Construire une communalisation qui tienne compte du schisme entre les théologiens universitaires et la vie chrétienne de base pratico-pratique
Pour la rencontre concernant la lecture de « Le courage de penser l’avenir » (voir ici) , Bernard a rédigé cette page. Elle offre un « résumé » de l’échange que nos avons eu et présente confortablement le contenu de notre échange. Bonne lecture sans oublier les temps de silence, de méditation et de prière auxquels nous sommes invités pour, effectivement vivre le courage de penser l’avenir.
Du reste, je dirai, par mode de parenthèse, que les pages de ce blogue sont désormais orientées vers cette direction, construire l’avenir. Au moins, poser les fondements d’un futur possible sans désespérance.
Chapitre XVII de « le courage de penser l’avenir » : FAIRE DE LA THÉOLOGIE AU SERVICE D'UN CHRISTIANISME EN DIASPORA. Pour un pragmatisme éclairé.
La culture chrétienne est devenue minoritaire avec la sécularisation. La difficulté grandit de ne plus inspirer la vie quotidienne des populations, difficulté que les sociologues appellent « l’exculturation ».
À partir du moment où l’Église se répand sur toute la planète, il faut admettre que la grâce y habite déjà. L’Église ne vit plus dans une sphère limitée, la Méditerranée. En conséquence elle a à composer avec sa dimension planétaire de diaspora et sa première tâche est d’admettre qu’elle est voulue par Dieu, ce qui induit de guetter toute présence divine et d’apprendre de ses adversaires.
La deuxième tâche est de construire une communalisation qui tienne compte du schisme entre les théologiens universitaires et la vie chrétienne de base pratico-pratique. (Note : La communalisation est une relation sociale basée sur une sorte de conscience communautaire, le sentiment subjectif d'appartenir à un groupe. On peut aussi penser à nationalisation.)
Ch. Theobald distingue cinq marqueurs pour décrire la conscience chrétienne de cette altérité, elle doit compter avec : 1 - la consistance propre des valeurs sociales, civiles, politiques et culturelles de la société (sécularisée) 2- Rapport entre les laïcs et les clercs, 3 – le clergé sort de son état 4 – le socle est le bon vouloir de ses membres ordinaires. Donc, 5 marqueurs : Ce qui conduit à affirmer comme dernier marqueur la « laïcité ».
Ces marqueurs sont en mouvement et incitent a) à prendre conscience de l’opacité spirituelle du monde, b) à faire disparaitre les vieilles façades historiques de la chrétienté et les faux motifs de mission qui lui permettront de retrouver le sens eschatologique de sa mission. L’auteur se référant à Rahner distingue la formation universitaire et la formation pastorale.
Il décrit ensuite les orientations à envisager pour les études universitaires. Sans rentrer dans le détail (se référer pour cela à la deuxième partie du ch XVII) il précise que cette formation doit leur permettre qu’ils voient leur fin pastorale, tout en étant une aide à fonder toute leur vie dans la foi et à l’en pénétrer. S'appuyant sur un schéma très simple de communication qui articule ce qui est à communiquer (tradendum), ceux et celles qui le transmettent (tradentes) et ceux et celles auxquelles ils s'adressent (les destinataires), le processus de tradition permet non seulement d'intégrer les « marqueurs » repérés par Rahner pour caractériser la situation diasporique de l'Église (voir plus haut) mais aussi de situer, de manière rétroactive, le moment présent en son déploiement actuel (ce qui est la toute première tâche de la théologie).
La deuxième partie du chapitre concerne l’esprit de recréation à insuffler dans la formation théologique universitaire qui se rapproche des communautés chrétiennes et des courants qui traversent le monde, voire s’opposent à elle. J’en retiens ce dernier paragraphe qui rejoint les autres chapitres sur la tradition, la relation entre les tradentes , ceux qui enseignent, et le tradendum , ce qui est à enseigner, le sensus fidei et l’urgence de la synodalité. Ces points peuvent orienter notre vie paroissiale de terrain et nos engagements associatifs , voici ce paragraphe :
La difficulté majeure de la (troisième) tâche qui se dessine ici est de rejoindre effectivement le « monde de la vie » ou le « terrain » où les communautés se donnent un avenir. La réponse est dans la tradition. Désormais, les traditions sont en effet livrées très radicalement à un acte de réception qui est en même temps de l'ordre de la recréation. La (troisième) tâche des théologiens et théologiennes experts est donc d'intervenir dans l'autocompréhension même des communautés chrétiennes et dans la « formation » du sensus fidei fidelium et des consensus ecclésiaux.