La responsabilité de l’accueil et de l’intégration des demandeurs d’asile doit être partagée proportionnellement entre les États membres

Publié le par Michel Durand

La responsabilité de l’accueil et de l’intégration des demandeurs d’asile doit être partagée proportionnellement entre les États membres
Il n’y a pas accueil quand on place dans un centre de rétention celui qui n’a pas commis de délit en survivant hors d’un pays qui ne lui voulait pas que du bien.

Nous parlons des cercles de silence en France tout en sachant que la situation n’est pas exclusivement française. L’ensemble de l’Europe est concerné. Il importe de le rappeler car le 25 mai nous voterons, ou nous nous abstiendrons de voter en espérant que cela soit signifiant. Jacques Ellul ne voulait plus participer aux élections parce que les élus ne font que voter des textes préparés par des commissions d’experts sans que soit donné la possibilité d’interroger les compétences de ces experts.

Le problème de la démocratie est aujourd’hui de taille. Quoi qu’il en soit nous sommes invités à voter. Quelle place dans ce vote tient l’étranger ? Savons-nous ce que vivent celles et ceux qui se voient dans l’obligation de quitter leur terre natale ? Je pense à une famille arménienne ne pouvant que quitter Moscou devant les pressions financières et les menaces de mise à mort par des groupes mafieux. Je me rappelle ce qu’écrit AMNESTY INTERNATIONAL à propos des érythréens : « La route vers l'Europe est redevenue la principale. Elle n'est pas moins semée d'embûches. Depuis le Soudan, il faut d'abord traverser le Sahara. Outre le risque de mourir de soif ou d'un accident sur le chemin, les migrants peuvent ensuite être revendus en Libye à un autre groupe de trafiquants, être battus, soumis à des travaux forcés divers. Les femmes sont fréquemment violées. Sur place, les érythréens sont aussi placés dans des centres de détention où ils sont maltraités. S'ils paient, ils peuvent être juste libérés ou, pour 4 500 $, amenés en bord de mer avec une place sur un bateau.

Reste à passer la Méditerranée. Plus de 300 migrants africains, érythréens pour la plupart, sont morts noyés au large de l'île de Lampedusa le 3 octobre 2013. Ce genre d'événement tragique n'est malheureusement pas nouveau. En dix mois, de janvier à octobre 2013, plus de 30 000 migrants atteignent le centre d'accueil de l'île mais 3 100 meurent par noyade au cours de la traversée ».

Robert Divoux prêtre du Prado en retraite envoie ce courriel :

« Le 25 mai nous allons pouvoir voter pour l’EUROPE : Ils prétendent parler au nom du peuple, dont ils épousent habilement les attentes. À chaque problème, ils offrent invariablement les mêmes réponses : haro sur l'immigration, l'Europe et les élites.

Marine Le Pen en France, Geert Wilders aux Pays-Bas, Viktor Orbán en Hongrie... : à grand renfort de mensonges, de formules choc et de rhétorique simpliste et biaisée, les leaders de ces mouvements captent l'adhésion de citoyens toujours plus nombreux.

À l'échelle européenne, certains d'entre eux choisissent de s'allier pour conquérir le Parlement, comme la présidente du Front National et le chef de file de l'extrême droite néerlandaise…

Voici un contrefeu : le texte de la commission des Épiscopats de la Communauté européenne. Une petite pierre pour la construction d’une Europe de la Solidarité ».

COMECE : jeudi 20 mars 2014 :

« Du 22 au 25 mai 2014, nous serons appelés à élire les députés qui siègeront au Parlement européen. Le résultat de ces élections déterminera la nature de la législature pour l’UE dans les cinq prochaines années et aura des implications majeures pour ceux qui dirigent l’UE.

Il est essentiel que les citoyens de l’UE participent au processus démocratique en votant le jour des élections. Une forte participation renforcera d’autant la nouvelle législature.

La perspective de ces élections offre la possibilité à l’ensemble de la société européenne de débattre de questions socio-économiques centrales qui marqueront l’Union européenne dans les années qui viennent.

