Jésus annonce le message divin et, accomplissant ce qu’il dit, il rend la vue à un aveugle. Il donne la lumière à qui était dans l’obscurité
La guérison de l’aveugle-né, basilique Sant’Angelo in Formis, Capoue, vers 1075-1100 - Voir Jean 9,1-47
Jésus forme ses disciples et guérit un aveugle
Source de l'image. Ici il s'agit de l'aveugle de naissance : Jean 9, 1ss
Suite aux précédentes lectures d'Évangile. Voir, par exemple celle-ci.
Assurément Jésus trouve que ses contemporains sont vraiment lourds, incapables de comprendre le sens de la vie selon Dieu le Créateur. Cela le rend impatient au point de pousser un profond soupir suite à une demande de pharisiens et de décider de partir ailleurs avec ses disciples.
8,11-13
« Les Pharisiens vinrent et se mirent à discuter avec Jésus ; pour lui tendre un piège, ils lui demandent un signe qui vienne du ciel. Poussant un profond soupir, Jésus dit : “Pourquoi cette génération demande-t-elle un signe ? En vérité, je vous le déclare, il ne sera pas donné de signe à cette génération” ».
Le départ dû être tellement précipité que les disciples oublient de prendre du pain. Ils n’en avaient qu’un seul. Leur unique souci tourne autour de cette nourriture qui manque et ils interprètent toutes les paroles de Jésus comme étant destinées à ce problème. Alors, après les pharisiens, ce sont les disciples, les apôtres du Maître qui se montrent comme frappés d’aveuglement. Certes Jésus ne les attaque pas avec la même vigueur qu’il le fait pour les pharisiens ; il les interrogent seulement : « ne comprenez-vous pas encore ? » Une question lourde de lassitude. Nouveau soupir. J’image que Jésus doit se demander pourquoi ses amis se montrent aussi lourds, autant fermés à la compréhension de sa venue du Père Dieu Créateur.
8,14-21
« Les disciples avaient oublié de prendre des pains et n'en avaient qu'un seul avec eux dans la barque. Jésus leur faisait cette recommandation : “Attention ! Prenez garde au levain des Pharisiens et à celui d’Hérode”. Ils se mirent à discuter entre eux parce qu'ils n'avaient pas de pains. Jésus s'en aperçoit et leur dit : “Pourquoi discutez-vous parce que vous n'avez pas de pains ? Vous ne saisissez pas encore et vous ne comprenez pas ? Avez-vous le cœur endurci ? Vous avez des yeux : ne voyez-vous pas ? Vous avez des oreilles : n'entendez-vous pas ? Ne vous rappelez-vous pas, quand j'ai rompu les cinq pains pour les cinq mille hommes, combien de paniers pleins de morceaux vous avez emportés” ? Ils lui disent : “Douze”. “Et quand j'ai rompu les sept pains pour les quatre mille hommes, combien de corbeilles pleines de morceaux avez-vous emportées” ? Ils disent : “Sept”. Et il leur disait : “Ne comprenez-vous pas encore” ? ».
Oui, les disciples sont comme ceux qui « sont du dehors », des étrangers qui ne peuvent comprendre ce qui se fait dans la famille, dans la communauté, le groupe des intimes. Voir page 6 :
4,11-12
« À vous, le mystère du Règne de Dieu est donné, mais pour ceux du dehors tout devient énigme pour que tout en regardant, ils ne voient pas et que tout en entendant, ils ne comprennent pas de peur qu'ils ne se convertissent et qu'il leur soit pardonné ».
Pour les Juifs contemporains de Jésus, le levain était considéré comme source d’impureté et de corruption comme le suggère la lettre de Paul aux Galates : « cette influence-là ne vient pas de Celui qui vous appelle. Un peu de levain suffit pour que toute la pâte fermente ». (Ga 5, 8-9)
J’avoue avoir du mal à comprendre ce que pensaient les rabbins de Jérusalem, car le levain fait le pain et le pain est bon à manger. La note de la TOB indique que pour les rabbins, le levain symbolisait les mauvaises inclinaisons de l’homme. Dans le contexte de l’évangile de Marc, il indique donc les mauvaises dispositions à l’égard de Jésus aussi bien des Pharisiens que d’Hérode. « Les disciples risquent de partager ces mauvaises dispositions s’ils restent rebelles aux efforts de Jésus pour leur manifester le sens authentique de la mission à laquelle il veut les associer ». S’ils ne comprennent même pas les paraboles, s’ils ne saisissent pas ce qu’elles suggèrent, comment vont-ils comprendre tout ce qui est à annoncer ?
7,18
« Vous aussi, êtes-vous donc sans intelligence ? »
8,17
« Avez-vous le cœur endurci ? Vous avez des yeux : ne voyez-vous pas ? Vous avez des oreilles : n'entendez-vous pas ? »
Cela fait penser au prophète Jérémie :
Jr 5,21
« Écoutez donc ceci, peuple stupide et sans intelligence ! – Ils ont des yeux et ne voient pas, des oreilles et n’entendent pas ! »
Ou à Ezéchiel :
Ez 12,2
« Fils d’homme, tu habites au milieu d’une engeance de rebelles ; ils ont des yeux pour voir, et ne voient pas ; des oreilles pour entendre, et n’entendent pas, car c’est une engeance de rebelles ».
Les disciples ne sont pas loin de penser comme les rabbins, les pharisiens qui sont enfermés dans une conception légaliste de Dieu, Père - Créateur de tout. Il y a de quoi désespérer.
« Et il leur disait : “Ne comprenez-vous pas encore” ? »
Effectivement il reste à comprendre que Jésus ne livre pas seulement des paroles. Il n’a pas qu’un discours à prononcer, des choses à dire. Il doit également montrer que ce qu’il dit se réalise. Ce qu’il dit, il le fait personnellement ; toute sa personne est en jeu. Marc attire l’attention avec ces paroles de Jésus sur tout ce qui se révèle de la mission et de la personne du Fils de Dieu. Telle est l’intention première de l’évangéliste indiquée au premier verset se son évangile :
1,1
« Évangile de Jésus Christ Fils de Dieu ».
Il annonce ce message divin et accomplissant ce qu’il dit, il rend la vue à un aveugle. Il donne la lumière à qui était dans l’obscurité tout en recommandant à celui qui désormais voit tout distinctement de rester discret. Du reste Jésus a agi très discrètement en conduisant l’aveugle hors du village, Bethsaïda au nord de la mer de Galilée.
8,22-26
« Ils arrivent à Bethsaïda; on lui amène un aveugle et on le supplie de le toucher. Prenant l'aveugle par la main, il le conduisit hors du village. Il mit de la salive sur ses yeux, lui imposa les mains et il lui demandait : “Vois-tu quelque chose” ? Ayant ouvert les yeux, il disait : “J’aperçois les gens, je les vois comme des arbres, mais ils marchent”. Puis, Jésus lui posa de nouveau les mains sur les yeux et l'homme vit clair ; il était guéri et voyait tout distinctement. Jésus le renvoya chez lui en disant : “N’entre même pas dans le village” ».
Avec cette guérison « difficile, progressive » de l’aveugle, Marc montre le pouvoir illuminateur de Jésus. Cela va de pair, du reste, avec ses efforts pour ouvrir les yeux de ses disciples qui doivent reconnaitre en lui le Fils de Dieu.