La mission du chrétien : devenir chaque jour davantage un homme parfait. Et nous avons un modèle pour atteindre cette perfection : le Christ
« Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent ».
L’annonce évangélique de ce jour n’est pas de tout repos. Cette parole résonne fortement en ces jours où les médias ont précisément parlé du procès des assassins du Père Hamel.
Témoignage de Roseline Hamel et de Guy Coponet - Voir ici et ici.
Lecture du premier livre de Samuel : 26. 7 à 23 : “Je n’ai pas voulu porter la main sur le roi qui a reçu l’onction du Seigneur.”
Psaume 102 : “Le Seigneur te couronne d’amour et de tendresse.”
Saint Paul. 1re lettre aux Corinthiens : 15. 45 à 49 : “Le Christ est devenu l’être spirituel qui donne la vie.”
Évangile selon saint Luc : 6. 27 à 38 : ”Vous serez les fils du Très-Haut, car il est bon pour les ingrats et les méchants.”
« De même que nous aurons été à l’image de celui qui est fait d’argile, de même nous serons à l’image de celui qui vient du ciel ».
Je prends cette phrase de Paul aux Corinthiens pour introduire la méditation à laquelle m’invite l’Évangile de ce jour.
Nous parlons, nous entendons parler des prochaines élections. Tout au moins, j’espère que les conversations des chrétiens manifestent que cette réalité humaine n’est pas absente de leurs préoccupations. Je pense à cela, très précisément ces jours, pour plusieurs raisons. D’abord la publication des évêques de France à l'approche de l'élection présidentielle : « L'Espérance ne déçoit pas ».
Ensuite, l’engagement très précis de l’Église protestante unie de France avec son « Adresse du protestantisme aux candidats ».
Et je ne peux oublier la rencontre que j’ai eu jeudi soir avec l’Antenne sociale qui propose dans ses locaux de la maison Notre-Dame de Saint Alban une soirée à ce propos. Ce sera le jeudi 10 mars à 18 h 30.
Les turbulences mondiales de la Covid-19 nous suggèrent également qu’il importe de demeurer attentifs à la bonne gouvernance possible. On entend dire que demain ne sera plus jamais comme hier ; mais, tout s’organise pour qu’hier revienne vite. Travailler plus pour gagner plus proclame certaines voix. Il y a des produits terreux dans ces propos. Je pense à Adam, l’humanité de la terre, comme en parle Paul. Alors que nous sommes faits d’argile, nous sommes invités à ne pas oublier que nous sommes aussi à l’image de celui qui vient du Ciel. Nous sommes des Christiens, du Christ. Tenant de cette réalité suprême, quelle société voulons-nous ?
Le discours de Jésus sur l’amour des ennemis est un enseignement original qui traverse les siècles. Suivre ses conseils (dits évangéliques), c’est se donner les armes pour construire une humanité nouvelle.
Ayant entendu de nouveau la proclamation de cette page d’Évangile, prenons conscience qu’à la suite du Christ le temps de la vengeance cède la place à celui de la miséricorde, du pardon. La loi du talion, selon l’Exode (21,25) : « œil pour œil, dent pour dent », était déjà un progrès. En effet, elle vise à limiter la vengeance, la tendance étant, à l’époque, d’exterminer tout le village quand un seul était tué. C’est le règne de la haine violente.
Effectivement, la loi évangélique de la non-violence apporte un plus : le désappointement du violent. Regardons, avec le récit sur David et Saül, les antécédents de ce nouveau comportement : amour des ennemis. Nous voyons qu’une nouvelle façon de vivre, qu’une nouvelle morale s’instaure en déstabilisant l’ancienne. Une nouvelle intelligence aussi. En effet, la force brutale de celui qui ne connaît que l'argument des muscles disparaît devant l'intelligence, l'astuce, la sagesse d'un David qui sort vainqueur d'une situation difficile. Son sage discernement lui permet de vaincre la force absurde de Saül et de son armée de 3000 hommes.
La mission du chrétien consiste en cela : devenir chaque jour davantage un homme parfait. Être plus humain s’accorde avec moins violent. Et nous avons un modèle pour atteindre cette perfection : le Christ. Second Adam, il est venu parfaire notre nature humaine jusqu’à la résurrection, celle-ci étant incluse dans l’humain. Autrement dit : la vocation de l'homme est d'être associée à la gloire du Christ ressuscité :
« De même que nous sommes à l'image de celui qui est pétri de Terre (Adam), de même nous serons à l'image de celui qui vient du ciel ».
Et Jésus, tel un modèle, nous enseigne comment atteindre ce but.
« Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent ».
Alors que des bruits d’invasion se font entendre dans le nord-est de l’Europe, alors que des tendances partisanes s’affrontent partout sur la maison commune Terre, je pense que, fils et filles d’Adam le terreux, nous sommes invités à ne pas négliger cette recommandation du Christ envers la fraternité universelle.
Jésus dit :
« Souhaitez du bien à ceux qui vous maudissent ; priez pour ceux qui vous calomnient ».
« Faites du bien et prêtez sans rien espérer en retour ».
Voici trois témoignages :
1 - Mon oncle, dit un Camerounais, vivait, à son arrivée en France, dans un foyer Sonacotra. Un jour des compatriotes se trouvaient au rez-de-chaussée du foyer-hôtel. Ils attendaient quelqu'un qu'ils disaient connaître. Mais ce quelqu'un était inconnu au foyer. On est venu chercher mon oncle. Mon oncle leur donna à manger et paya les frais de l’hébergement jusqu'à ce qu'ils trouvent un logement.
Plus tard, mon oncle a été malade. Il trouva dur que ces gens, sortis de leur situation difficile grâce à lui, ne lui aient pas rendu visite. « Ils sont sans reconnaissance », avoue-t-il.
2 - J'avais une copine dans le besoin. Je lui ai prêté plusieurs fois de l'argent pour qu'elle paye son loyer. Elle ne m'a jamais rien rendu et ne m'a même pas dit merci. On ne se téléphone plus.
Jésus dit :
« vous serez les fils du Dieu Très-Haut, car il est bon, lui, pour les ingrats et les méchants. »
3 - Une personne est venue dans notre communauté pour demander de l'argent, de la nourriture. Elle a promis de rembourser. Nous ne la voyons plus. Elle a changé d'adresse. Si elle se présente un jour à notre porte, comment la recevoir ?
Jésus :
« Soyez miséricordieux comme notre Père est miséricordieux. »
Certes, nous avons conscience du caractère utopique de ces conseils. Mais utopique ne veut pas dire illusoire. Au contraire, mettre en œuvre ce modèle est la porte qui va, concrètement, ouvrir nos vies pour que se transforme le monde. C’est une invitation à se retrouver à plusieurs afin d’analyser, par exemple, des programmes électoraux (ou la vie d’une entreprise) à la vue de cette grille de lecture :
« Ce que vous voulez que les autres fassent pour vous, faites-le aussi pour eux ».
La merveille que nous découvrons, quand nous obéissons à l’idéal chrétien de douceur et de pardon, c’est la transformation profonde qui s’introduit en nous. Parce que nous nous ouvrons à l’Esprit de Dieu, celui-ci nous habite et nous inspire de plus en plus. Peu à peu, nous voyons s’accomplir en nous la promesse formulée par le prophète Ezéchiel (Ez 36, 27) : « je vous donnerai un cœur neuf et je mettrai en vous un esprit neuf ; j’enlèverai de votre corps le cœur de pierre et je vous donnerai un cœur de chair. »