La tension entre l’unicité du message et la diversité apostolique peut se vivre dans la conformité nécessaire au message et se conformer à l’essence.
Bernard a rédigé cette page qui est à situer dans la ligne des échanges sur le livre de Christoph Theobald, Le courage de penser l’avenir. Elle nécessite une grande attention. On y reçoit le courage de l’invention apostolique : créativité missionnaire. À mettre à la suite de ma page du 16 décembre. Transmission de l’annonce christique.
La Théologie est intrinsèquement liée à l’histoire. La question posée est celle de l’identité chrétienne et la manière de l’aborder de manière prospective dans sa catholicité. Cet extrait du début du chapitre XIV de Christoph Theobald oriente tout ce qui va être développé dans ce texte : la révélation du père dans son fils Jésus Christ qu’il a transmis aux douze apôtre et l’apostolicité, une fois les douze disparus, dans la diversité des diffuseurs et dans l’unité et la conformité au message du Christ.
La vérité du message du Christ est considérée comme immuable. Comment concilier ce qui relève du droit divin (jus divinum) et la diversité des annonceurs et des récepteurs dans l’espace et à travers l’histoire. Ce qui amène à préciser le concept d’apostolicité dans l’unicité de la référence unique au message du fondateur et de l’institution. La diversité trouve une réalité historique dans les différentes confessions chrétiennes. Les traditions orthodoxes, et catholique reçoivent comme canonique la figure du mono-épiscopat, telle qu’elle s'est formée au IIe siècle, avec une insistance particulière sur sa dimension sacerdotale, tandis que la tradition luthérienne et plus largement protestante valorise plutôt la figure « presbytérale » sous sa forme plurielle et collégiale et sans référence sacerdotale, figure plus ancienne et apparemment majoritaire.
La tension entre l’unicité du message et la diversité apostolique peut se vivre dans la conformité nécessaire au message et se conformer à l’essence. Dans ce contexte le ius divinum (droit divin) a une fonction heuristique (dans le texte onction heuristique) si dans un dialogue œcuménique elle se laisse interroger sur son sens et son interrogation. Lumen gentium s’est plutôt focalisé sur l'acte d'institution par le Christ et le Saint Esprit — appelé « le co-instituant de l’Église » le quatrième Evangile de Jean attribue au Paraclet l'inspiration de quelque chose de « véritablement nouveau et distinct de la parole de Jésus »
En confessant que l'Église de tous les âges est "apostolique", nous tenons que le témoignage apostolique en représente à la fois l'origine normative et le fondement permanent. La diversité des annonceurs apparait dès l’origine. Jésus situe l’origine de ses affirmations dans la référence au Père. Paul est le seul apôtre qui se réfère à lui-même et à celui qui l’a envoyé Jésus-Christ. Il développe les multiples charismes des apôtres qui sont la multiplication des « dons » ou « manifestations de l’Esprit », toujours absolument singulières et « en vue du bien de tous »
La multiplicité des dons et la diversité des communautés nécessitent de définir un lien supra-local en conformité avec le message de Jésus-Christ : les douze avec Pierre au départ, puis la fécondité apostolique. On ne voit pas comment ce long processus historique de mutation peut se réaliser autrement que par la force de l'Esprit et une « synodalité » bâtie sur un accord intérieur et extérieur entre consciences, tous désireux de lui obéir.
L’apostolicité comme mise en présence de l'unique seuil pascal nous paraît être déterminée. Le passage à l’âge postapostolique fait naître d’autres déterminations formulées en termes de dogme et de droit divin qui comme le canon des Écritures et le mono-épiscopat fondé sur une« succession ininterrompue », resteront normatifs pour toute la suite de l'histoire.
L'idée principale, à savoir qu'une grammaire engendre tous les énoncés d'une langue peut être appliquée analogiquement au mode d'engendrement des communautés chrétiennes à travers les âges. Le paradigme grammatical représente d'abord l'intérêt d'introduire un « invariant structurel situé à un méta-niveau fondamental (certains diraient « transcendantal) caractéristique décisive qu'analogiquement il partage avec le « droit divin positif ». L’avantage de ce paradigme grammatical est non seulement de faire jouer un rôle limitatif au droit divin mais est aussi une fonction générative. Comprendre cette « note » de l'Église comme dispositif « ouvert » et traduire sa validité permanente, non pas en termes de « droit divin » mais à l'aide du paradigme « grammatical» permet de la maintenir comme irréversible invariant au sein des évolutions historiques que nous connaissons.