Il nous arrive de vouloir être généreux, seulement généreux sans vouloir considérer la personne rencontrée comme un autre moi-même, un frère
Encore une fois, je trouve que les textes de Jean-Marie ont bien leur place dans ces pages. J’ai parlé du prêtre ne pouvant être limité à la fonction de « curé ». De même, l’humain, situé dans la lignée de Jésus-Christ ne peut regarder la personne rencontrée qu’en se donnant totalement, avec toute son humanité. Il souhaite le bien de tous les hommes.
Pour la moitié d'un homme
/image%2F0976731%2F20210212%2Fob_17a27f_ob-173dcb-17903505-1487847884582324-82.jpg)
C'était il y a 20 ans, peut-être un peu plus, encore…
Je me trouvais à prendre le soleil, à Grenoble, assis sur un banc, dans le parc Paul Mistral.
À un moment donné, un homme d'à peu près mon âge – la trentaine, alors – vint s’installer sur un autre banc, à deux pas de moi. Il sortit une petite flûte en bois, et puis il se mit à jouer, à jouer longuement… je l'écoutais.
Étant sur le point de partir, je lui adressais un petit remerciement par rapport au fait qu'il nous avait partagé de la musique, de sa musique… et lui , aussitôt, de me répondre :
- « Est-ce que vous avez vraiment – écouté – ce que j'ai joué ?... »
Et en fait, non, je n'avais pas écouté « vraiment », véritablement écouté, ce que cet homme nous avait partagé.
Cet homme était mal habillé, certainement pauvre, peut-être sans domicile, et j'avais juste voulu être « généreux » vis-à-vis de lui… seulement « généreux", sans bien même et finalement vouloir le considérer comme un autre moi-même ; comme un frère.
Oui : je n'avais, en cette occasion, laissé vivre que la moitié de mon humanité… la moitié d'un homme, j'avais été.
Jean-Marie Delthil. Bonny-sur-Loire, le 11 mars 2020