Le Royaume des cieux est comme une maison paroissiale habitée par des chrétiens non intransigeants ; maison ouverte sur la place

Publié le par Michel Durand

Le Royaume des cieux est comme une maison paroissiale habitée par des chrétiens non intransigeants ; maison ouverte sur la place

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Après la faute tu accordes la conversion (Sg 12, 13.16-19)
Psaume 85 (86), 5-6, 9ab.10, 15-16ab)
L’Esprit lui-même intercède par des gémissements inexprimables (Rm 8, 26-27)
Laissez-les pousser ensemble jusqu’à la moisson (Mt 13, 24-43)

audio de l'homélie en bas de page

Hélas, bien que vivant en ce quartier depuis plus d’un an, je ne connais pas encore ceux et celles qui y vivent ; tout est si vaste (normal pour une grande ville) que je continue à mal saisir ce qui se vit ici. Et les paraboles que nous venons d’entendre relèvent de modes de vie combien différents de notre quotidien urbain ! Comment rejoindre, aujourd’hui cette Bonne Nouvelle ?

Vous l’avez deviné ; dans la proclamation de l’Évangile de ce dimanche, il y a l’objet de trois ou quatre homélies. Néanmoins, je m’efforce de ne pas dépasser le temps imparti par la liturgie catholique. Et, comme dimanche dernier, sans oublier l’appel exigeant à mettre en pratique la Parole entendue, la concrétiser dans notre quotidien, je me permets, surtout par manque de connaissance du quartier, d’en rester à un commentaire. 

La parabole de l’ivraie dans le champ de blé, longuement développée et expliquée, invite à réfléchir sur la vie de l’Église. Certains baptisés, voudraient que toute la vie soit parfaitement conforme à la morale chrétienne. Ils sont intransigeants pour autrui à défaut, parfois, de l’être pour eux-mêmes. Mais l’Église n’est pas composée uniquement de « purs ». Saint Augustin en parle en disant qu’elle est toute de mélange. Le bon et le mauvais se côtoient. 

Afin de me faire comprendre dans mon désir de parler de la communauté insérée dans le monde, j’ose inventer une nouvelle parabole. Une parabole qui est une antiparabole de l’ivraie me permettant de prolonger l’homélie de dimanche dernier. 

Rappelons-le, on appelle parabole une histoire racontée pour illustrer un enseignement. Le mot grec « parabolé » indique qu’il y a l’idée de comparaison. En Orient, au temps de Jésus, cette façon de s’exprimer pour développer une pensée est fréquente. On multiplie les images :
_ « Le royaume des cieux est comparable à un homme qui a semé du bon grain dans son champ ». _ « Le royaume des cieux est comparable à une graine de moutarde »
Après la comparaison, peut venir l’explication :
_ « Explique-nous clairement la parabole de l’ivraie dans les champs »

Dans le genre de la parabole, deux éléments sont essentiels : 
  1°) le recours à la comparaison qui donne l’avantage de demeurer dans le concret, dans le quotidien, l’actualité. 
  2°) l’aspect énigmatique de l’expression. On souligne un mystère propre à exciter la curiosité, à inciter la recherche, à souligner l’importance, voire la transcendance de l’enseignement livré.

Et voilà ma nouvelle parabole

Le Royaume des cieux est comme une maison paroissiale habitée par des chrétiens non intransigeants ; maison largement ouverte sur la place publique. Chacun entre et sort comme il le désire. À chaque passage, il s’imprègne d’une si bonne odeur que les gens de l’entourage en sont émerveillés. D’où vient cette sublime senteur gratuitement offerte ? Allons voir. Entrons. Laissons-nous progressivement pénétrer, et ressortons joyeux de sentir si bon pour soi et pour les autres.

Le mystère du Royaume de Dieu et de la personne de Jésus est si neuf, si étrange, qu’il ne peut que se manifester petit à petit en respectant les réceptivités diverses des auditeurs. Il est cette odeur qui se diffuse naturellement, progressivement.

C’est à cause du respect des diverses possibilités de comprendre que Jésus demande que l’on ne dise pas trop vite ce qu’il est vraiment : l’ambassadeur de Dieu (Messie). 

Ce genre, tout en donnant une première idée sur Dieu, invite à réfléchir. L’auditeur devenu actif comprend un peu ; mais, il veut en savoir plus. Dans la parabole, il y a du suspens. Un voile cache en partie le message annoncé. On voit un peu. On voudrait voir plus. On pressent ce qu’il dit à mi-mot, alors on désire tout connaître. C’est le désir suscité en nous par l’énoncé sous forme de parabole qui donne le courage d’aborder l’explication complète. Émoustillés par la parabole, nous devenons motivés pour entendre en langage clair et précis, ce que Jésus a voulu dire. Nous devenons prêts à accepter ce que l’oreille n’a jamais entendu, ce qui est inouï :

« les justes resplendiront comme le soleil dans le Royaume de leur Père ».

Tout n’est pas encore dit. Mais quand même, nous comprenons un peu. Celui qui est juste selon Dieu vit de la vie de Dieu. Il lui est semblable. Si Dieu est comme un soleil, le juste resplendit comme le soleil. Si Dieu dégage une bonne odeur, le juste sent bon et la maison paroissiale, cadre de cette nouvelle parabole, est source de bonne odeur. Tout le mystère de la grâce divine se trouve compris dans ces images et ces mots. L’explication n’est pas entièrement satisfaisante. Mais, on approche de la vérité. Seul arrive à tout comprendre celui qui est bien disposé à cela. Celui qui met sa confiance en Dieu.

« Celui qui a des oreilles, qu’il entende ».

Il s’agit, bien sûr, plus des oreilles du cœur, que des oreilles du corps. Les paraboles sont un appel à l’attention, une invitation. Elles sollicitent celui qui écoute pour qu’il fasse l’effort nécessaire afin que disparaisse le voile qui cache la profondeur du mystère. Autrement dit, l’auditeur de la parabole doit avoir le courage de solliciter une explication et de l’entendre jusqu’au bout. La parabole doit nécessairement être expliquée. Elle est la porte d’un enseignement approfondi sur le mystère de Dieu.

« Explique-nous clairement la parabole de l’ivraie dans le champ ».

Il me semble important, et je reprends l’exemple de la maison paroissiale, que celui qui rencontre un baptisé conscient de son baptême doit être intrigué, séduit, curieux de sa raison de vivre. La vie des chrétiens pose d’agréables questions. Ce n’est qu’en répondant à ces justes et honnêtes curiosités que nous développerons d’une façon durable notre propre approche du mystère divin. Toute notre vie est une parabole.

 

Publié dans Eglise, évangile

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