La disparition des vieilles façades de la chrétienté et des faux motifs de la mission permettra de retrouver sa véritable source eschatologique

Publié le par Michel Durand

La disparition des vieilles façades de la chrétienté et des faux motifs de la mission permettra de retrouver sa véritable source eschatologique

À l’eucharistie d’hier au Prado, la maison mère à Lyon, eucharistie présidée par Olivier de Germay, évêque à Lyon, j’ai émis l’importance, tout en ayant un regard de prédilection vers les pauvres, de savoir être proche de celles et ceux qui sont loin de l’Église, loin de l’Évangile, de la foi en Dieu, Christ ressuscité. Ci-dessous, voir les fichiers des prises de parole au début et à l'issue de l'eucharistie.

Aujourd’hui, dans ma lecture de Christoph Theobald, Le courage de penser l’avenir, Cerf 2021, j’ai eu la chance de découvrir les pages reproduites ci-dessous qui aliment utilement ma réflexion. J’aimerais bien trouver un groupe de baptisé pour partager cette importante réflexion : Connaissant diverses crises actuelles, les chrétiens doivent aller à la rencontre de celles et ceux qui sont loin de toutes révélations. Sortir d’une forme de ghetto.

Theobald n’est pas toujours facile à lire ; ses phrases sont longues ; il me faut les reprendre plusieurs fois. Cela en vaut la peine.

Je suis venu à l’eucharistie de l’anniversaire de la naissance du Prado avec ces souhaits et prières : Je pense à René, Édith, Véronique, Bruno et à beaucoup d’autres plasticiens qui aimeraient que leurs œuvres artistiques soient reconnues et exposées dans des églises. Certains artistes demeurent en marge de l’Église ; pourtant leurs créations parlent de l’Évangile, dégagent un profond message spirituel. Dieu y est présent dans sa transcendance et son immanence.

Antoine Chevrier a sollicité des artistes et donnaient, certes dans une ambiance très XIXe siècle d’art chrétien populaire, des œuvres montrant le mystère chrétien. Aujourd’hui nous parlons, avec le vocabulaire des arts contemporains, d’installations. Des créations qui invitent à la réflexion voir à la prière.

La mission commence hors du bâtiment église, là où nous vivons au quotidien. Elle s’exprime sur le parvis d’une architecture historique ou contemporaine, dans un cloitre, un narthex avant de rejoindre le sanctuaire.

De la lettre pastorale d’Olivier de Germay « Cap sur la mission », je retiens l’importance de se centrer sur le Christ. J’affirme que les chrétiens par le baptême doivent devenir christiens, disciple du Christ. Moi le premier, avant d’inviter - tout en invitant - les personnes rencontrées à devenir disciple missionnaire. Antoine Chevrier a approfondi toute sa vie l’urgence d’être, de devenir le véritable disciple. L’étude d’Évangile pousse sans cesse à une meilleure connaissance des pauvres, des migrants exilés, de ceux qui sont éloignés. « L’Église se fait conversation ». Le don de l’Esprit ne peut être occulté. Le témoignage explicite ne peut être abandonné, mais il importe que celui-ci soit précédé par le solide témoignage d'une vie selon l’Évangile. Engagement du christien dans une population précise en agissant pour le bien de celle-ci. La force des œuvres tant dans le domaine social que culturel.

 

 

Christoph Theobald, Faire de la théologie au service d’un christianisme de diaspora

Premiers repères pour une théologie ajustée à la situation de diaspora

« Qu'arrive-t-il, que doit-il fatalement arriver, lorsqu'un chrétien doit vivre son christianisme au milieu d'une majorité de non-chrétiens ? » C'est en posant cette question qui appelle d'elle-même une foule de réponses que Rahner introduit, au moins implicitement, une manière ajustée de comprendre la tâche théologique, lui donnant quelques contours grâce à rénumération de cinq marqueurs.

