Il s'incarne pour nous communiquer son amour.
Je continue ma méditation sur l'incarnation, suite à un courriel récemment reçu.
Si Dieu, par son Verbe, se décide de se faire proche de nous, les hommes, s'il s'incarne dans une chair humaine, grâce à Marie, c'est pour nous communiquer son Amour. Or, comme nous l'avons vu dimanche dernier (26 octobre), le commandement d'aimer est double : amour de Dieu et du prochain.
Au Prado on parle du désir de suivre Jésus-Christ de plus près. Cela engage à le suivre partout où il va et l'on s'aperçoit qu'il est plus souvent avec celles et ceux qui reconnaissent leurs faiblesses qu'avec celles et ceux qui se pensent justes. Il passe beaucoup de temps le long du lac de Capharnaüm avec les excommuniés de la synagogue ; il ne craint pas de s'adresser aux parias de la société. Il vit avec ces gens, bravant les interdits bibliques, pour leur communiquer la miséricorde divine. On le voit plus dans la rue que dans le temple ou à la synagogue bien qu'il ne néglige pas ces lieux.
Dans cette ligne, Antoine Chevrier expliquait son désir de suivre Jésus-Christ de plus près, non pour la consolation d'une belle liturgie -bien que celle-ci ne soit pas à négliger- mais afin de devenir plus efficace d'une efficacité divine auprès des pauvres et délaissés de la société.
- « Alors, je me suis décidé à suivre Jésus-Christ de plus près pour me rendre plus capable de travailler efficacement au salut des âmes »
Vivre avec.
Je vous communique quelques phrases écrites par Damiano Meda : « Suivre Jésus-Christ ».
Cela concerne bien sûr les membres du clergé, mais également tout baptisé.
L'accompagnement des personnes est une des formes d'exercice du ministère spirituel du prêtre. Le premier verbe qui qualifie l'action éducative du père Chevrier est le « vivre-avec », parce que la première chose que le fondateur du Prado enseigne, par son exemple d'abord, puis par ses écrits, est l'importance du partage de vie entre le guide spirituel et les personnes qu'il accompagne.
Nous ne disons pas qu'il n'y a pas d'autres formes légitimes d'exercer l'accompagnement spirituel, mais qu'il s'agit de la forme que le père Chevrier a vécue et enseignée, en particulier quand il voulait que ses séminaristes vivent au contact des enfants pauvres du Prado.
Vivre-avec signifie que la formation spirituelle passe par un partage de la vie et une quotidienneté vécue au coude à coude dans une relation éducative avec les personnes.
Exercé à la manière du père Chevrier, le vivre-avec est en même temps une « paternité et une maternité spirituelles ». Ici encore, nous nous fions à une lettre écrite quand il était à la Cité de l'Enfant-Jésus pour confirmer que cette période a vraiment été pour lui un moment très important de sa vie. Devenir un guide spirituel selon le style du père Chevrier ne signifie pas vivre dans les nuages, mais faire et prêter attention aux petites choses, comme le montre ce témoignage : «Hier soir, assez tard, j'ai fait une infusion à Joseph et à Ménétrier. J'ai compris que cela leur faisait plaisir. Il faut s'attirer l'affection par tous les moyens. »
Nous sommes loin de l'imagerie du directeur spirituel impassible, évitant l'implication dans la vie quotidienne des personnes. Nous devons toutefois prendre en compte que ce climat familial qui régnait au Prado facilitait le partage de vie entre les personnes. À titre d'exemple, aucun directeur de séminaire ne s'adresserait aujourd'hui à des séminaristes avec ce ton affectueux que nous trouvons dans la correspondance du père Chevrier : « Pardonnez-moi de vous écrire ainsi sans style, sans phrases. J'écris comme je pense et c'est avec mon cœur que je vous écris, et je vous aime comme mes enfants. Soyez tous à Dieu, tous à Jésus-Christ et tous à l'Église, et ainsi nous serons tous unis par les liens les plus doux, les plus forts et les plus durables, parce que ceux-là seuls tiennent pour le temps et l'éternité. »
Les Lettres contiennent une mine de petites attentions que Chevrier manifeste quand il s'intéresse au sommeil, aux semelles de souliers, à la soutane et aux morceaux d'étoffe pour la raccommoder. Il s'informe pour connaître les besoins et s'inquiète de la santé. Cela vaut la peine de s'arrêter sur ce billet écrit à dessein :
Mon cher Broche, j'envoie par M. Broche, [votre père], qui a eu la bonté de s'en charger, une topette de sirop de mou de veau et des pâtes de guimauve pour le bon ami Delorme. Ayez-en bien soin et ne négligez rien pour le guérir. Achetez chez les sœurs ce qui est nécessaire. S'il était possible de lui faire avaler chaque matin deux œufs frais et un peu de vin, ça pourrait lui faire du bien à sa poitrine délicate... A bientôt pour une longue lettre, il es très tard dans la nuit. Salut A. Chevrier.