Gérard Collomb : « Alfred Ancel fut un homme de son temps, un témoin et un acteur de cette période si intense de l’histoire de France.

Publié le par Michel Durand

Gérard Collomb : « Alfred Ancel fut un homme de son temps, un témoin et un acteur de cette période si intense de l’histoire de France.

Jean-Paul, me sachant passionné par l'histoire du Prado et, entre autres, de Monseigneur Ancel, m’adresse ce numéro de la Gazette de Gerland (N° 89, Août/septembre 2024).

Georges DURIEZ est, je pense, l’auteur de cet article

 

POURQUOI LE SQUARE DE LA RUE CHALLEMEL-LACOURS’APPELLE-T-IL « SQUARE MONSEIGNEUR ALFRED ANCEL » ?

Le samedi 27 octobre 2007, Gérard Collomb, Sénateur-Maire de Lyon, prononce un discours dans un square de Gerland situé à l’angle des rues Prosper Chappet et Challemel-Lacour1.

Le Maire est là pour dévoiler une plaque, afin de donner à cet espace très arboré le nom de « Square Monseigneur Alfred Ancel, 1898-1984, Evêque auxiliaire de Lyon, Supérieur général du Prado. » Mais qui est donc ce personnage religieux ?

Sont « rassemblés » au square des membres de la famille Ancel, des autorités catholiques, des Sœurs et Frères du Prado, « compagnons de route et amis de Mgr Ancel », et sont remerciés le Maire du 7ème arrondt, J.-P. Flaconnèche et le père Christian Delorme, « à qui nous devons cette cérémonie », ajoute le Maire.

Le discours commence ainsi : « Nous honorons une très grande figure (Alfred Ancel) qui a marqué l’histoire spirituelle et sociale de notre Cité, dans la seconde moitié du XXe siècle. Surtout dans ses quartiers populaires de la Guillotière et de Gerland. Car Alfred Ancel fut un prêtre au service des pauvres. »

L’allocution de Gérard Collomb, qui a été transmise à la Gazette de Gerland par un prêtre retraité d’à côté de l’église St-Antoine à Gerland, est un texte de 6 pages d’écriture aérée.

Elle résume le soldat qui se porte volontaire à 17 ans à la guerre de 1914-18 où il est blessé, ses études pour devenir prêtre (en 1921 à 23 ans) et sa lecture déterminante d’un livre paru à Lyon en 1922, « Prêtre selon l’Evangile ».

L‘auteur du livre est le prêtre lyonnais Antoine Chevrier (1826-1879) et fondateur à Lyon de l’œuvre du "Prado" 2.

Dans ces années d’après-guerre 14-18 de forte effervescence de « courants de pensée agitant la masse ouvrière », Alfred Ancel vit à Lyon « au milieu des jeunes déshérités et s’efforce de combler le fossé entre le monde ouvrier, celui des plus modestes, et l’Eglise catholique.»

Alfred Ancel, « apôtre du monde ouvrier au XXe siècle »

Alfred Ancel rejoint la société religieuse du Prado en 1925 Il fait sien cet « ambitieux programme », mais pour cela, il s’engage dans des études solides afin de pouvoir transmettre un enseignement intellectuel et spirituel à la hauteur de l’enjeu. Même professeur aux Facultés catholiques, même promu en 1947 Evêque auxiliaire du Cardinal Gerlier (1880-1965), Ancel est « l’évêque des baraques de Gerland », comme le souligne Gérard Collomb.

