La référence à un transcendant divin, guide nos choix, libère de l’aliénation par la technique,
dessin extrait
d'un article assurément à lire
Partisans de la décroissance, ce n'est pas vous sur cette image, plus que jamais nous savons lire et approfondir les textes de Jacques Ellul.
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Je repense à ce penseur aujourd’hui grâce au Bloc-Notes de Jean-Claude Guillebaud dans l’Hebdomadaire La Vie.
Il nous rappelle ce que nous savons déjà : Jacques Ellul a prédit l’impasse de la technique dans un monde conçu pour vivre de fraternelle solidarité :
« la Technique est puissance, faite d’instruments de puissance et produit par conséquent des phénomènes et des structures de puissance, ce qui veut dire de domination. »
Jean-Pierre Jézéchel : « Jacques Ellul est un des penseurs français les plus considérables de la seconde moitié du vingtième siècle. C’est aussi l’un des plus méconnus ; méconnu, mais pas tout à fait inconnu. Cette affirmation quelque peu péremptoire repose sur le constat de son travail précurseur, original et visionnaire consacré au phénomène technique dans nos sociétés. On peut dire que, chaque jour, l’actualité économique, socio-politique ou climatique fournit des illustrations de la pertinence de ses analyses prémonitoires. Sans être complètement ignorées, ses analyses sont soit reprises de façon édulcorée dans le meilleur des cas (et sans identification de l’appellation d’origine), soit déformées. La marginalisation de l’œuvre d’Ellul a manifestement plusieurs causes, qu’il est toujours facile d’identifier après coup, mais qu’il aurait été plus difficile de prévoir à l’orée d’une carrière qui s’annonçait brillante. »
Ceci dit, voici le bloc-notes de J.C. Guillebaud, à retrouver sur La Vie
Une part croissante de l'activité financière planétaire est maintenant gérée par des machines
On célèbre le centième anniversaire de la naissance du grand sociologue et théologien protestant Jacques Ellul, qui fut mon maître. Je pense parfois à l'effarement qui aurait été le sien ces temps-ci, au sujet de la « nouveauté » qui survient du côté de la Bourse. Il s'agit de cette irruption technique, encore mal connue, y compris de certains spécialistes, qu'on appelle la « spéculation haute fréquence ».
L'expression bizarre désigne un procédé glaçant : les nouveaux outils technologiques présents dans les salles de marché permettent désormais aux opérateurs de spéculer sur des segments de temps de plus en plus courts. Entre l'ordre d'achat et l'ordre de vente il peut s'écouler moins d'une seconde, voire moins d'une microseconde. Comme les spéculations portent sur des quantités (de pétrole, de dollars, de cuivre, etc.) astronomiques, l'infime variation enregistrée suffit à générer des profits considérables. Des centaines de millions d'euros peuvent ainsi être « gagnés» le temps d'un clin d'œil !
Pareilles décisions spéculatives doivent être prises dans des délais si brefs qu'aucun cerveau humain, bien sûr, n'est capable de le faire. Seuls de puissants ordinateurs en sont capables. On a donc mis au point et programmé des ordinateurs géants pour spéculer à la place des opérateurs de chair et d'os. Une part croissante de l'activité financière planétaire est maintenant gérée par des machines.
Ni les décideurs politiques ni les économistes libéraux n'aiment évoquer cette folie financière spécifique. On craint que les citoyens ne prennent peur. De fait, nous en sommes arrivés au vieux cauchemar décrit jadis par Aldous Huxley ou George Orwell : la prise du pouvoir par des machines plus performantes, plus rapides, plus « intelligentes » que les humains. Toutes les analyses d'Ellul sur la domination de la technique se voient brusquement illustrées.
La chose est d'autant plus effarante que les marchés financiers ont largement pris le contrôle de l'économie mondiale et réduisent à peu de chose la volonté démocratique. Or, ces machines à spéculer échappant facilement au contrôle des humains qui les ont mis en place, elles produisent déjà des paniques boursières liées à l'emballement des ordinateurs. De façon subite, l'indice boursier s'effondre vertigineusement. On appelle cela un «minikrach». Il peut être très dangereux. Le 6 mai 2010, la Bourse de New York a décroché de 10 % en quelques minutes. Un gros ordinateur avait donné un ordre inapproprié. Un minikrach comparable s'est produit en août 2011 en France.
Un aspect de la question aurait scandalisé Jacques Ellul : le quasi-silence médiatique et politique qui accompagne cette histoire. Brisons·le.