En tant qu’évêques de la COMECE, nous estimons qu’il est de notre devoir de proposer des orientations à l’électeur/électrice européen(ne) pour qu’il/elle forme sa conscience. Pour ce faire, nous souhaitons attirer leur attention sur des questions importantes en les examinant à la lumière de la pensée sociale de l’Église.

Bien que nous nous adressions en première instance aux citoyens de confession catholique, nous espérons que notre conseil/avis recevra également un accueil favorable auprès des hommes et femmes de bonne volonté qui se soucient du succès du projet européen. Nous espérons que notre voix sera également entendue par les candidats aux élections au Parlement européen.

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Pour commencer, nous souhaiterions attirer l’attention sur quelques considérations d’ordre général :

1. Voter est un droit et un devoir pour chaque citoyen de l’UE. Plusieurs millions de jeunes citoyens voteront pour la première fois. Parmi eux, certains sont encore en formation, d’autres sont déjà sur le marché du travail, et beaucoup, hélas, sont sans emploi. Nous encourageons nos jeunes à faire entendre leur voix en s’impliquant dans le débat politique et surtout en votant.

2. Il est important que les candidats et les députés qui se représentent pour un mandat au Parlement européen soient conscients des dommages collatéraux causés par la crise économique et bancaire qui a débuté en 2008. Le Pape François a attiré l’attention de l’opinion publique sur la détresse de ceux qui étaient déjà pauvres et vulnérables - les jeunes et les handicapés - sans oublier ceux qui ont été jetés dans la pauvreté par la crise actuelle. Le nombre de « nouveaux pauvres » est en train de croître de manière alarmante.

3. Le message chrétien est un message d’espoir. Nous croyons que le projet européen est inspiré par une vision noble de l’homme. Chaque citoyen, chaque communauté et même chaque État-nation doit être capable de mettre de côté ses intérêts particuliers en vue de la poursuite du Bien commun. L’exhortation apostolique Ecclesia in Europa publiée par le Pape Jean Paul II en 2003 était un message d’espoir et c’est avec la même foi solide dans un avenir meilleur que l’Église aborde les défis européens actuels.

4. La Tempérance est l’une des vertus naturelles au cœur de la spiritualité chrétienne. Une culture de retenue doit guider l’Économie sociale de marché et les politiques de l’environnement. Nous devons apprendre à vivre avec moins et, par là même, veiller à ce que les personnes qui vivent dans la vraie pauvreté obtiennent une meilleure part.

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Nous aimerions également attirer l’attention de nos concitoyens sur certains domaines spécifiques des politiques de l’UE :

1. Il faut veiller à ce que les démarches de plus en plus nombreuses visant à l’unité au sein de l’UE ne sacrifient pas le principe de subsidiarité (1), qui est le pilier de cette famille d’États nations unique au monde que représente l’UE ; ni ne compromettent les traditions bien établies qui prévalent dans tant d’États membres.

2. Un autre pilier de l’Union européenne, qui est également un principe de la doctrine sociale de l’Église, est celui de la Solidarité. Ce principe devrait guider les politiques menées à tous les niveaux de l’UE, entre nations, régions et groupes de population. Il nous faut construire un monde nouveau, qui soit centré sur la solidarité.

3. Il est fondamental de rappeler qu’à la base de toute politique sociale et économique se trouve une vision de l’homme enracinée dans un profond respect de la dignité humaine. La vie humaine doit être protégée de la conception à la mort naturelle. La famille, qui est la composante de base de la société, doit bénéficier de la même protection.

4. L’Europe est un continent en mouvement et la migration – qu’elle soit interne ou venant de l’extérieur de l’Europe – a un impact sur la vie des personnes et de la société. L’UE a une frontière extérieure commune. La responsabilité de l’accueil et de l’intégration des migrants et demandeurs d’asile doit être partagée proportionnellement entre les États membres. Il est crucial de traiter avec humanité les migrants à leur arrivée et que leurs droits humains soient scrupuleusement respectés, et que par conséquent, tous, y compris les Églises, s’efforcent de garantir une intégration réussie dans les sociétés d’accueil sur le territoire de l’Union.

