​​​​​​​Il souhaita entrer au petit séminaire diocésain. Cette demande fut refusée car la famille ne pouvait pas payer. Il fut admis gratuitement au Prado

Publié le par Michel Durand

Maurice Roberjot

Maurice Roberjot

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§ 1 Formation de prêtres avec Antoine Chevrier

Antoine Chevrier voulait des prêtres pauvres pour évangéliser les pauvres. Pour atteindre ce but il établit un école cléricale. Ainsi en parle cette étude universitaire : L’idéal poursuivi : une communauté de prêtres partageant la pauvreté des ouvriers.

 

 

« Devant les difficultés rencontrées pour former une communauté de prêtres, le Père Chevrier s’était décidé à former des jeunes gens dans la ligne du Prado. Pour cela, il voulut fonder une école cléricale, mais dans un premier temps, en 1865, il dut envoyer ses élèves dans l’école cléricale de l’abbé Jacquier, dans la paroisse Saint-Bonaventure ; (les élèves partaient tous les matins, avec leurs provisions, accompagnés par Frère Suchet et rentraient le soir - J.F. Six, pp. 289-290). Comme il espérait voir l’abbé Jacquier s’installer au Prado, le Père Chevrier acheta un terrain situé en face de la chapelle en 1866, sur lequel une construction habitable abrita les religieuses et les petites filles. Ainsi, le local devenu libre, accueillit l’école cléricale dont les élèves pouvaient côtoyer les enfants de la première Communion.

Le Père Chevrier put donc, comme il le souhaitait avoir des prêtres formés avec ses enfants, puisque l’abbé Jacquier reçut, en septembre 1866, l’autorisation de l’archevêché de venir comme professeur de la nouvelle école cléricale (Chambost, Vie nouvelle du vénérable Antoine Chevrier…, pp. 290-293). Toutefois, il ne pouvait garder les élèves que jusqu’à la rhétorique ; ensuite, il devait les confier au grand séminaire ; même s’il continuait à avoir des contacts avec eux, il aurait souhaité leur donner une formation spéciale, ce que Mgr Caverot finit par lui accorder, en 1876 (Alfred Ancel, Le Prado …, p. 192).

L’école cléricale du Prado, qui réunit bientôt une vingtaine d’élèves, recevait, après leur première Communion, les enfants dont les parents étaient honnêtes et bons chrétiens, qui devaient subir un examen en français et présenter une lettre de recommandation de leurs maîtres et de leur curé. Le Père Chevrier voulut aussi accueillir dans cette école des enfants qui avaient fait leur première Communion au Prado, mais il dut y renoncer, car les familles les retiraient et les enfants partaient également d’eux-mêmes. Il y recevait aussi, éventuellement, les élèves des autres diocèses. L’école cléricale comprenait les postulants, qui pouvaient devenir clercs, après avoir montré des dispositions pour le sacerdoce, et ces derniers devenaient tertiaires après avoir été reçus dans le Tiers-Ordre de Saint-François (C. Chambost …, pp. 293-297). Dans le règlement de l’école cléricale du Prado, on retrouvait, bien sûr, des pratiques de pauvreté : le mercredi, jour de promenade, habituellement, devenait parfois un jour de travail, car il fallait allier le travail et l’étude, et se rappeler que le pauvre devait travailler avant de se promener ; de plus, les élèves de l’école cléricale faisaient eux-mêmes tout le travail de la maison, en se rappelant, là aussi, que les pauvres et les ouvriers apprenaient à se servir eux-mêmes, comme ils étaient appelés à le faire pendant toute leur vie (C. Chambost, p. 295 et A. Ancel, Le Prado …, p. 52).

 

§ 2 À l’occasion de. la prière de sépulture de Maurice Roberjot

Maurice Roberjot, tout en n’ayant pas reçu cette formation mise en place par Antoine Chevrier, semble très nettement s’en approcher. C’est au moins ce que j’ai ressenti en lisant ce texte publié suite à l’annonce de sa mort : endormi dans la paix du Seigneur le 30 mai 2022, dans sa 96e année et la 71e année de son sacerdoce.

Né le 10 juillet 1926 à Montceau-les-Mines (Saône-et-Loire) ; prêtre catholique du diocèse d’Autun ; ouvrier agricole de 1955 à 1968 à La Roche-Vineuse (Saône-et-Loire) ; vice-président de centre social ; militant à la CNL (confédération national du logement) à Chalon-sur-Saône (Saône-et-Loire).

