Regarder le récit d’une tranche de vie donne à voir la main que Dieu pose sur nous afin de tracer l’unique sillon orienté vers son domaine

Publié le par Michel Durand

Regarder le récit d’une tranche de vie donne à voir la main que Dieu pose sur nous afin de tracer l’unique sillon orienté vers son domaine
Regarder le récit d’une tranche de vie donne à voir la main que Dieu pose sur nous afin de tracer l’unique sillon orienté vers son domaine

Le récit que je propose durant plusieurs semaines est d’une banalité évidente. Tellement ordinaire que le temps mis à le saisir sur ordinateur est ostensiblement du temps perdu. Seulement, je m’interroge sur la valeur de ce temps. N’est-ce pas aussi dans les moments sans importance que la main de Dieu modèle l’existence ? Le Créateur creuse en nos vies un unique sillon ; revenir sur le passé, dans le constat des récits qui en montrent les traces, nous en voyons la permanente direction. Parfois, il importe de lire entre les lignes d’un texte qui invite à une rapide lecture. Survol.

 

 

1956-1962. Journal de l’adolescent qui se sent appelé à une mission selon l’Évangile ; le désir de devenir prêtre avec l’objectif de rendre le Christ aimable, l’Église attrayante auprès de celles et ceux qui sont loin de Dieu.

 

Il y a bien longtemps que je pense à « publier » ce journal que j’ai précieusement conservé sans y toucher. Pour cela, il me fallait le relire et discerner si cela montrait quelques utilités. Voilà qui est fait et j’estime désormais que les raisons pour lesquelles il fut rédigé sont justifiées. Je m’explique. Très souvent les accompagnateurs spirituels expliquent que la rédaction d’un journal, d’un cahier de vie donne la possibilité de découvrir les constantes de l’appel de Dieu. En relisant son histoire, il est certain de découvrir dans les similitudes du vécu quotidien, le lieu où Dieu t’appelle. Pierre Berthelon, prêtre du Prado, supérieur du séminaire dans les années 60, puis supérieur général de 1977 à 1983 me le redisait régulièrement. L’être humain est invité à suivre un chemin, son chemin. Il trace un sillon, le creuse et le recreuse. Les constantes constatées indiquent où Dieu veut le conduire. N’avoir qu’un sillon et l’approfondir dans l’écoute de l’Évangile, telle est la vocation de toute une vie. La relecture des faits passés et des réflexions ou méditations entretenues, par les constantes observées, indique que le sillon tracé garde la même orientation. Nous pouvons y voir la preuve de l’appel de Dieu. Preuve d’une « vocation ».

En donnant à lire pendant plusieurs semaines ces pages, je souhaite rejoindre ce but vocationnel, me disant que des jeunes en quête de futur en compagnie d’un appel christique pourraient être heureux de discerner le chemin de leur avenir. Dans le récit de ces 4 années, je fus surpris de constater que j’avais, de fait, cette intention. Cela est noté au moins deux ou trois fois.

Au fil des années, le style change. D’abord narratif, le récit devient, me semble-t-il, plus méditatif.

 

 

En première page du cahier du « journal » :

Ce mois daoût (1956) je décide de relever toutes mes notes personnelles concernant mon caractère et mes sentiments. Aurais-je le courage de terminer ce journal ? Jaimerais beaucoup, car je pense qu’il me sera utile pour me connaître.

 

En deuxième page : sous le titre Préface, datée du 4 juillet 1959 - Pages vraisemblablement laissées libres pour une éventuelle présentation du « journal ».

 

Pourquoi écrire ce cahier ? Aurai-je la prétention de croire que mes idées peuvent être étudiées par les autres, c’est-à-dire que je suis capable de composer un journal afin de le porter chez l’éditeur ? Mes sentiments ne sont pas hors de l’ordre commun. Je suis - et je veux le croire – comme tout autre de mon âge (17 ans). J’aimerais le croire, car très souvent je me trouve spécial, d’un caractère et d’une âme sortant des sentiers battus.Pourquoi je ne me considère pas comme autrui ? Je suis sûr d’être semblable par la raison, mais par les sentiments, je me trouve différent.

Semblable aux autres par la raison : bien sûr, tous les éducateurs montrent à chaque instant notre similitude. Différents des autres par les sentiments : je ne vois que par l’extérieur ce que fait le voisin. L’âme n’a pas beaucoup de reflets sur le visage.

Il est une autre cause qui me fait dire différent, c’est la conversation. Mes camarades expriment peu d’idées intéressantes à mes vues. Ils formulent des paroles banales. Je ne veux pas dire que je suis au-dessus de ceux-ci. Et pourtant, n’y a-t-il pas de l’orgueil à juger les autres très communs ? Se trouver différent n’est pas, dans un sens, être supérieur. Ce que je pense peut être différent de ce que les autres pensent, sans que mes pensées soient supérieures. Étant ainsi, je suis original sans être orgueilleux et c’est préférable ; mais, en suis-je bien certain ?

Je respecte, ou plutôt je tâche de respecter autrui, car je me dis que ses idées sont aussi bonnes que les miennes. Elles peuvent même être meilleures ; mais je ne dis pas qu’elles sont mauvaises, car je me montrerai (alors) orgueilleux. Toutefois, je maintiens que nos idées sont fort différentes. Puis-je également maintenir que mes idées sont de beaucoup différentes de toutes les autres ? Je ne le dis pas, car cela serait pédant de le dire ; et pourtant, ne m’arrive-t-il pas de le penser ?

Je me sens bien incapable d’écrire un roman digne d’être édité. Le style premièrement, puis les idées soumises –mêmes si celles-ci sont spéciales- elles n’intéresseraient pas les lecteurs. Et, c’est le but d’un roman. Aussi, il ne faut pas croire en cette possibilité qui viendrait à l’esprit de tous si je racontais que j’écris mon « journal ». Si je l’écris, c’est pour moi seul, pour me connaître. Écrire mes sentiments sur du papier sera un très bon moyen pour me découvrir. Mais, n’est-il pas ridicule de se « confesser » aussi concrètement ? Et, n’est-il pas faiblesse que de se faciliter à la rêverie, de s’épancher sur son propre sort ?

Quoiqu’il en soit, j’écris. J’en sens le besoin. Je le fais en secret pour ne pas attirer la risée générale. Mettant Pascale à tort, je m’examine au plus profond de mon être et je conclus en disant que le « moi » n’est pas tellement haïssable.

 

Décembre 1956.

Je suis en troisième à Saint-Gilles. Écoles des frères des écoles chrétiennes à Moulin. Je commence ce journal. Jai 14 ans. Cest la première année que je remplis un carnet. J’essaie plutôt de le remplir, car il est difficile et pénible d’écrire. Ce que j’écris est médiocre. De plus cest la première fois que je mattache aux notes personnelles.

 

Lundi 31 décembre 1956.

Je vais au bal de fin d’année avec mes parents, les familles G…, C… et Ch… C’est ma première grande sortie.

 

à suivre...

 

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