Feu les 35 heures ? Non, longue vie au désir de plénitude.

Publié le par Michel Durand

Suite à ma réflexion de cette fin de semaine et dans le contexte de l'homélie à rédiger, j'ai consulté les archives de la revue "Confluences" ; voilà ce que j'ai trouvé.

On ne peut pas dire que le rêve ci-dessous se soit réalisé. Mais la ligne me semble quand même être dans cette direction. Telle est ma conviction. Je le dis, quitte à déplaire une fois de plus aux inombrables optimistes.

Confluences, Éditorial du N° 108, 1999.

Inexorablement nous avançons vers l'an 0. Ce "0" est l'ouverture dans le troisième millénaire. Une année de vide où l'on se réjouit de la justice fraternelle qui se met en place. Les dettes sont remises et ceux qui en profitent viennent fêter avec ceux qui se résignent à remettre tout en se réjouissant, car ils ont, quand même, assez.

Plus que deux mois et le "0" de 2 000 connaîtra la baisse de la durée légale du travail rémunéré.

35 heures par semaine ! Une aubaine. Tout le monde travaille moins pour que tous gagnent de quoi vivre ( en ne chômant pas). La générosité des uns et des autres est manifeste. L'an "0" du partage des tâches est propice au refus des heures supplémentaires. Certes la loi n'impose pas de s'arrêter strictement à 35 heures, mais l'intelligence humaine veille et l'on ne fera pas plus d'heures. On partagera son surcroît de travail. On se réjouira de gagner moins d'argent, car, ainsi, le cœur est plus léger.

Dans deux mois, la porte de l'avenir d'un plus grand temps libre sera donc ouverte et nous nous réjouissons, car celui-ci augmentera encore. Les Maisons de la Culture, les Églises, les groupes sportifs, les lieux publics de discussions - de l'université au café du coin en passant par les lieux associatifs - ont ajusté leur plan pour qu'il puisse sans problème recevoir tous les libérés du travail salarié. Théâtre, cinéma, exposition, voyage, etc. ... Et des débats pour affiner la perception de tout ce qui forme l'esprit. L'agora, lieu de loisir et d'échange, double l'usine et ses productions. Ces dernières sont certes nécessaires, mais les voilà régulèes par les besoins humains spirituels et non par les lois du Capital. L'an "0" est l'année du vide pour qu'advienne l'enrichissement de l'âme. C'est une marche jubilatoire dans le désert à la suite de Jésus qui se glissa dans les 40 périodes du Peuple se constituant entre Euphrate, Nil et Jourdain.

Dans beaucoup de villes et villages, déjà, des Institutions se sont organisées pour recevoir les Universités Tous Ages ou les clubs de randonnée ou les visiteurs des édifices du patrimoine. Les Églises, dont le nom, ne l'oublions pas, signifie Assemblée, réajustent leurs habitudes pour accueillir toutes les demandes spirituelles. Quand le domicile du lieu de travail n'est pas celui où s'épanouissent les rencontres vitales, c'est dans la résidence du vendredi, samedi et dimanche, où tout le temps libre est consacré à la vie personnelle, que se mettent en place les réunions de prière, de catéchisme, enfants et adultes, de préparation aux sacrements. C'est en ce lieu que l'on prend du temps pour la lecture, la méditation, la poésie, l'écriture...

Certes, le gain de temps pour son loisir personnel est moins évident si l'on ne gagne que quelques demi-heures par jour. Il sera difficile, alors, de ne pas gaspiller ce temps libre émietté. Mais, là encore, la clairvoyance humaine trouvera la bonne organisation pour que soit, quotidiennement, offert du temps au loisir.

Le loisir ? Reportons-nous à Sénèque pour en connaître la signification. C'est une action où les moyens sont employés pour atteindre à la tranquillité de l'âme, à sa perfection. C'est le choix d'un genre de vie que l'on qualifiera de mixte dans la mesure où il réalise la synthèse entre vie contemplative et vie active, ce que les stoïciens appelaient une vie selon la raison. Dans cette ligne, disons que l'otium (le loisir) est le positif de la vie ; le négoce, negotium, (le travail) étant son négatif.

Michel Durand

 

Publié dans Politique

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