Vie d’ici et d’ailleurs : Coulibaly

Publié le par Michel Durand

Je suis habitué à rencontrer des gens renfermés sur eux-mêmes, qui viennent d’ailleurs, et qui souhaitent parler, partager leurs expériences quotidiennes avec les uns et les autres. Pourtant, ils n’ont ni l’occasion, ni de lieu approprié pour le faire.

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M’est donc venue l’idée d’ouvrir cette « rubrique ». Elle parle non seulement de la vie des hommes et des femmes qui vivent loin de chez eux (elles), mais aussi de celle des personnes qui partagent leur vie.

Comme sujet, nous pourrons avoir : leur vie ailleurs, leur arrivée en France, leur quotidien, leur avenir… et les sujets d’actualité. Bien sûr, vous êtes libres d’apporter vos propres réflexions sur les différents sujets abordés dans la zone réservée aux commentaires. Il sera aussi possible de me rencontrer afin d’en parler. J’espère que vous en trouverez satisfaction au fil de l’évolution des sujets.

1-    Entretien de Marseille avec Coulibaly :

 Je commencerai cette rubrique par l’entretien que j’ai eu avec un jeune africain il y a trois ans à Marseille. Il s’était présenté ainsi :

- Je m’appelle Coulibaly, de nationalité Ivoirienne, j’ai 32 ans et je vis en France depuis deux ans.

Vous avez souhaité partager votre expérience avec moi. Qu’avez-vous envie de me dire ?

- Oui, j’ai quitté mon pays parce que je ne parvenais plus à supporter les conditions de vie particulièrement très difficiles. Au pays, nous sommes assez pauvres. En écoutant les médias, je me suis dis que ma chance de survie se trouvait ici.

Vous étiez tout seul à quitter votre pays ?

- Oh non ! nous étions au nombre de trois. 

Et quel chemin avez-vous pris ?

- J’ai traversé les pays : Ghana, Togo, Benin, Nigeria, Cameroun, République Centre-africaine, République démocratique du Congo (RDC), Tanzanie, Grande Comore, Anjouan et Mayotte. C’est à partir de là que je suis arrivé ici.

Soit environ 6000 km.  ce n’est pas le plus court. Par quels moyens avez-vous fait tout ce chemin ?

- J’ai utilisé au départ mon vélo et à un certain endroit je l’ai abandonné pour continuer le chemin en voiture. Dans certains pays, il fallait prendre la pirogue ou un bateau. Par exemple à partir de la Tanzanie jusqu’à Mayotte.

D’après vous, étiez-vous suffisamment préparé ?

- Psychologiquement, oui mais matériellement, non. J’avais peu de moyens financiers. C’est pour cela que j’avais pris mon vélo afin de ne pas gaspiller l’argent que j’avais.

Combien de temps avez-vous pris pour cette traversée ?

- J’ai fait un petit peu plus d’un mois. J’étais obligé de travailler dans certains pays pour avoir l’argent du transport.

Avez-vous rencontré d’autres difficultés ?

- Alors, oui. Beaucoup.

Ne vous est-il pas venu à l’esprit l’idée de rebrousser chemin ?

- Si, mais j’étais déterminé à continuer ma route.

Je reviens sur ma surprise face au choix de cet itinéraire. Pourquoi avoir choisi ce chemin ?

- Le chemin par le nord à partir de la Côte d’Ivoire est bien sûr plus court, mais très dangereux et l’accès aux frontières de l’Europe demeure très difficile.

Êtes-vous arrivé où vous souhaitiez ?

- Oui. Avec cet itinéraire, je suis arrivé là où je souhaitais.

Mais, parlez-moi de vous aujourd’hui : Est- ce que vous gagnez bien, disons, correctement votre vie ?

- Oh non, ma situation financière est presque nulle. Je n’ai plus de l’Europe, les mêmes pensées que j’avais lorsque je vivais dans mon pays. Je suis persuadé maintenant que je ne pourrai pas concrétiser mes rêves, vu la vie que je mène ici.

Regrettez-vous alors d’avoir fait ce chemin ?

- Non. Il est préférable de souffrir en France que de souffrir au pays.

 

à suivre

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