Si nous sommes en vie, c’est parce que des délinquants solidaires ont désobéi, nous ont cachés, nous ont nourris, en dépit des lois de Vichy
Décès de Georges Gumpel, survivant de la Shoah et militant des droits de l'homme
Ce mercredi 21 juin 2023, jour du 80ème anniversaire de l'arrestation de Jean Moulin, est décédé à Lyon Georges Gumpel, une figure du militantisme en faveur des jeunes migrants africains de la métropole de Lyon, également membre très actif de l'Union Juive Française pour la Paix (UJFP ).
Né en 1937 dans une famille juive non-pratiquante, aîné d'une fratrie de trois (deux sœurs cadettes), Georges passe ses premières années à Paris. Suite à la remise des pleins pouvoirs au maréchal Pétain, ses parents décident de se replier sur Lyon, et Georges et les siens arrivent dans cette ville au printemps 1942. Quand, en 1943, la Zone libre est, à son tour, occupée par les Allemands, les parents de Georges confient ce dernier à une institution catholique de Lyon, l'école privée de la paroisse Saint Alban dont le curé était alors l'abbé Laurent Rémillieux, et dont l'un des vicaires était l'abbé Alexandre Glasberg, d'origine juive, qui s'illustra de manière héroïque et efficace dans le secours aux Juifs persécutés. Quelques semaines plus tard, Georges est pris en charge par des métayers de Montfaucon-en-Velay, en Haute-Loire, où il restera jusqu'à la fin de la guerre, tandis que ses deux sœurs sont cachées dans l'Allier.
Militant socialiste, membre des réseaux proches du Bureau central de renseignements et d'action basé en Angleterre, Alfred Gumpel, le père de Georges, est arrêté en juillet 1944 dans le quartier de Perrache alors qu'il distribue des tracts appelant à la résistance. Incarcéré à la prison Montluc, il fait partie, le 11 août 1944, du dernier convoi vers Auschwitz diligenté par le chef de la Gestapo, Klaus Barbie. Il meurt quelque six mois plus tard, le 10 avril 1945, dans le camp de Melk, en Autriche, camp annexe de celui de Mauthausen. En 1987, Georges se portera partie civile au procès du « boucher de Lyon ».
A l'issue de la guerre, Georges est confié par sa mère à un orphelinat de Montmorency. Devenu adulte, il retournera en région parisienne, où il exercera notamment le métier de grossiste en fleurs.
Georges Gumpel, enfant caché et rescapé de la Shoah, gardera jusqu'à son dernier souffle une sensibilité exacerbée en face des situations d'injustice, particulièrement celles touchant des enfants et des jeunes. Durant la Guerre d'Algérie, il s'engage dans le soutien avec le peuple algérien. Quand est créée, en 1994, l'Union Juive Française pour la paix, organisation de Juifs laïcs hostiles à la politique israélienne à l'égard du peuple palestinien, il rejoint cette organisation très singulière dans le paysage juif français, et il en sera, un temps, le porte- parole. En avril 2017, il est, bien entendu, un de premiers signataires du « Manifeste des enfants cachés » lancé par l'UJFP en soutien aux jeunes migrants africains à qui l'Administration française refuse le droit au séjour. Toutes ces dernières années, il sera très présent aux squats de jeunes migrants sub-sahariens de la Métropole de Lyon et dans les collectifs de soutien aux « sans-papier ».
Christian Delorme