Temps hors travail (salarié), temps libre ou choisi
Suite aux définitions données le samedi 19 mai voici quelques lignes pour essayer de clarifier le sens des mots « travail » et « repos »
Valoriser le non-travail
illustration : Création du monde. Dieu (à l'image du Christ) architecte. Le repos, Bible de Ferdinand III, Genèse 2,1-4
Valoriser le non-travail
Il est difficile de qualifier le temps hors travail rémunéré. L’usage est de dire “temps libre”. Mais à chaque fois que nous employons cette expression au cours d’un débat, nous rencontrons plusieurs personnes, voire la majorité, qui déclarent ne jamais avoir de temps libre. Et c’est juste, parce que la nature humaine a des contraintes lui interdisant une liberté absolue. On n’est libre ni de ne pas dormir, ni de ne pas manger ou boire. Pourtant, le temps passé hors contexte d’emploi productif est d’une nature tellement autre que nous pouvons bien le qualifier de libre tout en souhaitant voir augmenter sa durée. C’est, du reste, dans ce sens que semble aller l’évolution de nos sociétés industrielles même si cela est actuellement remis en cause avec le très connu slogan sarkozien : travailler plus pour gagner plus.
En 1988, André Gorz, me semble-t-il, écrivait :
“Plus le développement économique suit son cours, et plus l’importance qu’on attache à sa dimension d’accumulation matérielle devrait décroître, plus l’intérêt pour le temps libre devrait s’accentuer, et plus enfin, l’on devrait mettre en concurrence ces deux formes naturelles d’utilisation des progrès de productivité que sont la production de biens ou services supplémentaires d’une part et la diminution du temps de travail d’autre part”.
Il est important d’avoir employé le conditionnel. En effet, en fait, ce n’est pas ainsi qu’évolue la société : un manque de sagesse se voit dans l’humanité qui veut toujours plus alors que chacun prend conscience de ne pas avoir le temps de profiter de tout. « A cause du travail on n’a pas le temps ». Ou, « si on a le temps parce qu’au chômage, on n’a pas les moyens ».
Il devrait y avoir un marché du temps libre comme il y a un marché du travail. Licenciement ou retraite anticipée ne devraient pas être les seuls moyens pour avoir du temps. Un système est certainement possible qui permettrait, par exemple, de se dégager du temps pour investir dans une association la durée de deux ou trois ans (ou semaines ou mois) avec la perspective de retrouver par la suite une fonction à plein temps en entreprise.
Une telle flexibilité de l’usage du temps n’est possible (désirable) que si l’on se sent à l’aise dans le temps hors travail rémunéré. Et nous savons bien qu’un sentiment de culpabilité subsiste toujours quand on n’accomplit pas ses heures légales (ou normales) de travail.
Temps choisi
Des sociologues emploient l’expression de temps choisi pour désigner ce temps hors travail. Parce que choisi, il est pleinement accepté.
D’où peut venir le gout de choisir de vivre un temps hors rémunération d’entreprise ? De l’intérêt que l’on a pour le loisir. Si l’on considère que le loisir est ce que l’on peut prendre quand il n’y a plus rien à faire, il y a une perception négative de ce dernier. Le temps de loisir doit être compris en lui-même, et par lui-même, avec tout ce qu’il comporte d’intérêt pour le développement, l’épanouissement de l’être humain.
Pour rencontrer le désir et ressentir le besoin d’un temps de non travail salarié) il faut que celui-ci apparaisse dans toute sa valeur. S’il est expérimenté comme temps d’ennui, temps vide, il ne peut être souhaitable. Personne n’aurait idée de le revendiquer.
Notre tâche aujourd’hui, notre mission, véritable défi lancé aux fanatiques du « gagner plus » ne consiste-t-il pas à identifier les temps de non travail. Il faut que ceux-ci prennent plus de poids, qu’ils apparaissent avec plus de valeur, que l’on comprenne bien qu’ils contribuent à l’épanouissement de l’homme et non à sa culpabilisation. Nous souhaitons que les divers systèmes d’organisation du temps fassent une part valorisante au temps choisi en développant un loisir épanouissant qui comble une attente de sens, qui donne une raison de vivre. Ainsi compris, le temps de non travail rémunéré ne sera pas vide, mais plein. Il sera désiré pour lui-même, authentiquement choisi pour son action épanouissante sur chaque membre de l’humanité.
