La Trinité dans l’art

Publié le par Michel Durand

  • Cette page a été rédigée à l'aide de notes trouvées dans les archives de mon ordinateur ; derrière ces notes il y a certainement un livre d'iconographie chrétienne. Lequel ? François Boesplug, La trinité dans l'art d'Occident ?... Sans accès à la bibliothèque de Conflences/Résurgence(s)  je ne peux contrôler.

 

« Peut-on mettre l'Amour en images ? » demande Saint Augustin. C'est à ce défi qu'ont été confrontés les artistes et leurs commanditaires lorsqu'ils ont voulu représenter la Trinité.

 

Les trois personnes de la Trinité ont interrogé la population au cours de l'Histoire.

Le visage du Fils à partir du IIe siècle a les traits des divinités païennes, type hellénistique : jeune homme imberbe, cheveux courts et bouclés, vêtu de toge ou de tunique.

Jésus enseignant, catacombe Sainte-Domitilla, Rome

 

En Orient, nous trouvons un personnage de type syro-palestinien, majestueux, barbu, cheveux longs.

Jésus prophète, catacombes de Saint-Marcellin et Saint-Pierre, Rome.

 

Jusqu'au XIe siècle, le Christ hellénistique et le Christ sémitique coexistent. C’est à partir de cette époque que va se fixer la physionomie définitive : visage méditerranéen, traits aryens pour le distinguer du type juif de ses persécuteurs, barbu, chevelure partagée par une raie centrale retombant sur les épaules ; yeux noirs. Expression humaine.

 

Christ pantocrator, Cefalú

 

 

Christ pantocrator, basilique Sainte-Sophie

 

 

Christ souffrant.

Mandylion ou image d’Édesse du Christ souffrant (sainte face).

 

Le visage est imprégné de sueur. Barbe et cheveux mouillés.

 

Pour l’Esprit-Saint, parent pauvre de la Trinité, les images les plus développées sont la colombe (Mc 1,10 ; Jn 1,32-34)

 

Saint-Pierre de Rome, Vatican

 

 

Le feu (Ac 2, 3) scène de la Pentecôte.

 

 

Baptême du Christ, Ravenne, Vie s.

 

 

 

Mais, pour l’image du Père, un véritable problème théologique va être soulevé. Quelle figuration du Père que personne, à part le Fils, n' a jamais vu ?

Les Pères grecs étaient particulièrement hostiles aux images du Père. Saint Augustin nous dit : « Gardons-nous de concevoir Dieu comme un vieillard d'aspect vénérable. Voulez-vous voir Dieu ? Arrêtez vous à cette pensée : Dieu est amour. Quelle figure à l'Amour ? Personne ne peut le dire ! »

Cette vision du vieillard vénérable réapparaîtra dans l'art du XIVe siècle.

 

Église Saint-Vincent, chœur, retable, Dieu le Père, Moussy-le-Neuf (77),

 

 

Représentation de Dieu le Père offrant le trône de la main droite au Christ, Pieter de Grebber, 1654.

 

 

La seule représentation licite de Dieu fut donc pendant longtemps le Christ : Jésus n'a-t-il pas dit « Qui m' a vu a vu le Père » ( Jean 14, 8-12).

Les images de Dieu-Trinité furent très rares avant le IXe siècle. Deux épisodes bibliques pour lesquels on donna une interprétation trinitaire : Le Baptême du Christ et l'Hospitalité d' Abraham. Et rares jusqu'au XIIe siècle.

Baptême du Christ, mosaïque du VIe s, Ravenne

 

 

Hospitalité d'Abraham, mosaïques de Sainte-Marie Majeure, Rome, Ve siècle

 

 

 

Dieu est représenté par une main qui descend du ciel.

Hospitalité d'Abraham, mosaïques de Saint-Vital, Ravenne, VIe siècle

 

 

Offrande d’Abel et de Melchisedek, mosaïque, Ravenne VIe s

 

Les images de Dieu-Trinité furent très rares avant le IXe siècle. Nous avons vu les deux épisodes bibliques pour lesquels on donna une interprétation trinitaires : Le Baptême du Christ et l'Hospitalité d' Abraham. Elles sont rares jusqu'au XIIe siècle.

 

Les difficultés pour les artistes :

Doit-on privilégier l'unité au détriment de la Trinité ou inversement. Les chrétiens ont le sentiment d'être surpassés par le mystère devant lequel saint Ambroise dira : « L'intelligence est déroutée, la voix se tait… »

Pour les Pères grecs, Dieu en lui-même est essentiellement invisible.

Côté occident : Le Pape Grégoire II :

« Pourquoi ne représentons-nous pas le Père du Seigneur Jésus ? Parce que nous ne savons pas ce qu'il est… Si nous l' avions vu et connu, nous aurions essayé de le décrire et de le représenter par l'art. »

La règle du christomorphisme est en vigueur depuis la fin du IVe siècle : Dieu peut-être figuré uniquement en raison du Christ et sous les traits du Christ.

Irénée de Lyon nous dit : « Le visible du Père, c'est le Fils, l'invisible du Fils, c'est le Père ». Évocation de la réponse de Jésus à l' apôtre Philippe (Jn 14, 9)

La Trinité va être évoquée par des motifs abstraits.

 

 

Des triangles ont été tracés ou sculptés à partir du IVe siècle sur les murs des catacombes, des stèles funéraires et divers autres objets avec en leur centre, un chrisme ou un cercle solaire.

Zénon de Vérone (mort en 371ou 372) fit distribuer des pièces à triple empreinte pour signifier aux baptisés qu'ils avaient reçus le sceau au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit.

 

En Orient, le triangle décora de nombreuses épitaphes. Une voix plaida en sa faveur (saint Saba 439-532 ? )

En Occident, saint Augustin s'y opposa, dénonçant un symbole du manichéisme.

En Russie, l'icône de la Trinité, illustration de l'Hospitalité d'Abraham, peinte par le moine André Roublev, au XVe siècle est une œuvre marquante.

 

 

Image qui ne fut pas retenue : l’égalité des trois personnes

 

Trinité triandrique

 

Heures à l'usage de Rome, Angers, v. 1490.

 

 

 

La Sainte Trinité, miniature des Grandes Heures d'Anne de Bretagne illustrée par Jean Bourdichon.

 

 

La question sera débattue lors du grand concile de Moscou en 1667 :

« Représente le Dieu Sabaoth (c'est-à-dire le Père) sur les icônes avec une barbe grise avec son Fils sur les genoux, une colombe entre eux, est au plus haut point absurde et invraisemblable puisque personne n'a vu Dieu le Père…

 

 

V. Vasnetsov, Dieu le Père, Trinité (1848-1926)

 

 

L' Église orthodoxe a interdit la représentation de la Sainte-Trinité sous la forme de la paternité.

 

La Passion du Christ

En Occident, des XIIe au XIVe siècle, on avait associé le Père à la Passion du Fils.

 

Masaccio, Sainte Trinité, 1424-1427

 

 

Le Père assis sur un trône soutient des deux mains la croix sur laquelle son Fils est cloué. De l'un à l'autre vole le Saint-Esprit sous l' aspect d'une colombe. Le but n'est pas d'émouvoir, mais seulement d'exprimer l'idée théologique que le fils est mort sur la croix avec le consentement du Père et de l'Esprit-Saint.

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