À la suite des Franciscains de Toulouse qui ont tenu le 1er cercle place du Capitole en 2007, de nombreux cercles se sont créés en France

Publié le par Michel Durand

À la suite des Franciscains de Toulouse qui ont tenu le 1er cercle place du Capitole en 2007, de nombreux cercles se sont créés en France

En Alsace se réunissent des Cercles de Silence, régulièrement à Strasbourg, à Colmar, à Saverne, à Haguenau et à Wissembourg.

Recevant ce courriel avec la liste de coordination des cercles de silence, je découvre l’importance de donner à lire ce témoignage de la persistance dans la résistance. Nous l’écrivions, à Lyon, en février : Résistance. Voir le fichier joint.

 

Compte-rendu Cercle de silence Wissembourg (67) - mars 2025

 

Fin d'après-midi hier dimanche : la place de la République était quasi déserte. Il avait plu avant et une bise froide n'a laissé aucune chance à nos bougies d'anniversaire. Entre les entrées et les sorties nous étions continûment 6 / 7 personnes. De belles photos avec les nouveaux dossards seront donc pour une prochaine fois. 

Cercle calme, presque pas de tracts distribués, jusqu'au dernier quart d'heure lorsqu'un monsieur marchant sur le trottoir en face a commencé à nous invectiver : « Mais prenez-en un (migrant) chez vous ! ». Pas de réponse de notre part, il répète : « Prenez les chez vous et vous verrez ! ». Puis les provocations montent : « Vous êtes pitoyables... Vous êtes pathétiques... Vous êtes ridicules... Bande de connards... Gauchiasses… ».

Pour lui, notre présence est de trop, (il) « va en référer à la gendarmerie » (pour l'empêcher). Entre-temps, et du banc à une dizaine de mètres où il s'est assis, il nous filme de son téléphone. « Madame, je vous ai filmé » (pour preuve pour la gendarmerie ?).

Les invectives et les menaces continuent : « Vivement 2027 qu'on vous dégage avec »... « 130 morts, et à chaque fois par l'un de vos migrants. Je ne souhaite à personne (d'être la victime d'un attentat, semble-t-il), mais je souhaite que l'un de vous le soit ». 

La fin de l'heure sonne : nous remballons. Il continue : « Je reviendrai la prochaine fois, et tous les mois, et avec du monde (avec moi) ! », clairement pour empêcher ce rassemblement qui lui est insupportable.

Alcoolisé ? Drogué ? Cas psychiatrique? Aucun(e) d'entre nous ne peut l'affirmer. Personne ne l'a jamais vu à Wissembourg non plus. Mais tout le monde a perçu ses MENACES inouïes, inédites et graves. Tous choqués, et d'un commun accord, nous avons décidé que ce matin l'un de nous ira les signaler à la gendarmerie, laquelle n'est pas passée hier.

Encore un peu sonnée ce matin, je reprends Vaclav Havel, cité par Marcel du Cercle de Haguenau, « l'espérance n'est pas la conviction que tout ira mieux demain, mais la certitude que notre engagement a un sens quoiqu'il advienne ».

 

Rendez-vous mercredi 30 avril, même heure et même endroit.

Bonne semaine, Blandine 

 

 

Plusieurs cercles de silence ont témoigné de leur soutien :

Bonjour, Le cercle de silence d'Aix-en-Provence vous exprime son entière solidarité et vous encourage ivement, comme vous le proposez, à persister dans votre engagement en faveur des exilés.

Le cercle de Roanne est aussi de tout cœur avec vous !

Nous avons à chaque fois la protection d’un RG qui nous a parfois défendu de ce genre d’agression… Voulez vous que je lui demande conseil pour vous ? Il est très proche…Peut-être avez-vous l’équivalent dans votre région ?

Tout notre soutien ! Cercle de silence d'Etampes 91

Cercle de silence de Villefranche-sur-Saône : Pour info, et partage. Nous ne sommes pas à l'abri d'individus mal éduqués, voire dangereux, et nous sommes de tout cœur avec Wissembourg ne baissons pas les bras !

C’est aussi ce que nous pensons à Lyon : Résistance

 

De Wissembourg, Christiane, en mars 2018 : 

Pour finir, je laisse la parole au directeur de SOS méditerranée, Francis Vallat : « On peut discuter pendant des heures de la politique migratoire, le problème n’est pas celui-là, il est de dire qu’on ne peut pas laisser des gens mourir à nos portes, que le sauvetage ne se discute pas… À un moment donné, quand quelqu’un coule, vous le sauvez… Nous, on essaie de sauver notre âme, celle de l’Europe. » (Edwy Plenel, Le Devoir d’hospitalité. Bayard, 2017)

 

Les échanges se prolongent ; ils apportent une forte réflexion notamment sur l'action dans la dynamique de la non-violence. Même si c'est dans le désordre je trouve juste de les mettre en ce lieu. 

