequel peut également communiquer avec un sous-sol grâce à deux ou trois lucarnes grillagées et munies de dalles de verre. L'existence de pièces en sous-sol semble ne pas être possible au bord de l'oasis, vers l'oued, où il y aurait risque d'inondation à la suite des orages.


Les portes des maisons ouvrant à droite et à gauche de la rue sont toujours décalées l'une par rapport à l'autre. En effet, es constructions sont réalisées de telle sorte que l'intimité familiale soit entièrement préservée. D'un logement, on ne peut pas voir ce qui se passe dans un autre. Même d'une terrasse à l'autre, où les murs sont élevés de telle façon qu'ils dépassent la hauteur de vue tout en laissant entrer suffisamment le soleil. Un voisin n'a pas le droit de construire un mur qui couperait chez soi toute entrée solaire.


Pour préserver l'intimité, un mur se trouve juste en face de la porte d'entrée. Cette installation de chicane coupe tout regard indiscret. De plus, un rideau est souvent accroché à l'entrée pour renforcer la discrétion.

La maison est, sans aucun doute, le domaine du privé. Les lieux de rencontres traditionnels sont la place du marché, les portes de la ville, l'entrée de la mosquée, notamment à l'heure des prières (5 par jour).


Distribution schématique d'une ville.

    Mosquée - le centre

    Les habitations - autour, si possible - sans commerçants - ou peu de commerces.

    Les rues commerçantes qui donnent sur la place du marché, favorisant le contact avec le monde extérieur : entrée des animaux aux produits manufacturés ou pour l'alimentation, produits des jardins de l'oasis...


Évolution des villes

    Différentes dates ponctuent l'architecture d'une ville du M'Zab.

    Ainsi, à Ghardaïa, nous trouvons des traces des XI°, XIII°, XVI°, XIX° et, bien sûr, XX° siècles.

    Le Minaret de Ghardaïa : l'architecture de la mosquée montre le 1er minaret (petit) du XI° siècle, puis, avec l'augmentation de la population, le 2ème minaret, la 2ème mosquée (XIII°)

    L'agrandissement de la ville se voit au niveau des passages - portes d'entrée dans la ville : Porte du Marché du XIII° siècle.

          Porte du Marché du XVI° siècle.

          Porte du Marché du XIX° siècle.


Les puits

Chaque quartier possède son puits ; actuellement  non utilisés parce que chaque maison possède l'eau au robinet. Comme la ville est construite sur du rocher, les puits sont taillés dans la roche. Plus on est élevé, par exemple à la mosquée, plus le puits sera profond. On parle de puits de 85 mètres, de 60 mètres, de 25 mètres.

Un animal (âne, chameau) tire sur une corde pour faire remonter une outre, laquelle est déversée dans un réservoir..

L'eau est souvent saumâtre ; elle sert pour les travaux ménagers, la lessive, les constructions. Aucune eau ne doit être perdue ; ce qui est en trop est versé au pied du palmier qui se trouve souvent à côté du puits. Quand le  palmier donne des dattes, celui-ci étant de bien commun, elles ci sont remises à la mosquée.


Cimetière

La tradition ibadique veut que l'on n'enterre jamais sur un emplacement déjà utilisé ; les nombreux cimetières que l'on voit sont donc aussi anciens que la fondation de la ville ou du quartier, et ils s'étendent en surface au fur et à mesure des besoins. L'observation de l'état des sépultures - peu ou beaucoup de pierres -,donne une idée de leur évolution chronologique ; les plus anciennes sont celles où l'érosion - vent, sable, pluie - a accompli son travail.

Il arrive qu'il n'y ait plus assez de terre meuble pour creuser des sépultures et qu'il faille s'étendre sur des parties rocheuses. Les creuser serait trop difficile, trop coûteux. On construit alors sur la roche des sépultures faites de terre, de pierres et de mortier de chaux.


Fraction

Les Mozabites sont divisés en fractions. Cette organisation sociétale se retrouve au cimetière. Chaque fraction a son territoire.


Indication des défunts : Qui est enterré ici ?

Il me semble que dans tout le Maghreb la symbolique est identique.

. Une pierre verticale plantée en terre à la tête, une autre aux pieds.

  Deux pierres : c'est un homme.

  La distance entre deux pierres en montre la taille. On repère ainsi, de suite, les enfants.

. Une pierre à la tête, toujours verticalement plantée, deux aux pieds : c'est une femme.

  Si cette dernière est enceinte au moment de sa mort, une quatrième pierre est fichée en terre au niveau du ventre.


Le nom ? Mais comment savoir qui est, ici, enterré ?

Un objet, propre au défunt, sera posé sur la tombe à proximité de la pierre signalant la tête.

Dans l'ancien temps, il y avait beaucoup de pots en terre, puis ce fut en métal ; mais ce peut être aussi tout autre objet. Depuis quelque temps, on voit apparaître des plaques avec le nom, la date gravée dessus.


L'aire de prière

Avant de procéder à la sépulture, les proches du défunt se retrouvent sur une « mosquée » du cimetière. Là, on prie pendant quelques minutes.

On se rend ensuite sur le lieu précis de la sépulture.


À l'origine d'un cimetière, il y a souvent celle d'un grand personnage, un saint, un fondateur de ville. On a voulu se faire enterrer en sa proximité.

A Ghardaïa, il s'agit de Cheik Hamed Saïd Berb (XV° siècle). Cet homme avait une école coranique avec une petite mosquée



Lire : Pierre Cuperly, L'étude de l'Ibadhisme et de sa théologie.



Publié dans écrit de Béni Isguen

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H
<br /> <br /> Bonjour !<br /> <br /> <br /> Quand vous parlez dans le premier paragraphe sur le "petit trou" par lequel on communique vous auriez dû interwiever quelqu'un pour vous donner le véritable nom en arabe ou en mouzabite. Bon<br /> courage dans tout ce que vous faites. Moi de même je suis une passionnée de la kabylie. Bye.<br /> <br /> <br /> <br />
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M
<br /> <br /> Désolé pour une réponse si tardive.<br /> <br /> <br /> Je me suis informé auprès d'un ami du M'Zab ; Voici ce qu'il dit : "Il s'agit d'une fente de 7cm de large et 15cm de long  en général, qui se trouve entre la pièce à tisser et le hall<br /> d’entré à environ 80cm du sol. la hauteur d'œil de quelqu’un assis.<br /> Fonctions:- effectivement il peut servir à avoir l'œil sur le hall d'entré.<br />                - mais surtout à changer la tige du métier à tisser de position, sans trop de mouvements, car la tige est<br /> longue; d'ou l’appellation ( Ahfir nou mawalle   en berbère du m'zab ).<br /> Ahfir: la fente ou trou.<br /> nou: du.<br /> mawalle: longue tige en bambou. "<br /> <br /> <br /> En fait, je pense qu'il y a encore d'autres ouvertures secrètes. Donc à suivre.<br /> <br /> <br /> <br />