L’homme est lié à tout ce qui se trouve sur la terre : matière, plantes, animaux, humains, économies, politiques, migrants… et foi

Publié le par Michel Durand

Photo FR3

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Je reviens donc des Assises chrétiennes de l’écologie qui se sont tenues à Saint-Etienne. 2000 personnes. C’est un beau chiffre. Dés la première minute, j’ai admiré la disponibilité des Stéphanois. En effet, alors que je quittais la gare pour le Parc des Expositions, lieu des assises, un bénévole s’est approché pour proposer sa voiture. Accueil sympathique qui fut permanent. Voir ci-dessous, la vidéo de FR3.

Ambiance simple, sans trop de protocoles même si parfois, surtout à la fin, par exemple dans le chapitre des remerciements, on pouvait se croire dans une « grand-messe » de parti politique croulant sous les applaudissements.

Les participants venaient de toute la France. Il y avait certes des Stéphanois, mais j’ai entendu dire que, le chiffre étant proche de la première assise de 2011, il ne devait pas y avoir autant d’habitués des paroisses locales que souhaité. Ces assises attendaient 3000 personnes, selon la présentation de Patrice de Plunkett sur son blog.

Comment atteindre les familles, les jeunes, les adolescents, les personnes qui n’imaginent pas que le changement du climat puisse poser problème ? Comment rejoindre celles et ceux qui, par crainte de perdre les avantages acquis dans l’histoire, n’imaginent pas devoir (ou pouvoir) changer de modes de vie ? La sobriété volontaire reste pour une immense majorité des citoyens un non-sens. Ainsi, tel curé de paroisse, par crainte de perdre ses fidèles, estime ne pas devoir aborder ces questions.

D’expérience je sais qu’il n’est pas facile d’entendre la Parole de Dieu perçue dans les Évangiles et de la concrétiser dans une homélie en tenant compte de ce qui se vit concrètement au quotidien.

Aujourd’hui, l’actualité me pousse à dire qu’un lien évident existe entre le nombre immense de migrants politiques ou économiques et la protection de la Terre qui manifeste sans cesse l’existence de ses limites. Qui peut entendre cela sans remettre en cause ses habitudes, ses modes de vie ? Or, nous avons vraiment du mal à interroger nos propres modèles de consommation (et de production). Pour le dire rapidement, on veut bien résoudre les problèmes engendrés par le système productiviste actuel, mais sans que cela nous oblige à modifier quoi que ce soit dans nos habitudes. Un pasteur proclamant clairement l’urgence d’une révolution à ce niveau risque de voir ses paroissiens mettre leur offrande dominicale dans la caisse de la paroisse voisine.

J’ai un peu pensé à tout cela en constant que les inscrits aux deuxièmes assises chrétiennes de l’écologie à Saint-Etienne étaient convaincus d’avance ou déjà bien sensibilisé à l’importance du devoir de cultiver la nature au lieu de l’exploiter. Nombreux sont ceux et celles qui avaient déjà largement étudié la question. J’ai, en effet, parlé avec pas de mal de gens qui connaissaient chrétiens et pic de pétrole, qui avait un engagement avec les mouvements d’action  catholique, ACI, MRJC… même la JEC que je croyais défunte. Bref, malgré tout, la grande masse des catholiques qui résument leur pratique chrétienne à la messe du dimanche reste à atteindre. Soit ! Une fois de plus j’enfonce des portes ouvertes.

Il me faut quand même dire que les premières prises de paroles par des officiels d’institution employèrent des expressions du genre « développement durable » ou « transition énergétique » montrant bien qu’ils ne connaissaient pas vraiment le problème du changement climatique et qu’ils imaginaient possibles de géniales inventions techniques dispensant les humains de renoncer à leurs habituelles consommations. J’ai également entendu que le capitalisme ne posait pas en soi de difficulté, mais seulement les débordements du capitalisme. À mon avis, partagé par plusieurs participants, si l’actuel capitalisme libéral fait difficulté, c’est qu’à sa racine, il y avait le germe engendrant l’inacceptable.

Les innovations scientifiques vont répondre à tous les problèmes et pallier à toutes nos attentes, espère-t-on selon le rêve que la croissance devenue verte va relancer l’économie !...  Assurément, heureusement, aucun orateur de ces trois journées n’a souscrit à cette fausse croyance et je dois humblement avouer que j’étais trop pessimiste dans mon analyse rapide des orientations des intervenants.

Dominique Bourg n’a pas beaucoup parlé. Son rôle n’était pas de présenter sa pensée en la matière, mais de questionner, en philosophe, les « experts ». Ce fut fait. Demeure, comme il le dit lui-même que les personnes et les organismes continueront à parler de développement durable tellement ce mot est inscrit dans le lexique des institutions officielles. Bref, même quand on entend de belles et bonnes choses, le poids des habitudes s’impose dans la ligne de Nicolas Hulot dont je me demande toujours pourquoi les organisateurs ont privilégié cette médiatique tête de gondole totalement absente des débats. Plusieurs participants ont dit leur étonnement face à ce choix commercial ambigu : « ce fût là une erreur ». Recourir aux vedettes pour attirer le plus de monde possible n’est pas la meilleure communication. Et si les Églises sont en retard sur ces enjeux, malgré la prise de parole de quelques cadres trop souvent timides et partielles, n’est- ce pas dû au fait, historiquement constaté, que « la plupart des grands changements sont venus de la base » (Estelle Grenon).

Je reprendrai plus tard cette réflexion en partant du vécu des membres de CPP présents aux assises. Je conclurai pour l’instant en soulignant, comme le fait du reste un militant d’alternatiba rencontré cet après-midi, que l’ensemble des participants aux forums aux assemblées générales aux tables rondes témoignait d’une réelle cohérence. La question de l’écologie n’est plus marginale. Un consensus s’est formé dans l’Église à son propos. Ces assises en ont témoigné. Même quand cela et dit timidement, il n’est plus possible de regarder l’appel évangélique à la sobriété comme un retour à la bougie. La décroissance est une heureuse réalité économique qui permet la croissance de l’amour, de la rencontre, du respect de l’homme. Les chrétiens ne parlaient pas ainsi il y a dix ans. Estelle Grenon souligne que « l’idée première à retenir de ces Rencontres est bel et bien que l’écologie à la lumière de la foi met l’humanité au centre de ses projets. Elle permet l’alliance entre soi et les autres, Dieu et les hommes, les hommes et leur environnement. Il n’y a pas de dissociation entre l’homme et la nature. L’écologie est au cœur de chacune de nos vies ».

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