A la suite d’une morale de l’efficacité, du rendement, de la production nous en appelons à une morale de la contemplation, de la densité intérieure, de la plénitude grâce à l’absence de nouveaux produits obtenus en masse. L’homme se construit également dans et par son temps hors travail salarié.
Pour obtenir une telle valorisation du temps choisi, il me semble que l’on devrait davantage réfléchir sur le loisir. Il faudrait que des universitaires se penchent sur la question du temps de travail en partant de celle du temps de loisir. Généralement, c’est l’inverse qui est étudié. On ne cite les loisirs qu’en marge d’une réflexion sur le temps travaillé.
En 1988, André Gorz, me semble-t-il, écrivait :
“Plus le développement économique suit son cours, et plus l’importance qu’on attache à sa dimension d’accumulation matérielle devrait décroître, plus l’intérêt pour le temps libre devrait s’accentuer, et plus enfin, l’on devrait mettre en concurrence ces deux formes naturelles d’utilisation des progrès de productivité que sont la production de biens ou services supplémentaires d’une part et la diminution du temps de travail d’autre part”.
Il est important d’avoir employé le conditionnel. En effet, en fait, ce n’est pas ainsi qu’évolue la société : un manque de sagesse se voit dans l’humanité qui veut toujours plus alors que chacun prend conscience de ne pas avoir le temps de profiter de tout. « A cause du travail on n’a pas le temps ». Ou, « si on a le temps parce qu’au chômage, on n’a pas les moyens ».
Il devrait y avoir un marché du temps libre comme il y a un marché du travail. Licenciement ou retraite anticipée ne devraient pas être les seuls moyens pour avoir du temps. Un système est certainement possible qui permettrait, par exemple, de se dégager du temps pour investir dans une association la durée de deux ou trois ans (ou semaines ou mois) avec la perspective de retrouver par la suite une fonction à plein temps en entreprise.
Une telle flexibilité de l’usage du temps n’est possible (désirable) que si l’on se sent à l’aise dans le temps hors travail rémunéré. Et nous savons bien qu’un sentiment de culpabilité subsiste toujours quand on n’accomplit pas ses heures légales (ou normales) de travail.
Temps choisi
Des sociologues emploient l’expression de temps choisi pour désigner ce temps hors travail. Parce que choisi, il est pleinement accepté.
Désirer une activité non productrice d'euros. Non rentable.
D’où peut venir le gout de choisir de vivre un temps hors rémunération d’entreprise ? De l’intérêt que l’on a pour le loisir. Si l’on considère que le loisir est ce que l’on peut prendre quand il n’y a plus rien à faire, il y a une perception négative de ce dernier. Le temps de loisir doit être compris en lui-même, et par lui-même, avec tout ce qu’il comporte d’intérêt pour le développement, l’épanouissement de l’être humain.
Pour rencontrer le désir et ressentir le besoin d’un temps de non travail salarié) il faut que celui-ci apparaisse dans toute sa valeur. S’il est expérimenté comme temps d’ennui, temps vide, il ne peut être souhaitable. Personne n’aurait idée de le revendiquer.
Notre tâche aujourd’hui, notre mission, véritable défi lancé aux fanatiques du « gagner plus » ne consiste-t-il pas à identifier les temps de non travail. Il faut que ceux-ci prennent plus de poids, qu’ils apparaissent avec plus de valeur, que l’on comprenne bien qu’ils contribuent à l’épanouissement de l’homme et non à sa culpabilisation. Nous souhaitons que les divers systèmes d’organisation du temps fassent une part valorisante au temps choisi en développant un loisir épanouissant qui comble une attente de sens, qui donne une raison de vivre. Ainsi compris, le temps de non travail rémunéré ne sera pas vide, mais plein. Il sera désiré pour lui-même, authentiquement choisi pour son action épanouissante sur chaque membre de l’humanité.
A la suite d’une morale de l’efficacité, du rendement, de la production nous en appelons à une morale de la contemplation, de la densité intérieure, de la plénitude grâce à l’absence de nouveaux produits obtenus en masse. L’homme se construit également dans et par son temps hors travail salarié.
Pour obtenir une telle valorisation du temps choisi, il me semble que l’on devrait davantage réfléchir sur le loisir. Il faudrait que des universitaires se penchent sur la question du temps de travail en partant de celle du temps de loisir. Généralement, c’est l’inverse qui est étudié. On ne cite les loisirs qu’en marge d’une réflexion sur le temps travaillé.