5. Nous sommes les gardiens de la création et nous devons accroître notre détermination à respecter et atteindre les objectifs d’émissions de CO2, à promouvoir une conception globale des changements climatiques, à adopter une approche plus écologique et nous devons exiger que la durabilité devienne un élément fondamental de toute politique de croissance ou de développement.

6. La liberté religieuse est un élément fondamental d’une société tolérante et ouverte. Cette liberté comprend la liberté de manifester sa foi en public. Nous nous réjouissons de l’adoption de Lignes directrices de l'Union sur la promotion et la protection de la liberté de religion ou de conviction et nous espérons que le Parlement européen qui sortira des urnes intensifiera ses efforts en la matière.

7. Nous soutenons toutes les mesures qui peuvent être prises pour protéger un jour de repos commun hebdomadaire, qui est le dimanche.

8. Dans les cinq prochaines années, le changement démographique aura un impact encore plus profond sur l’UE. Nous plaidons en faveur de nos concitoyens âgés, afin qu’ils aient accès au niveau et à la qualité de soins auxquels ils ont droit, et nous plaidons aussi pour la mise en place de politiques qui créent de nouvelles opportunités pour la jeune génération.

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L’Union européenne est à un tournant. La crise économique déclenchée par la faillite bancaire de 2008 et le poids de la dette publique, a tendu les relations entre les États membres. Elle a mis à rude épreuve le principe fondateur de Solidarité au sein de l’Union. Elle a aussi entrainé dans son sillage une vague de pauvreté qui a frappé un grand nombre de nos concitoyens et a brisé les espoirs de beaucoup de jeunes.

Nous, les évêques catholiques, plaidons pour que le projet européen ne soit pas mis en danger ni abandonné sous la pression des contraintes actuelles. Il est impératif que nous tous – hommes et femmes politiques, candidats, parties prenantes – nous contribuions à forger de façon constructive le futur de l’Europe. Nous avons trop à perdre si le projet européen venait à se disloquer.

Enfin, il est essentiel que nous tous, qui sommes des citoyens européens, nous nous rendions aux urnes le 22-25 mai prochains. Nous, les évêques, nous vous enjoignons à voter suivant votre conscience préalablement bien formée.

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La COMECE est la Commission des Épiscopats de la Communauté européenne ; elle fut mise en place en mars 1980. Cette Commission est composée d'évêques délégués par les 27 conférences épiscopales (1) des États membres de l'Union européenne ; elle possède un Secrétariat permanent à Bruxelles, composé de 11 conseillers.

Les objectifs de la COMECE sont :

• Accompagner et analyser le processus politique de l'Union européenne.

• Informer et conscientiser l'Église sur les développements de la législation et des politiques européennes.

• Maintenir un dialogue régulier avec les Institutions de l'Union (Commission européenne, Conseil de l'Union européenne et Parlement européen) à travers la rencontre annuelle des principaux responsables religieux, des Séminaires de Dialogue et de multiples conférences et en prenant part aux consultations organisées par la Commission européenne.

• Encourager la réflexion, basée sur l'enseignement social de l'Église, sur les défis posés par la construction d'une Europe unie.

 

(1) Il y a 27 évêques délégués par les Conférences Épiscopales de l'UE : Allemagne, Angleterre & Pays de Galles, Autriche, Belgique, Bulgarie, Écosse, Espagne, France, Grèce, Hongrie, Irlande, Italie, Lettonie, Lituanie, Estonie, Malte, Pays Bas, Pologne, Portugal, République Tchèque, Roumanie, Scandinavie, Slovaquie, Slovénie, Chypre, Croatie et l'Archidiocèse du Luxembourg. La Conférence épiscopale de Suisse a un statut d’observateur.

 

Publié dans Eglise, Politique

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