Bienheureux ceux qui croient sans voir

Publié le par Michel Durand

Aujourd’hui encore je reprends ma méditation sur Saint Paul.

conversion-of-saint-paul.jpgC’est comme si je n’arrivais pas à réaliser -ou à accepter- qu’un homme, entier dans ses engagements, puisse dans sa vie faire un virage à 180°. Un complet retournement.

La conversion n’est pas facile, car on voudrait bien, être autre tout en restant soi-même. On a peur de changer. On ne voudrait pas que nos amis et connaissances puissent dire : ce n’est plus le même.

Paul, d’ennemi des chrétiens devient ami. Fidèle jusqu’à la mort. Quel fut le moteur du changement ?

C’est la rencontre de Jésus ressuscité qui a bouleversé sa vie, son comportement militant, violent, d’anti à pro Jésus, non violent. Les membres de la petite communauté des disciples de celui que Dieu a ressuscité ont mis plusieurs jours à l’admettre. Tout cela on le voit dans les récits de la conversion et de l’appel de Paul, Saül avant sa conversion (Actes 9).

Il a bénéficié de la vision du ressuscité ! Le mieux est tout simplement de relire des témoignages. Il a vu. Il a cru.

« Comme il était en route et approchait de Damas, une lumière venant du ciel l'enveloppa soudain de sa clarté. Il tomba par terre, et il entendit une voix qui lui disait : « Saul, Saul, pourquoi me persécuter ? »

« Ananie … imposa les mains à Saul, en disant : “Saul, mon frère, celui qui m'a envoyé, c'est le Seigneur, c'est Jésus, celui qui s'est montré à toi sur le chemin que tu suivais pour venir ici. Ainsi, tu vas retrouver la vue, et tu seras rempli d'Esprit Saint”. »

Christ apparaît à Marie Madeleine, aux apôtres, à Thomas, à de nombreuses personnes et enfin à Paul.

Galates 1, 11 : « Je vous le déclare, frères : cet Évangile que je vous ai annoncé n’est pas simplement humain ; et d’ailleurs, ce n’est pas par un homme qu’il m’a été transmis ni enseigné, mais par une révélation de Jésus Christ. »


Je relie aussi Jean 20

Marie se retourna, et elle voit Jésus qui se tenait là, mais elle ne savait pas que c'était Jésus. Jésus lui dit : " Femme, pourquoi pleures-tu ? Qui cherches-tu ? " Le prenant pour le jardinier, elle lui dit : " Seigneur, si c'est toi qui l'as emporté, dis-moi où tu l'as mis, et je l'enlèverai. " Jésus lui dit : " Marie ! " Se retournant, elle lui dit en hébreu : " Rabbouni ! " - ce qui veut dire : " Maître ". Jésus lui dit : " Ne me touche pas, car je ne suis pas encore monté vers le Père. Mais va trouver mes frères et dis-leur : je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu. " Marie de Magdala vient annoncer aux disciples qu'elle a vu le Seigneur et qu'il lui a dit cela.

Pierre, Jean, Marie au tombeau. Ils virent et crurent ; ou crurent et virent.

Tout d'abord, on croit ce que l’on dit : le tombeau est vide.

Et je me tourne vers les commentaires de Saint Augustin.

Marcel Neusch écrit : « Pour Augustin, il ne s’agit pas encore de la foi en la Résurrection, mais d’une foi toute humaine en la parole de Marie (de Magdala) qui vient de leur apprendre qu’on a enlevé le corps du Seigneur. Jean partage l’erreur de Marie » (p.119).

Transfiguration_Raphael-copie-1.jpgRaphaël, La Transfiguration : Marie témoigne de la vision du Ressuscité avec le récit des Apôtres parlant de leur vision de la Transfiguration.


Mais le Seigneur ressuscité se montre. Et pourtant, Marie ne peut le toucher. Augustin pense qu’il ne sera possible de toucher le Christ ressuscité que quand aura bien été compris qu’il n’est plus seulement le Jésus connu jusqu’à maintenant.