1. Il est significatif qu'il commence par l'individu et la distinction entre un « christianisme de reproduction » (Nachwuchschristentum) et un « christianisme d’élection » (Wahl-Christentum), ce dernier devant trouver sa forme - à chaque fois singulière - au sein d'un environnement étranger et sans pouvoir s'appuyer sur des institutions a priori favorables (a). Cette conscience chrétienne de l’altérité du monde doit compter avec la consistance propre des valeurs sociales, civiles, politiques et culturelles de la société (« sécularisée ») ; elle doit certes accepter les inévitables conflits éthiques qui en résultent, mais en renonçant à les aborder dans un esprit de ressentiment (b). Les deux marqueurs suivants portent alors sur l'Église et les rapports entre laïcs et clercs. Ayant sociologiquement parlant un caractère de « secte », l'Église vit désormais du « bon vouloir de ses membres ordinaires » ; elle offrira, dans ses apparences immédiates, un « visage plus religieux que jadis » ou « s'orientera, pour ce qui relève de son agir immédiat, vers le domaine de sa vie la plus intime » (c). Quant au clergé, il perd sa place privilégiée et « finira par cesser d'être dans l'ensemble un "état" au sens sociologique du terme » (d). Ce qui conduit à affirmer comme dernier marqueur la « laïcité » (sans utiliser ce terme ici).

2. Dans la dernière partie de l'article, consacrée aux « conséquences » du statut diasporique de l'Église, Rahner met les cinq marqueurs que nous venons d'énumérer en mouvement. Il part de la différence entre « ghetto » ou « secte » (au sens limitatif du terme) et ouverture missionnaire (a) - différence chrétienne déjà abordée plus haut - et en explicite, parmi d'autres applications, deux aspects particulièrement décisifs : la recherche (missionnaire) d’« un point d'insertion favorable » auprès d'autrui - « ce sera là où le sujet manifeste une compréhension authentique à l'égard d'une tendance supérieure » -; et la prise de conscience de «l'opacité spirituelle liée à l'ambiance sociale et qui atteint tout le monde» (par exemple dans le cas d'un divorcé remarié !) (b). C'est donc la disparition des « vieilles façades » de la chrétienté et des faux motifs de la mission qui permettront à celle-ci de retrouver sa véritable source eschatologique (c) .

3. D'autres textes de Rahner de cette décennie préconciliaire permettraient de montrer comment, dans le laboratoire pastoral et missionnaire de ces années de « tuilage », s'esquisse déjà une nouvelle manière de faire de la théologie, amorcée dans son discours sur la diaspora ; mais ce n'est pas l'objectif de ce chapitre. Notons cependant que, outre son « Essai d'une esquisse de dogmatique », déjà cité plus haut, Rahner propose, la même année, un deuxième article sur « Le théologien », texte sous-titré « De la formation des théologiens aujourd’hui ». Nous le mentionnons ici parce que, militant pour une réforme des études, il fait état d'un diagnostic alarmant (en 1954 !) qui confirme notre propre constat d'un « schisme vertical ». À côté de considérations sur la mutation de l'Université après la Deuxième Guerre mondiale et le déplacement des aptitudes chez les étudiants, il fustige la fragmentation des disciplines, leur manque de communication entre elles et surtout l'absence d'un « centre » (Mitte) ; phénomènes qui, au sein de nos sociétés contemporaines, ont progressivement éloigné la théologie savante de la réalité effective des communautés chrétiennes et de leurs pasteurs.

Formulant quelques orientations d'avenir, Rahner défend donc une nette distinction entre la formation universitaire et la formation pastorale, milite, pour ce qui est de cette dernière, en faveur d'un allégement, d'une concentration et d'un approfondissement et, surtout, donne deux indications, de fond et de forme, sur le « centre » de la théologie. La situation diasporique de l'Église exige que « la théologie prenne un caractère franchement pastoral, dans le sens d'une attestation et d'une proclamation de la foi à l'adresse des hommes d'aujourd'hui tels qu'ils sont » ; ce qui nécessite, du côté des pasteurs ou prédicateurs, mais aussi des membres ordinaires de l'Église, que soit promu un rapprochement entre la théologie dogmatique et la théologie spirituelle, entre l'enseignement théologique et la formation de la personnalité, tâche qui incomberait in fine à la théologie pastorale.

 

Les visages que nous aimerions voir dans l'Église

"Cap sur la mission", regards des membres de la famille pradosienne

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