les diverses conceptions du temps
Comme je l'ai indiqué précédemment, dans cette catégorie "anthropologie", je donne diverses réflexions sur le sens, ou non sens, du travail.
Textes qui me semblent d'une grande importance alors qu'on veut augmenter la durée du travail salarié tout en critiquant "mai 68".
Je poursuis la publication des textes qui résultent du colloque que nous avons tenu avec Confluences il y a au moins une dizaine d'année. Cette
semaine et la semaine prochaine la parole est donné à Georges Decourt, prêtre, socilogue, ayant travail à Economie et Humanisme.
1. Les représentations sociales du travail et du loisir à travers le temps
Plusieurs recherches vont dans le même sens (André Gorz, Guy Aznar, Dominique Méda), mais je m’appuierai surtout sur celle de Robert Sue .
“Le temps est toujours un principe d’organisation”, nous dit-il. Chaque société construit sa représentation du temps. Chaque période de l’histoire se caractérise par un “temps dominant” qui régule les autres types de temps social. Ainsi distingue-t-il le temps sacré des sociétés humaines stables, qui ont une vision cyclique du temps et dépendent fortement de leur environnement physique. Puis le temps religieux devient dominant en Europe jusqu’au XIIIème siècle, avec des représentations religieuses monothéistes, une vision linéaire de l’histoire, une plus grande autonomie par rapport au cosmos. Ensuite le temps marchand supplante celui des pouvoirs religieux. Au XVIIIème siècle le temps de travail dans les mines ou les manufactures occupe la place centrale d’un temps devenu industriel. La fin du XXème siècle connaît la libération du temps de travail et l’avènement du temps de loisir. L’auteur distingue alors le temps contraint (formation, travail professionnel, soins domestiques...) et le temps libéré du travail (loisir, engagements sociaux, retraite...).
En reprenant les distinctions de Robert Sue, nous pourrions dire que lorsque la nature dicte son temps, l’emploi typique est celui de l’agriculteur d’autrefois soumis au rythme des saisons. Lorsque le temps dominant devient celui de l’industrie, nous pourrions distinguer des variations : le temps de la production où la machine dicte son rythme, l’emploi typique étant celui de l’ouvrier de manufacture attaché à la machine qu’on utilise au maximum avec les 3x8 heures de travail ; le temps du marché où le client dicte son temps (le zéro délai de livraison) ou bien l’offre de service dicte sa loi quand elle se fait rare, c’est un marché ; puis le temps libéré avec la réduction du temps de travail tout au long d’une vie et l‘allongement de l’existence.
Robert Sue estime qu’en 1850, avec une durée de vie de 45 ans, pour 5 000 heures de travail par an pendant 37 ans, un homme passait 70 % de son temps éveillé (hors sommeil) à travailler. En 1990, avec une durée de vie de 75 ans, pour 1 500 heures de travail par an pendant 40 ans, il passe 14 % de son temps éveillé à travailler.
L’hypothèse de Robert Sue s’énonce ainsi. Le temps dominant dans les représentations actuelles est celui du travail, alors que dans les faits c’est le temps libre qui domine, non pas le temps inactif, mais le temps non rémunéré. Il explique ce décalage par le retard de la perception des réalités sur les réalités elles-mêmes et par la menace de perdre son emploi ou de ne pas en retrouver qui survalorise le travail.

Plusieurs recherches vont dans le même sens (André Gorz, Guy Aznar, Dominique Méda), mais je m’appuierai surtout sur celle de Robert Sue .
“Le temps est toujours un principe d’organisation”, nous dit-il. Chaque société construit sa représentation du temps. Chaque période de l’histoire se caractérise par un “temps dominant” qui régule les autres types de temps social. Ainsi distingue-t-il le temps sacré des sociétés humaines stables, qui ont une vision cyclique du temps et dépendent fortement de leur environnement physique. Puis le temps religieux devient dominant en Europe jusqu’au XIIIème siècle, avec des représentations religieuses monothéistes, une vision linéaire de l’histoire, une plus grande autonomie par rapport au cosmos. Ensuite le temps marchand supplante celui des pouvoirs religieux. Au XVIIIème siècle le temps de travail dans les mines ou les manufactures occupe la place centrale d’un temps devenu industriel. La fin du XXème siècle connaît la libération du temps de travail et l’avènement du temps de loisir. L’auteur distingue alors le temps contraint (formation, travail professionnel, soins domestiques...) et le temps libéré du travail (loisir, engagements sociaux, retraite...).
En reprenant les distinctions de Robert Sue, nous pourrions dire que lorsque la nature dicte son temps, l’emploi typique est celui de l’agriculteur d’autrefois soumis au rythme des saisons. Lorsque le temps dominant devient celui de l’industrie, nous pourrions distinguer des variations : le temps de la production où la machine dicte son rythme, l’emploi typique étant celui de l’ouvrier de manufacture attaché à la machine qu’on utilise au maximum avec les 3x8 heures de travail ; le temps du marché où le client dicte son temps (le zéro délai de livraison) ou bien l’offre de service dicte sa loi quand elle se fait rare, c’est un marché ; puis le temps libéré avec la réduction du temps de travail tout au long d’une vie et l‘allongement de l’existence.
Robert Sue estime qu’en 1850, avec une durée de vie de 45 ans, pour 5 000 heures de travail par an pendant 37 ans, un homme passait 70 % de son temps éveillé (hors sommeil) à travailler. En 1990, avec une durée de vie de 75 ans, pour 1 500 heures de travail par an pendant 40 ans, il passe 14 % de son temps éveillé à travailler.
L’hypothèse de Robert Sue s’énonce ainsi. Le temps dominant dans les représentations actuelles est celui du travail, alors que dans les faits c’est le temps libre qui domine, non pas le temps inactif, mais le temps non rémunéré. Il explique ce décalage par le retard de la perception des réalités sur les réalités elles-mêmes et par la menace de perdre son emploi ou de ne pas en retrouver qui survalorise le travail.