Saint Augustin écrit : Ne me touche pas ; c’est-à-dire ne crois pas en moi selon l’opinion que tu as encore de moi (…) Tu me toucheras quand tu croiras que je suis Dieu, non inégal au Père ».

En effet, le Christ est par nature, fils du Père. Si nous devenons fils, quand nous le devenons, ce le sera par grâce dans la médiation du Fils.

Dans l’apparition aux disciples, je note l’attitude de Thomas. Avec lui « s’opère le passage de l’incrédulité à la foi, de l’humanité à la divinité du Christ » (M. Neusch). « Il voyait et touchait l’homme et il confessait le Dieu qu’il ne voyait ni ne touchait, mais d’après ce qu’il voyait et touchait, il croyait, ayant désormais écarté le doute » (St Augustin).

Ici, toucher, c’est voir en  un sens spirituel.

  « Mais en approchant sa main, il peut pleinement compléter sa foi. Quelle est en effet la plénitude de la foi ? De ne pas croire que le Christ est seulement homme, de ne pas croire non plus que le Christ est seulement Dieu, mais homme et Dieu » (p.124).

« Bienheureux ceux qui n’ont pas vu et qui ont cru »

Assurément, cette phrase s’adresse à nous qui n’avons pas vu de nos yeux, ni touché de nos mains le Ressuscité. Ce ne fut pas le cas de Paul. La vision celui qu’il persécute l’a mis à terre, terrassé ! Le Christ ressuscité lui est apparu. Une grâce toute personnelle qui le place au niveau des apôtres. Paul a vu le Seigneur et le Seigneur lui a parlé ; voilà le moteur de ses engagements futurs comme il s’en explique lui-même (voir son témoignage dans la lettre aux Galates : « Lorsque celui qui m’a mis à part depuis le sein de ma mère et m’a appelé par sa grâce a jugé bon de révéler en moi son Fils afin que je l’annonce parmi les non-juifs »).

Et nous, qu’avons-nous vu ?

Croire sans voir

L’époque des apparitions des apparitions du Seigneur n’est plus. Mais demeure le témoignage des Écritures. Comme Thomas qui n’était pas présent à la première apparition, nous n’avons que le témoignage des disciples. Ils ont vu (de même Paul). J’ai écrit : nous n’avons que. Il aurait fallu immédiatement écrire : nous avons désormais le témoignage de disciples qui nous donne accès au Ressuscité. Tous ceux et celles qui sont éloignés de l’Évènement moteur d’une nouvelle existence ont le récit de ceux et celles qui ont vu. Croire en leur parole. L’accès au ressuscité relève d’un croire sans voir.

« Heureux ceux qui n’ont pas vu et qui ont cru ! »

 

Croire sans voir

Le désir de voir des signes de Dieu (des apparitions) qui contraindraient au croire, qui transformeraient la foi en  une vision est une illusion.

Je reprends l’expression : « il vit et il crut ». Acte de foi dans le témoignage de ceux qui ont vu. Confiance à ce que l’on dit.

« Le Ressuscité est désormais accessible grâce à l’Écriture, un livre des signes qui témoigne en sa faveur, écrit Marcel Neusch (p.126).

Augustin :

« Nous n’avons plus quelque chose à toucher, mais nous avons quelque chose à lire… »

Soit : une invitation à partager la vie même du Ressuscité. Elle s’inscrit dans le temps. Des témoins nous en parlent. Ils nous font partager leur foi, leur vision de l’Apparition. Et, par la foi nous participons à la vie que nous offre le Ressuscité.

C’est en nous appuyant sur le vécu, par exemple de Paul, que nous pouvons, en toute sécurité nous engager dans la béatitude de la Révélation : « bienheureux ceux qui croient sans avoir vu ». Notre acte de foi ne s’appuie pas sur rien, mais sur le témoignage de ceux qui ont vu.

Il reste les Écritures et le vécu, la parole de celle et ceux qui au cours des siècles ont lu, prié, médité les Écritures afin d’en vivre. Écritures incarnées dans une existence de disciples du Christ ressuscité. Sacramentalité de l’Église.

Publié dans Bible

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