De fait, en 1953, favorable à l'expérience de prêtres qui travaillent comme ouvriers dans des usines ou des entreprises, il sollicite du Cardinal Gerlier la possibilité d'orienter davantage son apostolat vers le monde ouvrier. Feu vert. Alors fin 1954, Alfred Ancel emménage dans une vieille écurie transformée en appartement au 16 rue Hector-Malot (entre l’av. Jean-Jaurès et la rue de Gerland, habitation détruite depuis et remplacée par un haut immeuble). Avec lui sont un autre prêtre et deux Frères du "Prado". Du début 1955 à juillet 1959, Alfred Ancel travaille de ses mains à domicile pour un industriel du polissage, avec l'accord de sa hiérarchie religieuse. Mais quand en 1959 l’Eglise, depuis Rome, interdit la déjà longue expérience de ”prêtres ouvriers”, Ancel se soumet douloureusement et cesse son activité ouvrière salariée.

En fin d’allocution, Gérard Collomb résume le pourquoi de l’appellation du square : « Alfred Ancel fut un homme de son temps, un témoin et un acteur de cette période si intense de l’histoire de France. Celle des années d’immédiat après-guerre, des Trente Glorieuses (de 1945 à 1975, NDLR), de la mutation industrielle puis la crise économique des années 70. » Puis il termine : « A Lyon, Alfred Ancel et d’autres grandes figures ont déployé une même énergie en quête d’un monde meilleur, fait d’égalité, de justice sociale, de fraternité et d’humanité 3. »

Le style est bien sûr un peu pompeux, comme tout discours. Mais après tout, un constat local est exact : comme ailleurs, Gerland connait de plein fouet la désindustrialisation : les entre-prises Câbles de Lyon puis bientôt Brandt-CIAPEM -plus de 2 000 ouvriers dans chacune-, le Central PTT sur le bd Yves Farge, les usines de fer à béton Mure ou de grues Weitz…, toutes ont été délocalisées et des ouvriers nombreux sont restés sur le carreau. Ensuite, à propos des valeurs d’« égalité, justice… », elles restent notre part à faire, en tout temps, qui que nous soyons. Le square-jardin Ancel d’aujourd’hui Aménagé vers 1970, le jardin est un vaste carré de terre de 1500 m2 ; quatre rangées de platanes lui donnent une ombre bienfaisante. La partie centrale est équipée de 9 bancs neufs, d’une aire de jeux pour les 1-12 ans très prisée des nounous, d’un WC public. Le long de la rue Chappet, un terrain de boules et des bancs attendent les joueurs.

 

1 Le square se situe exactement entre l’av. J-Jaurès et la rue Marcel-Mérieux, à proximité de l’école A. Briand et de la place des Pavillons respectivement.

2 Antoine Chevrier a été nommé prêtre à la Guillotière, qui était à cette époque un quartier d'ouvriers pauvres. En 1856, il s’engage avec les plus démunis. En 1860, il loue puis rachète une ancienne salle de bal, « le Prado », qu'il transforme en chapelle. Et l’homme religieux prend en charge « des jeunes adolescents de chaque sexe, errants et abandonnés. » En 1866, le père Chevrier décide de fonder au "Prado" une « école cléricale », pour « faire une pépinière de prêtres qui soient élevés avec mes enfants, pour qu’ils les comprennent bien ». Ainsi nait l'Association des Prêtres du Prado. A sa mort à 53 ans, l’association ne compte que 4 prêtres et quelques Sœurs. Pourtant ses obsèques sont suivies par 50 000 personnes.

Aujourd'hui, l'Association des Prêtres du Prado (les Pradosiens) comprend aussi un groupe de Sœurs et un groupe de laïcs consacrés (hommes et femmes). Ils sont présents dans plus d'une quarantaine de pays. Source : Wikipedia.

3 Une année Alfred Ancel du 11/9/2024 au 11/9/ 2025. Entre autres, l’inauguration de l’expo « Un évêque lyonnais dans son siècle » le samedi 14/9 à la Basilique St-Bonaventure, suivie d’une conférence. Expo jusqu’au 31/10/24.

En savoir plus sur l’année : www.leprado.org/annee-alfred-ancel/

Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier : ANCEL Alfred - Maitron

Gazette de Gerland (N° 89, Août/septembre 2024).

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