La vérité chrétienne, hors des valeurs, n’est ni une théorie, ni un recueil de lois. Elle est visage en Christ de l’amour de Dieu pour tous

Publié le par Michel Durand

Pour donner envie de lire ce livre :
Patrice de Plunkett, Cathos, de devenons pas une secte, p. 62-65


« L'Église de Bergoglio » choque donc certains (catholiques). Dès les premières semaines du pontificat ils ont jugé que ce pape ne faisait pas l'affaire. Sa façon d'être correspondait à des tâches nouvelles dont ils ne voulaient pas entendre parler : ils l'ont pris en grippe dès ses premières boutades portenas*, efficaces, rugueuses et faisant appel aux nouveaux devoirs du chrétien. Ce qui les déboussolait chez François était sa façon de parler expérimentalement des problèmes d'aujourd'hui et des moyens d'y insérer l'Evangile.
Ainsi dans un entretien : « Une Église qui trouve de nouvelles routes, capable de sortir d'elle-même   et   d'aller  vers   celui qui   ne la fréquente pas, celui qui est parti ou celui qui est indifférent... **»
Ou dans l'exhortation apostolique Evangelii gaudium de 2013 :
« Ouvrons-nous à l'avenir, de sorte que nous ne restions pas ancrés dans la nostalgie de structures et d'habitudes qui ne sont plus porteuses de vie dans le monde actuel... L'Église ne doit pas craindre d'abandonner des usages qui ne sont pas étroitement liés à l'Évangile. Il faut être audacieux et créatifs et abandonner une bonne fois pour toutes le confortable proverbe « on a toujours fait ainsi ». Il ne faut plus fermer les portes de l'Église pour s'isoler, mais les ouvrir pour aller à la rencontre de tous et se préparer au dialogue avec d'autres langues, d'autres classes sociales, d'autres cultures. Voilà mon rêve et je compte le réaliser ***.
Deux ou trois ans à ce rythme, et une partie de la moyenne bourgeoisie conservatrice est passée de la réticence à l'irritation : elle était mûre pour les campagnes qu'allaient lancer les adversaires du pape François - et parmi eux les homologues de M. Gotti-Tedeschi - pour transformer l'irritation en affolement et désigner le pape comme bouc émissaire à des cathos se croyant assiégés.
Cette fraction très conservatrice de la bourgeoisie urbaine semble ne pas savoir que la pensée de François prolonge celle des papes précédents, ni que le pape a le devoir de faire des changements dans l'Église ; pour « prouver » que François met en danger la famille et la foi, certains invoquent l'autorité imaginaire de deux ou trois prélats de Curie qu'ils prennent pour des défenseurs de la Tradition - alors qu'il s'agit de personnages mécontents de leur carrière.
Leur indignation atteint un paroxysme à l'automne 2017, quand François élargit les missions de l'Académie pontificale pour la vie... « Les questions de la peine de mort, des migrations, des ventes d'armes trouvent toutes leur place au programme de l'Académie », explique son nouveau président Mgr Paglia : « Pouvons-nous nous dire pro-life si nous ne réfléchissons pas à cela ? » Mais les conservateurs sont mécontents des nouveaux membres de cette Académie, comme la bibliste française Anne-Marie Pelletier qui affiche clairement la feuille de route : « Sortir de l'enclos de cercles repliés sur eux-mêmes, sortir d'un discours sourcilleux et méfiant, qui récuse toute confrontation à l'autre ; sortir pour nouer des échanges et des dialogues avec des interlocuteurs qui ne sont pas du sérail. » La bibliste est en phase avec le pape.
Ce qu'auraient voulu les conservateurs, c'est l'inverse de tout ça : un pape « vice-Dieu », sorte de super-souverain hors du temps, trônant dans une pénombre sacrale où luiraient des dorures. Ce rêve remonte aux années 1830, quand la posture ultramontaine devint le refuge des nostalgiques du roi... Leur utopie n'était pas la volonté de l'Église : Léon XIII le fit savoir dès 1892 en ralliant les catholiques français à la République, coup d'autorité qui divisa ces derniers plus gravement que les actes de François aujourd'hui - bien que nos ultras crient au « jamais vu » chaque fois qu'il pose un acte heurtant leurs idées politiques.
Car s'ajoute à cela un élément de confusion supplémentaire : l'OPA de certains partis sur le milieu catholique en France.


*Portenas : « de Buenos Aires ». L'humour du pape n'est pas européen, ce qui ne devrait pas choquer dans une Église universelle.

** Entretien avec les revues culturelles jésuites, septembre 2013.

*** La joie de l'Évangile, 2013.


L'islam et les migrants, p. 101
Pour des pans entiers de la population aux Etats-Unis et en Europe, les immigrés sont la peur principale. Aux États-Unis cette peur cible des Mexicains catholiques. En France elle concerne des musulmans : le problème des immigrés est ainsi couvert par celui de l'islamisme, ce qui (à l'ère du djihad) peut pousser à l'incandescence y compris chez les catholiques. Quand l'Eglise française tente de faire baisser la fièvre, elle s'y brûle les doigts.

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