Devant la crèche, nous voilà à la source d'un monde nouveau
La chute de l’empire chrétien romain (latin) revêt chaque jour davantage les vêtements de la parabole. Les conséquences de cet évanouissement brutal ont duré plusieurs siècles. Aucun responsable de gouvernement, de la Ville de Rome à l’empire tout entier en passant par les provinces ne pouvait ignorer les pressions exercées aux frontières. La décadence morale et spirituelle était trop grande… le dynamisme interne, trop affaibli pour que la société puisse résister aux forces nouvelles, violentes qui advenaient avec les hordes dites barbares.
L’empire grec résista davantage. En effet, les envahisseurs arrivant aux portes de Constantinople acceptèrent d’aller voir encore plus loin, à l’ouest. Peut-être même reçurent-ils de l’argent pour aller voir hors de l’orient chrétien. Ils prirent assurément des éléments de cultures grecques – et les épouses. Cela a donné l’empire chrétien occidental qui vit son apogée avec Charlemagne.
Plus de quatre siècles furent nécessaires à ce nouvel équilibre ! Quelques jours, trois suffirent pour signifier la fin de Rome. Affaiblis de toutes parts, ils avaient des oreilles pour ne pas entendre, des yeux pour ne pas voir. Les intellectuels chrétiens, imprégnés de cultures raffinées furent durablement bouleversés par la fin de leur monde. Désolation sans nom.
« Ce n’est arrivé que depuis peu et vous en avez été témoin : Rome, la maîtresse du monde, a frissonné de terreur au son strident des trompettes et des hurlements des Goths ? Où était alors la noblesse ? Où étaient passés titres et dignités ? Tous étaient mêlés les uns aux autres et secoués par la peur ; chaque famille avait ses douleurs et une terreur envahissante nous étreignait tous. Esclaves et nobles se confondaient, le spectre de la mort se dressait devant tous » (Pélage, lettre à une noble dame).
La médiatisation de la conférence de Copenhague fut telle que personne aujourd’hui ne peut ignorer l’existence et l’ampleur du problème. D’un côté, les scientifiques, de l'autre les politiques. Quelques militants prophètes rejoignent les hommes des sciences. Ils veulent faire entendre la voix de la raison. Aujourd’hui, ce n’est pas l’affaiblissement moral qui rend sourd (à moins que celui-ci n’y contribue), mais l’attachement à l’unique modèle capitaliste de production, la volonté de toujours avoir plus, la fausse conviction que plus le gâteau sera gros, mieux les hommes voudront le partager.
Raréfaction des ressources naturelles, réchauffement climatique sont pourtant nettement observables. Mais, voilà, ils ont des oreilles pour ne pas entendre, des yeux pour ne pas voir ! Ils veulent maintenir ou porter leur nation au premier rang des plus riches du monde ; ils veulent augmenter leur PIB, oubliant les véritables racines du bonheur.
Bien sûr, quelques Polynésiens dont les terres disparaissent sous les pieds, ou Subsahariens affrontant les dangers du désert et de la mer frappent à la porte de l’Occident. Une frontière (limes), mur juridique se dresse contre eux, les expulsant hors de l’Occident industriel parce que dit « sans-papier ». Mais le jour vient où la pression extérieure sera tellement forte qu’aucune loi ne pourra contenir cette nouvelle donne mondiale. En ce sens, le sac de Rome (410) devient parabole pour aider à ouvrir yeux et oreilles.
Ce fut au temps de l’empereur romain Auguste, Quirinius était gouverneur de Syrie, Hérode le Grand, roi de Judée que Jésus vit le jour. Ce nouveau roi, Jésus, n’était pas roi comme les autres, car son Royaume n’est pas de ce monde. En effet, Amour-Charité, Solidarité, Respect, Fraternité règnent en sa communauté. L’esclave et l’homme libre, l’enfant et l’adulte, l’homme et la femme mangent à la même table. Personne n’est étranger. Avec le roi de toute la terre, le monde ancien est parti, le nouveau s’installe. Révolution. « Je ne vous appelle plus serviteurs, mais amis ».
Devant la crèche, nous voilà à la source du monde nouveau où le profit, la concurrence, l’argent sont détrônés. Ce roi donne la force des nécessaires comportements nouveaux, des indispensables changements de modes de vie empreints de simplicité, de sobriété, de fraternité christique. Bonne nouvelle qui convertit radicalement notre écoute et notre regard.
Pour résoudre les questions que le XXIe siècle pose à l’ensemble de l’humanité, c’est lui seul qu’il faut suivre. C’est lui notre Maître. Mettons-nous à son école. Cette humble disposition d’esprit que j’ai l’habitude de qualifier de mystique nous rend lucides et nous ouvre les portes du Nouveau Monde à construire. Un monde sans première place, sans concurrence ; un monde de frères… Le Royaume de l’Évangile. Un bouleversement aussi énorme que celui de la chute de l’Empire romain se prépare si nous ne parvenons pas à anticiper l’inéluctable. Que les hommes d’Église ouvrent le chemin en quittant leurs robes rouges, noires ou blanches, leur ceinture à franges, leur bonnet étrange, leur fourrure et toutes formes de dentelles.