Michel s'exprime : Bonjour, puisque divers cercles réagissent au compte rendu du cercle de Wissembourg, je me permet de vous adresser la réponse à Blandine que je lui ai envoyée ce matin. Le texte est évidemment personnel et n'engage que moi. Le voici :

Bonjour,

Vous avez fait la rencontre avec un vrai pauvre : pauvre qui souffre certainement, mais de quoi ? tant qu'on n'a pas établi un lien avec lui, on ne peut pas savoir. Quel est sa vie ? quelles difficultés, ou traumatismes a-t-il vécu ? ce n'est pas à nous de juger ! Peut-être a-t-il pris chez lui un migrant ? On ne sait pas !

Il dit vrai quand il nous trouve : pitoyables... pathétiques… ridicules. Il faut reconnaitre que nos actions n'ont pas eu d'effet sur les instances et autorité du pays. Les actions bénéfiques pour les migrants ont lieu dans les associations, pas au cercle de silence. L'action non violente est une voie difficile à parcourir.

Cet homme a un ressenti, mais ne sait plus quoi faire, puisqu'il s'en réfère à la gendarmerie ! Comme un enfant dans la cour de récréation : « je le dirais à mon père ! » On se place à un autre niveau : on est passé du ressenti d'une personne à la structure de l'administration d'un pays ! Ceci dit, s'il ne vous a pas demander l’autorisation de vous filmer, son film n'a aucune valeur juridique, et même peut se retourner contre lui, car on n'a pas le droit de faire des images sans le consentement des personnes.

Quant à la réflexion : « Vivement 2027 qu'on vous dégage avec » : j'y souscrit car imaginez qu'en 2027, on ait un gouvernement de gauche, type « ce qui a lieu en Espagne - voir les lettres 102 et 103 - il n'y aurait plus de raison de continuer les cercles de silence.

Sa déclaration est satisfaisante : « Je reviendrai la prochaine fois, et tous les mois, et avec du monde (avec moi) ! », cela vous fera plus de personnes au cercle de silence. En effet le but des cercles de silence est bien d'éveiller les consciences, et de faire de la publicité afin de diffuser de l'information. S'il vient avec d'autres, et que la gendarmerie est présente, elle fera son travail, et s'il y a du remue-ménage, la presse sera là et donc fera connaître le cercle de silence : ce sera une bonne chose.

Il me semble que vous interprétez les propos de cet homme, quand vous écrivez : « Alcoolisé ? Drogué ? Cas psychiatrique ? Aucun(e) d'entre nous ne peut l'affirmer. Personne ne l'a jamais vu à Wissembourg non plus. Mais tout le monde a perçu ses MENACES inouïes, inédites et graves ». Je comprends que ces échanges vous aient choqués. Faire une déclaration à la gendarmerie (c'est donc indiqué qu'ils n'ont pas fait leur travail !!), je comprends. Mais est-il bon de rappeler que dans notre pays de droit, on ne se fait pas juge soi-même.

Enfin, de mon point de vue, les cercles de silence n'ont pas pour objet d'être un espoir, car un espoir sous-entant qu'une fois arrivé au but qu'on s'est fixé, la question sera réglée. Les cercles sont une espérance, donc qui se prolongent dans le temps, qui indiquent une direction, un cheminement, qui construisent un avenir à venir, qui manifestent une façon de penser et donc un engagement à continuer. Une façon de témoigner qu'on peut vivre autrement avec des idées renouvelées et personnelles.

Cordialement,

 

Et encore ce courriel

Merci à Michel pour ses riches réflexions.
Ma réaction à l'une d'elles  "Il faut reconnaitre que nos actions n'ont pas eu d'effet sur les instances et autorités du pays". À La Rochelle  notre Cercle ne s'adresse pas aux autorités, mais aux passants. Nous avons juste l'objectif de faire de la prévention : sensibiliser, montrer que la solidarité a encore des partisans qui osent s'afficher, encourager à ne pas baisser les bras. Ces citoyens, touchés par dizaines chaque mois depuis des années, ont peut-être permis que la bascule raciste de l'opinion soit ici moins brutale que ce qu'elle aurait été sans nous. D'ailleurs l'association Solidarité Migrants 17 signale notre Cercle chaque mois dans sa lettre d'information, ce qui signifie qu'elle y croit.
Cordialement.
Yves
PS : j'adresse notre soutien aux "Cerclistes" de Wissembourg

 

Tract du cercle de silence de février 2025 à Lyon

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article