 

« En 1934, le dimanche des élections syndicales où mon père se présentait comme délégué mineur, son ingénieur, à l’entrée de l’église lui cria : « J’espère que vous n’aurez pas l’audace d’aller communier aujourd’hui… » Heureusement mon curé, le père Augros, averti de l’altercation, vint dire à mon papa : « Si vous n’avez pas la force de vous présenter à la table de communion, j’irai vous la porter sur place. » Le désir d’être un prêtre comme ça venait de se graver en moi. »
Maurice Roberjot naquit dans une famille ouvrière. Son père, Jean-Marie Roberjot, était mineur à Montceau-les-Mines, délégué CFTC. Après avoir été prisonnier durant la Première Guerre mondiale, il s’était marié en 1920 à Saint-Jean-de-Vaux (Saône-et-Loire) avec Marcelle Jordery, brodeuse. De cette union, étaient nés deux garçons, dont Maurice Roberjot était le cadet. La famille était catholique très pratiquante. Les partages d’évangile faits en famille, avant le déjeuner du dimanche, le marquèrent profondément.

En 1936, à l’issue de ses études primaires à Montceau-les-Mines, Maurice Roberjot souhaita entrer au petit séminaire diocésain de Rimont (Saône-et-Loire). Cette demande fut refusée, car le père étant tombé malade, la famille ne pouvait pas payer la pension. Il fut alors admis gratuitement au petit séminaire du Prado à Limonest (Rhône). Là, il découvrit un réel attachement à Jésus-Christ et le respect des pauvres qui allaient marquer toute sa vie de prêtre. Entre 1943 et 1945, il connut de graves difficultés de santé (il fut alité pendant neuf mois).

 

Ordonné prêtre en mars 1952 pour le diocèse d’Autun (Saône-et-Loire), il fut nommé dans la paroisse ouvrière du Sacré-Cœur à Chalon-sur-Saône. Il y resta trois ans puis, en 1955, devint curé de La Roche-Vineuse (Saône-et-Loire), village du Mâconnais profondément marqué par la culture de la vigne et par un anticléricalisme virulent. Son désir profond et sa formation de prêtre du Prado l’amenèrent à être prêtre au travail. Il y pensait depuis longtemps, mais sans s’y être réellement préparé. Il ne connaissait rien du monde rural. Les circonstances allaient décider de son engagement.
D’une part, les difficultés financières de la paroisse l’incitèrent à trouver un travail « pour subsister », d’autre part, pour chauffer l’église et la maison des religieuses au service de la paroisse, des habitants travaillaient à l’abattage, au transport et au sciage d’arbres. Il proposa de « restituer » ce temps passé en journées de travail comme vendangeur. Dans le même temps, des jeunes lui demandèrent de les aider dans leur réflexion. Il s’engagea alors à trouver du travail. Des « patrons » cherchaient des journaliers. Il s’embaucha pour quatre journées de travail de dix heures par semaine, chez quatre propriétaires différents. Les trois premières années furent des années d’apprentissage du travail de la vigne, qui se prolongèrent par dix années comme salarié viticole. Il s’inscrivit à la Mutualité sociale agricole, véritable reconnaissance de son statut de travailleur.

Il découvrit alors la réalité du salariat viticole. Les « journaliers » se composaient de trois catégories : ceux qui possédaient quelques vignes et complétaient leur revenu par quelques journées de travail dans les vignes des autres ; ceux qui logeaient chez leurs patrons et étaient, de ce fait, corvéables à merci ; ceux qui n’avaient rien, étaient de véritables « pauvres types » payés à l’époque (1,5 franc de l’heure. Que fallait-il faire ? et avec qui ? Il n’y avait pas d’autre organisation que la FNSEA, c’est-à-dire le syndicat patronal. C’est alors qu’arrivèrent les événements de Mai 68. Grâce aux accords de Grenelle, le salaire horaire doubla, laissant en arrière-plan les « revendications ». Maurice Roberjot fut très sensible à cette répercussion des luttes du mouvement ouvrier sur l’évolution des conditions de vie du salariat rural. Ces dix années furent une expérience très forte. Ses relations avec la population avaient évolué, il était reconnu par les vignerons comme l’un des leurs.

En 1968, il retrouva la paroisse chalonnaise du Sacré-Cœur puis, de 1973 à 1980, il fut responsable de jeunes en recherche sur leur vocation sacerdotale, le « foyer-séminaire Saint Paul », toujours à Chalon-sur-Saône. De 1980 à 1990, il fut prêtre à la paroisse Saint-Paul de Chalon-sur-Saône, puis de 1990 à 2000 prêtre auxiliaire à la paroisse du Bon Samaritain à Saint-Rémy (Saône-et-Loire). Délaissant les cures de ces deux dernières affectations, il prit un logement dans ces quartiers populaires, à la ZAC du Plateau puis aux Charreaux. C’est au cours de cette décennie qu’il fut vice-président du centre social de la ZAC et qu’il milita à la CNL.

À sa retraite en 2001, il s’installa au foyer-logement Louis Aragon à Saint-Rémy.

Dictionnaire biographique « le Maitron » mouvement ouvrier, mouvement social.

 

 

 

 

 

 

 

 

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